RECHERCHE SUR LE SITE

Références
bibliographiques
avec le catalogue


En plein texte
avec Google

Recherche avancée
 

Tous les ouvrages
numérisés de cette
bibliothèque sont
disponibles en trois
formats de fichiers :
Word (.doc),
PDF et RTF

Pour une liste
complète des auteurs
de la bibliothèque,
en fichier Excel,
cliquer ici.
 

Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Michel Beaud, L'économie mondiale dans les années 80 (1989)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir du livre de Michel Beaud, L'économie mondiale dans les années 80. Paris: La Découverte, Éditeur, 1989, 336 pp. Collection: Cahiers libres. Une édition numérique réalisée par Marcelle Bergeron, bénévole, professeure retraitée de l'École polyvalente Dominique-Racine de Chicoutimi. [Autorisation conjointe accordée par M. Beaud et par le directeur général de la maison d'édition, La Découverte, Monsieur François Gèze le 1er août 2007]

Introduction


Le kaléidoscope de l'économie mondiale
Un système national/mondial hiérarchisé

Ce livre est consacré à l'économie mondiale dans les années 1980. 

Économie mondiale, la formule appartient au langage courant. Homme politique, chef d'entreprise, journaliste, agriculteur, transporteur, salarié, chômeur, étudiant ou économiste : chacun l'emploie ; pas toujours avec la même précision ; pas forcément dans le même sens, ni avec le même contenu ; mais, en gros, on sait de quoi l'on parle. Et à une époque où, comme on faisait de la prose du temps de Molière, chacun fait de l'économie, n'est-ce pas suffisant ? 

Bref, « économie mondiale » est une notion, une notion pratique, usuelle ; une notion qui recouvre, nous le découvrirons progressivement, une réalité complexe, à la fois multiple et structurante, contradictoire et cohérente. 

Cette réalité, nous en avons esquissé le processus historique de formation à travers l'histoire du capitalisme [Beaud 1981, nouvelle éd., 1987] * ; en vue de son étude, nous avons mis en place, dans un précédent ouvrage, une grille d'analyse en termes de « système national/mondial hiérarchisé » — SNMH [Beaud 1987]. Et nous aurons, en approfondissant son examen, à préciser les concepts nécessaires, tout en réfléchissant sur la démarche de connaissance elle-même. 

Mais, puisque la notion existe, et que chacun en use, partons d'elle. Ou plutôt, partons de ses différentes significations. Car, selon les cas, l'expression « économie mondiale » peut signifier :

 

1.  l'ensemble des activités productives des sociétés humaines ;

2.  l'ensemble des économies nationales de la planète ;

3.  l'ensemble des relations économiques internationales ;

4.  l'ensemble structuré par les activités planétaires des firmes et banques multinationales ;

5.  un système structuré en grands blocs (Centre/Périphérie, Ouest/Est/tiers-monde, Nord/Sud) ;

6.  un système mondial constitué par le mode capitaliste de développement ;

7.  une « réalité mondiale », dont on constate le poids croissant sans forcément en expliquer la genèse ;

8.  les activités économiques de l'humanité (prises notamment dans leurs relations avec l'environnement et les ressources terrestres) ;

9.  des mixtes non élaborés de plusieurs, ou de l'ensemble, des acceptions recensées ci-dessus.

 

Ainsi, plutôt qu'une lunette permettant de mieux saisir, de mieux voir la réalité, la notion d'« économie mondiale » constitue un véritable kaléidoscope : un imperceptible déplacement..., et l'image se transforme. 

Puisque, qu'on le veuille ou non, elles sont dans nos têtes, partons de ces différentes images, en regardant... ce kaléidoscope. 

 

Le kaléidoscope de l'économie mondiale

 

Première image...

 

1.  L'ensemble des activités productives de l'économie mondiale 

Quelques chiffres essentiels résument cette vision : 

  • Population mondiale au milieu de 1987 : 5 milliards [1]. 
  • Production mondiale brute en 1985 : près de 15 000 milliards de dollars [2]. 
  • Production moyenne par habitant : un peu moins de 3 000 dollars en 1985 [3]. 

De même, peut-on parler de la consommation mondiale, de l'investissement mondial, etc. 

S'inscrivent également dans cette vision les statistiques traditionnelles des grandes productions mondiales ; ainsi, pour 1986 ou 1987 [4] : 

Céréales (1986) 1 870 millions de tonnes.
Sucre (1986) 100 millions de tonnes.
Coton (1986) 15 millions de tonnes.
Houille  3 420 millions de tonnes.
Pétrole 2 918 millions de tonnes.
Minerai de fer 936 millions de tonnes.
Phosphate naturel 146 millions de tonnes.
Bauxite 94 millions de tonnes.
Acier  733 millions de tonnes.
Ciment 1 041 millions de tonnes.
Électricité hydraulique 524 millions de TEP [5].
Électricité nucléaire 602 millions de TEP.
Automobiles 33,5 millions de véhicules…
       

Inutile de multiplier les exemples ; chacun a présent à l'esprit les tableaux, les ouvrages, notamment ceux de géographie économique, sur les grandes productions mondiales. C'est un regard, utile parfois (par exemple pour situer des ordres de grandeur, évaluer des frets transportés), mais limité. 

Tournons donc la bague du kaléidoscope...

 

2.  L'ensemble des économies nationales de la planète

 

« L'économie mondiale peut se définir comme l'ensemble des économies nationales », écrit Pierre Bauchet (Le transport international, Economica, 1988, p. 15). 

C'est probablement une des représentations les plus usitées : surtout depuis un ou deux siècles — c'est-à-dire depuis que l'État-nation s'est imposé comme figure majeure d'organisation des sociétés humaines ; et plus encore depuis la fin des années 1930 — période à partir de laquelle, avec la macroéconomie keynésienne et les comptabilités nationales, le cadre national s'est généralisé pour le recueil statistique et les études économiques concrètes. 

Est-il besoin d'insister, tant est ancrée en nous cette vision ? Ne parle-t-on pas quotidiennement de l'économie française (afghane, albanaise, algérienne, allemande — de l'Ouest ou de l'Est —, etc.) ? N'en parle-t-on pas pour évoquer à la fois des grandeurs (production, importations, exportations, etc.) et pour nommer l'ensemble des activités économiques d'un pays ? 

D'épais annuaires (nationaux ou internationaux) nous informent sur ces économies nationales. Contentons-nous d'une carte [6]. 

 

LES ÉCONOMIES NATIONALES
SELON LEUR PART DANS LE PNB MONDIAL EN 1983
 

 Source : Atlas, Banque mondiale, 1986.
in L’Événement du Jeudi, du 15 janvier 1987.

 

Cette carte évoque bien la double inégalité entre les nations, quant au poids du produit intérieur et quant au produit par tête ; elle symbolise aussi la conception — courante — de l'économie mondiale comme collection, addition des économies nationales. Mais l'économie mondiale, c'est évidemment bien plus que cela... 

Nouveau déplacement du kaléidoscope, nouvelle image.

 

3.  L'ensemble des relations économiques internationales

 

C'est, avec la précédente, la vision la plus courante ; elle est nécessairement liée à la prise en compte de l'économie nationale, sans laquelle il ne peut y avoir relation internationale. En outre, depuis les mercantilistes et les premiers classiques, c'est un champ d'étude privilégié des économistes ; à tel point que « l'économie internationale » est devenue un domaine particulier — largement autonome — de la « science économique ». 

Les relations économiques et financières sont diverses :

— flux commerciaux ;
— échanges de services, de savoirs et de connaissances ;
— paiements courants ;
— flux de capitaux et crédit international ;
— mouvements de populations ;
— tourisme international ;
— circulation des idées, des images, des représentations... 

Parmi elles, certaines sont relativement bien saisies et mesurées ; d'autres approximativement ; sur d'autres, on ne dispose pas d'informations systématiques. D'où un biais qui conduit à privilégier les types de relations sur lesquelles l'information est disponible, et, en tout premier plan, les flux commerciaux de marchandises matérielles. 

À côté de la littérature théorique sur l'échange international, d'innombrables travaux, descriptifs ou analytiques, sont consacrés aux échanges commerciaux ; la matière est abondante : car il s'agit d'un domaine où les informations sont le plus facilement collationnées au niveau national (grâce à l'administration douanière) et où elles sont le plus largement publiées tant par les autorités nationales que par les différents organismes internationaux, GATT, FMI, Nations unies, CNUCED, OCDE, Communautés européennes et autres ensembles régionaux, statistiques nationales : de très nombreux et volumineux annuaires — et autres publications régulières — fournissent une masse écrasante d'informations systématiques, mais d'intérêt inégal. 

Tableaux, matrices ou cartes : un livre entier pourrait être consacré uniquement à la présentation réfléchie d'une partie sélectionnée de ces données.

En 1985, le commerce mondial a été de l'ordre de 2 000 milliards de dollars [7], soit 13 % environ du produit mondial. Les flux de paiements internationaux peuvent être évalués à 100 000 milliards de dollars [8]. 

Ces relations économiques internationales constituent un réseau multiforme, mouvant, entre les économies nationales saisies dans leurs dimensions territoriales, dans le cadre de leurs frontières ; mais elles forment aussi une trame essentielle dont l'analyse doit permettre de mieux comprendre comment s'articulent ces « économies nationales/territoriales » et cette « économie mondiale », dont nous pressentons l'importance et dont nous voulons mener l'étude. 

Tournons la bague du kaléidoscope : une autre image apparaît.

 

4.  Les activités planétaires des firmes et banques multinationales

 

Ces firmes et banques ont nourri toute une littérature depuis trois ou quatre décennies ; elles semblent, aujourd'hui, inspirer moins d'auteurs qu'il y a quinze ou vingt ans ; peut-être se sont-elles faites plus discrètes... 

Leur puissance n'a en rien diminué ; bien au contraire : en 1984, les deux cents plus grandes firmes privées mondiales — toutes multinationales — font ensemble environ 3 000 milliards de dollars de chiffre d'affaires [9], ordre de grandeur correspondant au quart environ du produit mondial. 

La première de ces firmes, General Motors, fait en 1986 un peu plus de cent milliards de dollars de chiffre d'affaires [10]. Cent milliards de dollars : la presque totalité des pays de la planète ont un PIB inférieur à ce chiffre ; une quinzaine de pays seulement ont un PIB plus important. Ces deux grandeurs — produit intérieur brut et chiffre d'affaires — ne sont pas strictement comparables ? Certes. Mais le rapprochement de leurs ordres de grandeur est significatif. 

Le tiers, la moitié, les deux cinquièmes ou les deux tiers ? Quelle est la part des firmes multinationales dans la production manufacturière mondiale ? Dans le commerce mondial ? Des évaluations sont avancées, presque toujours à partir de sources anciennes. Seule certitude : leur poids est décisif. 

Tout un courant de pensée en est arrivé à voir dans les firmes multinationales la quintessence de l'économie mondiale. Ainsi, pour S. Hymer, « les FMN organisent le monde », et, selon R. Murray, « l'avenir du système de l'économie mondiale est tout entier soumis à la domination sans partage des FMN » [11]. Nouvelles visions d'un ultra-impérialisme où les FMN sont présentées comme « des agents autonomes libres de toute détermination de caractère économique et politique » [12]. 

L'erreur n'est pas de souligner le rôle des firmes et des banques multinationales : il est fondamental. L'erreur d'un certain nombre d'auteurs est de les prendre en elles-mêmes ; de les couper de leurs bases nationales, des capitalismes nationaux dans lesquels elles s'enracinent, des États nationaux avec lesquels elles ont des relations privilégiées. L'erreur est de ne pas articuler l'étude des firmes multinationales et celle des relations économiques internationales. L'erreur finalement est d'en faire des entités à part, simplement porteuses d'une logique de mondialisation, d'homogénéisation des sociétés de la planète, voire de rapprochement entre les peuples...

 

5.  Un ensemble structuré en grands blocs

 

On connaît ces découpages planétaires : 

— Ouest/Est/Sud ou, ce qui revient au même : pays capitalistes/URSS et Europe de l'Est/tiers monde, ou encore selon les formulations des organisations internationales : pays à économie de marché/pays à économie planifiée/pays en voie de développement ;
 
— Nord/Sud, ou : pays industrialisés/pays en voie de développement, ou encore : Centre/Périphérie, pour reprendre des termes récemment remis en vogue par André Gunder Frank, Samir Amin et Immanuel Wallerstein. 

Nous utilisons chaque jour ces notions. Elles organisent nos représentations, nos schémas, nos tableaux. Elles nous aident à parler d'une manière ramassée d'une réalité complexe et diversifiée. 

Encore ne faut-il pas se laisser enfermer dans les simplismes de ces regroupements, surtout dans une période où la complexité s'accentue. 

La coupure Est/Ouest était forte au moment de la guerre froide ou de la guerre de Corée ; mais, à l'Ouest, l'hégémonie américaine s'est affaiblie ; à l'Est, la Yougoslavie, l'Albanie, la Chine ont choisi leurs propres voies depuis longtemps, et, en Europe de l'Est, divers cours nouveaux semblent engagés ; en outre, entre l'Est et l'Ouest, échanges et relations se sont multipliés.

 

LES TROIS MONDES EN QUELQUES CHIFFRES

 

Produit intérieur brut * en milliards de dollars en 1984 (A)

Produit intérieur brut* par tête en dollars, en 1984 (B)

Taux de croissance annuel moyen en 1980-1984, en %

de (A)

de (B)

Pays développés à économie de marché

8 235

10 400

1,8

1,1

Pays en développe-ment à économie de marché

2 169

860

1,7

– 0,7

Pays à planification centralisée **

1 243

800

4,8

3,6

*   Pour les pays à planification centralisée : produit matériel net.

** Y compris la Chine et quelques pays du tiers monde : Cuba, l'Afghanistan, la Corée du Nord,          le Vietnam.

N.B. Ces évaluations conduisent à un produit mondial d'un peu moins de 12000 milliards de dollars pour 1984, chiffre non homogène avec les estimations citées plus haut d'un produit mondial d'un peu moins de 15 000 milliards de dollars en 1985. Périlleuse incertitude de l'évaluation statistique...

Source : [United Nations, 1987], p. 3, 205 et 212.

 

De même, le tiers monde avait une cohérence forte — surtout idéologique et politique — au moment de Bandoeng (1955), et dans les temps majeurs des luttes pour la décolonisation et l'indépendance ; mais le Nord s'est découvert un Sud ; et dans le tiers monde, que de rapides diversifications en trente ans, et que de différences entre les pays de toutes les misères (pays pudiquement nommés « moins avancés ») et les opulents pays pétroliers à faible population... 

Bien sûr, rien n'interdit de penser encore en termes de deux ou trois « mondes » ; mais, pour rendre compte de la réalité des années 1980 d'une manière satisfaisante, ce sont huit, dix, douze groupes de pays qu'il convient d'identifier et d'analyser.

 

LE NORD ET LE SUD 


6.  Un système mondial constitué par le mode capitaliste de développement

 

Premier à avoir « lu », dans le foisonnement du réel, la logique et la dynamique structurantes du capitalisme, Karl Marx avait déjà constaté la constitution d'un marché mondial. 

Avec et après la « grande dépression » de la fin du XIXe siècle, la dimension mondiale du capitalisme s'accentue : Rudolf Hilferding, Otto Bauer, Karl Kautsky, Rosa Luxemburg, Nicolas Boukharine, Lénine..., les analyses foisonnent ; un mot se dégage : « impérialisme ». 

La définition qu'en donne Lénine va s'imposer pour les décennies au sein du mouvement communiste international et donc dans les courants dominants de la pensée marxiste : « L'impérialisme est le capitalisme arrivé à un stade de développement où s'est affirmée la domination des monopoles et du capital financier, où l'exportation des capitaux a acquis une importance de premier plan, où le partage du monde a commencé entre les trusts internationaux et où s'est achevé le partage de tout le territoire du globe entre les grands pays capitalistes [13]. » 

Après la Seconde Guerre mondiale, une nouvelle accentuation de l'internationalisation et de la multinationalisation se produit sous l'impulsion de nouveaux centres capitalistes ; marxistes des obédiences traditionnelles, radicaux américains, théoriciens latino-américains de la dépendance, marxistes réveillés de la génération 1968, militants de l'émancipation du tiers monde : d'innombrables ouvrages sont publiés qui mettent en scène et analysent le capitalisme dans la dimension mondiale. 

Certains auteurs en arrivent, au moins dans certains passages de leurs œuvres, à affirmer le caractère prédominant, déterminant de ce « capitalisme mondial ». 

Ainsi, Samir Amin : « Notre monde n'est pas constitué de systèmes nationaux juxtaposés, qui entretiendraient entre eux des relations "extérieures", fussent-elles importantes, comme il l'a été jusqu'à une époque qui n'est peut-être pas si lointaine. Il constitue une unité, un tout, le système capitaliste mondial » [14]. « L'économie "sous-développée" est une pièce d'une machine unique : l'économie capitaliste mondiale [...]. La théorie du sous-développement et du développement ne peut être que celle de l'accumulation du capital à l'échelle mondiale » [15]. 

André Gunder Franck formule lui-même l'« argument central » de ses études : « Le sous-développement en Amérique latine (et ailleurs) s'est développé en tant que produit de la structure coloniale du développement capitaliste mondial » [16]. 

Et Immanuel Wallerstein, disciple américain de Fernand Braudel, systématise la notion d'« économie-monde » jusqu'à écrire : « Le développement de l'économie-monde capitaliste a entraîné la création de toutes les grandes institutions du monde moderne : classes, groupes ethniques/nationaux, ménages, ainsi que les "États". Toutes ces structures sont postérieures, non antérieures, au capitalisme ; elles en sont la conséquence, non la cause » [17]. 

Au centre de ces analyses, donc, le capitalisme, dans sa dimension mondiale.

 

7.  Une « réalité mondiale », dont on constate le poids croissant sans forcément en expliquer la genèse

 

Des lecteurs hâtifs ou superficiels des précédents auteurs, ou des esprits trop systématiques, ont souvent franchi le pas et sauté de l'analyse du développement à l'échelle mondiale du capitalisme à la mise en avant d'un système capitalisme mondial, qui organise tout, détermine tout, structure chaque chose d'une manière unilatérale : un « système capitaliste constitué », pris sans tenir compte de sa genèse et qui devient alors une sorte de deus ex machina de l'économie mondiale : cause de chaque événement, mais n'expliquant finalement plus rien. 

Ils rejoignent alors ceux qui, sans prendre en compte l'analyse du capitalisme, soulignent l'importance primordiale de « quelque chose de mondial », d'une « réalité mondiale », d'un processus de mondialisation, que, souvent, ils se bornent à constater ou dont ils décrivent parfois les manifestations qu'ils considèrent comme majeures. Particulièrement suggestif — comme peut l'être une bonne caricature — le schéma que l'on trouve vers la fin d'un ouvrage, par ailleurs bien documenté, sur la phase contemporaine de la crise [18]. 

Symboliquement, l'« économie mondiale » y apparaît distincte, séparée et au-dessus des économies nationales. 

Et ceci illustre bien le message central actuel des gouvernants et dirigeants d'entreprise : « Attention, nous n'avons plus de choix, plus de marge de manœuvre : nous sommes soumis aux évolutions de l’"économie mondiale" » ; ou encore : « Tout ce qui nous arrive de mal — inflation, chômage, perte de pouvoir d'achat, déflation, et bien sûr, pertes de marchés extérieurs et concurrence étrangère — cela vient de l'extérieur, de l’"économie mondiale". »

 

Une représentation de l’« économie mondiale ». 

 

L'économie mondiale, fatalité des temps modernes, non réellement articulée ni avec les économies nationales prédominantes, ni avec les firmes multinationales.

 

8.  Les activités économiques de l'humanité (prises notamment dans leurs relations avec l'environnement et les ressources terrestres)

 

Our Common Future, tel est le titre du récent rapport de la Commission des Nations unies sur l'environnement et le développement [19].

Notre avenir commun : pour l'ensemble de l'humanité, pour l'ensemble du monde vivant et finalement, pour l'ensemble de la planète : 

— chaque année, six millions d'hectares de terres arables sont transformés en désert ;
 
— chaque année, plus de 11 millions d'hectares de forêts sont détruits — soit, en trois décennies, à peu près la superficie de l'Inde ;
 
— les rejets chimiques des différentes activités modernes entraînent des précipitations acides qui tuent les forêts, les lacs et mettent en péril, aussi bien le vivant que des monuments irremplaçables du patrimoine humain ;
— la combustion de combustibles fossiles entraîne le rejet massif de dioxyde de carbone dans l'atmosphère, ce qui, avec d'autres composants chimiques, génère un effet de serre qui est à l'origine d'une tendance au réchauffement de l'atmosphère ;
 
— rejets chimiques et radioactifs, accidentels ou « normaux » mais cumulés, affectent les eaux, les sols, la chaîne du vivant et de l'alimentation, détruisant ce qu'on nommait au XVIIIe siècle les « bontés de la nature » et menaçant aujourd'hui des groupes localisés et, peut-être demain, l'entière humanité... 

Le phénomène est massif. Une seule illustration : la consommation d'énergie est passée d'un milliard de tonnes d'équivalent charbon en 1900 à trois en 1950, et douze en 1986 ; les rejets carbonés qui en résultent sont passés de 1,6 milliard de tonnes en 1950 à 5,2 en 1985-1986 [20]. 

Les tendances s'aggravent. Ainsi, pour la teneur de l'atmosphère en composants chimiques : 

— pour le méthane, 0,7 ppm (parties par millions) jusqu'à 1700, 1,4 en 1960, 1,8 en 1986, 2,5 prévus pour 2020 ;
 
— pour le protoxyde d'azote, 01 ppm au début du siècle, 0,3 dans les années 1970, 0,4 vers 2030 ;
 
— pour le gaz carbonique (CO 2, 260 ppm en 1800, 300 vers 1950, 350 vers 1985. 

En outre, la menace d'atteinte à la couche protectrice d'ozone du fait des rejets de chlorofluorocarbones — seulement potentielle, et niée ou fortement minimisée au début des années 1970 — se concrétise d'une manière indéniable dans les années 1980. 

Les accidents industriels et énergétiques, chimiques et nucléaires notamment, augmentent en nombre d'une manière exponentielle et leurs effets s'étendent de plus en plus dans l'espace et le temps, jusqu'à concerner l'entière planète et les générations à venir. Ainsi l'accident de Tchernobyl. 

Comme on peut le lire dans un rapport du Earth Systems Science Committee de l'Administration aéronautique et spatiale américaine : « Nous, les peuples du monde, sommes devant une nouvelle responsabilité quant à notre devenir global. À travers notre activité économique et technique, nous contribuons maintenant à des changements globaux significatifs sur la terre, et cela, en quelques générations. Nous sommes devenus une composante du système terrestre et une des forces qui contribue à sa transformation [21]. » 

Quelle richesse, quelle diversité, dans cette rapide évocation des « vues kaléidoscopiques » de l'économie mondiale. Elles reflètent l'extrême complexité de cette réalité que nous évoquons quand nous parlons d'« économie mondiale ». Mais elles traduisent aussi l'extrême éclatement des analyses de cette réalité, dont nous pensons qu'elle a une unité profonde, mais dont aucune de ces vues ne permet de rendre compte dans sa globalité et dans sa mouvante diversité. 

Aussi est-il utile de disposer d'une grille d'analyse permettant de saisir, et l'unité, et la complexité ; permettant aussi de resituer chacune des images entr'aperçue grâce au kaléidoscope par rapport à cette totalité que nous voulons étudier et que nous nommons « économie mondiale ». Nous en avons proposé une [Beaud 1987] : l'analyse en termes de « système national/mondial hiérarchisé ». 

 

Un système national/mondial hiérarchisé

 

Notion d'usage courant, la formule « économie mondiale » recouvre une réalité dont l'importance est de plus en plus pesante — pour les États-nations, les groupes sociaux, les familles et les individus -dans le monde contemporain. 

Cette réalité n'a pas existé de tout temps ; elle s'est formée et affirmée dans l'histoire. Mais elle ne peut pas non plus être considérée comme une « matrice » qui se serait mise en place à l'aube des Temps modernes et dans laquelle se seraient opérés les développements des différents aspects du monde moderne. 

En fait, le renforcement de la dimension mondiale d'aspects de plus en plus nombreux de la vie économique s'enracine dans le foisonnement des relations marchandes des XVe et XVIe siècles, se révèle avec les premiers développements du capitalisme, dès la période caractérisée par la constitution et le renforcement des premiers capitalismes nationaux ; elle se structure d'une manière de plus en plus dense entre la révolution industrielle et la Seconde Guerre mondiale, et s'impose comme prédominante dans la période contemporaine, avec la troisième grande crise du capitalisme [Beaud 1981, nouvelle éd. 1987]. L'économie mondiale ne peut donc être comprise que par la prise en compte de l'histoire du capitalisme, de sa dynamique de reproduction élargie, qui, très tôt, lui donne sa dimension mondiale. 

Comme toujours, la prise de conscience, la connaissance de cette réalité a été décalée : Marx, premier lecteur du capitalisme, a dégagé la notion de marché mondial [22] ; puis fut élaborée par ses disciples l'analyse de l'impérialisme. Depuis la Seconde Guerre mondiale, la notion d'économie mondiale a été admise dans les différentes disciplines économiques et sociales ; et son emploi s'est répandu relativement récemment. 

Paradoxalement, c'est au moment où — avec les analyses keynésiennes, les comptabilités nationales, les théories de la croissance et de l'inflation — la connaissance des « économies nationales » a effectué des avancées décisives, que s'est produite la nouvelle vague de fond du capitalisme mondial : la densification et la nouvelle mutation des relations structurantes mondiales bousculent et transforment profondément les réalités (économiques, sociales et politiques) nationales, ébranlant et déstabilisant par là même les constructions théoriques censées rendre compte des principaux phénomènes concernant les « économies nationales »... 

Pour passer de la notion au concept, il faut un effort de rigueur : le premier temps doit consister à articuler économie — les réalités économiques dans leur diversité et leurs innombrables implantations — et capitalisme — à travers le mouvement duquel se constitue une entité mondiale. 

Économie et capitalisme : là se situe le point nodal de notre réflexion ; l'économie constitue une composante de la reproduction de tout groupe humain ; le capitalisme — forme particulière de l'activité économique — est capable d'impulser une logique de reproduction élargie ayant sa propre dynamique. 

Le capitalisme est devenu prédominant dans les activités économiques des sociétés humaines contemporaines ; mais il ne s'est pas substitué à l'ensemble des autres types d'activité économique. Il tend à renforcer la dimension mondiale des stratégies, des décisions, des activités et des flux : mais c'est toujours au niveau de ses solidarités, de ses horizons quotidiens (ville ou village, région, ensemble national) que l'individu, la famille saisit les conditions de sa vie et de son devenir. 

Reproduction du capitalisme s'effectuant de plus en plus à l'échelle mondiale (très largement sur la base des capitalismes nationaux constitués) ; reproduction des groupes sociaux enracinés dans le local et le national (puisque le cadre de l'État-nation a constitué depuis quelques siècles un espace de cohérence privilégié) : nous sommes là au cœur de l'« économie mondiale » contemporaine, de sa dynamique et de ses distorsions, de ses contradictions et de sa crise. 

Sans réécrire, à ce point, un livre sur le « système national/mondial hiérarchisé », résumons les principales thèses qui fondent notre démarche [23]. 

1.  L'humanité, la population humaine de la terre n'est pas une collection d'individus isolés. Elle est (a toujours été, sera) structurée en groupes (familiaux notamment), en sociétés constituées (c'est-à-dire ayant une cohérence locale, régionale, nationale...). 

Ces groupes, ces sociétés se reproduisent, et, à travers eux, l'humanité (même si certains groupes, certaines sociétés peuvent, à un moment où un autre, cesser de le faire). Cette reproduction est un processus très complexe qui concerne de très nombreux domaines à la fois liés et distincts : idées, valeurs, sexualité, affectivité, démographie, lois, institutions, pouvoir, utilisation et transformation des ressources pour répondre aux besoins individuels et sociaux (alimentation, logement, santé, culture, etc.), protection, défense... 

Nous appellerons formations sociales les groupes et sociétés structurées de manière à assurer d'une façon relativement autonome leur propre reproduction. 

Famille large, clan, ethnie, communauté villageoise, ensemble domanial, ensembles complexes structurés autour de pouvoirs religieux et militaires, de systèmes d'irrigation, de villes marchandes, communautés nationales avec la réalité contemporaine de l'État-nation ont constitué et constituent des formations sociales : c'est-à-dire ont assuré ou assurent d'une manière relativement autonome leur propre reproduction. 

2.  Dans cette reproduction, ce qui nous paraît aujourd'hui appartenir au champ de l'économie a toujours eu sa place ; mais cette place n'a pas toujours été distincte. C'est avec la généralisation des activités marchandes, avec surtout la formation et le renforcement du capitalisme, qu'a été distinguée, dans le processus global de la reproduction, la composante économique.

Car l'économique ne joue pas son rôle dans la reproduction des formations sociales selon une seule logique, mais à travers diverses logiques sociales structurantes (domestique, tributaire, marchande simple, capitaliste, étatiste) qui permettent de définir autant de « systèmes économiques et sociaux » — outils conceptuels permettant l'analyse des formations sociales (réalités historiques). 

Parmi ces systèmes économiques et sociaux, l'un d'eux, le capitaliste, est porteur d'une logique d'autoreproduction et de reproduction élargie spécifique : il « pèse » sur le fonctionnement de tous les autres, d'autant plus qu'il est le seul, du fait de sa dynamique spécifique, à se déployer à l'échelle du monde. 

3.  Entre le « local » et le « mondial », les États-nations ont été, au cours des derniers siècles, des lieux de plus en plus importants d'organisation de la reproduction sociale : d'où l'importance de l'étude des formations sociales nationales, des « économies nationales », des États nationaux... D'ailleurs, au cours des quatre derniers siècles, la logique capitaliste a trouvé dans le cadre de certains États-nations un espace favorable d'implantation et d'affirmation ; elle est devenue prédominante dans plusieurs économies nationales, que l'on peut donc nommer « économies nationales capitalistes » ; mais aussi, le cadre national a constitué un espace privilégié, soit pour se protéger contre les pressions du capitalisme mondial, soit pour le contrebattre ou tenter de construire un système économique alternatif. D'où l'indéniable importance du national. 

4.  La logique capitaliste, porteuse d'une nécessité de reproduction élargie, ne peut rester enfermée dans les frontières d'un État-nation : à travers les relations internationales et les dynamiques multinationales, elle a contribué à la création d'espaces nationaux/mondiaux et à une mondialisation de l'économie (et, avec elle, de tous les facteurs qu'elle implique : idéologiques, culturels, institutionnels...) ; et chaque activité économique — quels que soient le système économique qui la caractérise et son niveau d'insertion (local, régional,. national) dans la reproduction d'une formation sociale — est de plus en plus influencée par ce capitalisme, dont les activités se déploient à l'échelle mondiale. 

5.  Ce point crucial doit être souligné : chaque formation sociale a sa logique de reproduction (ce qui ne signifie pas que cette logique soit simple ou unidimensionnelle : l'économie en est une composante et le capitalisme peut y jouer un rôle majeur) ; et le capitalisme, de son côté, a une logique de reproduction, qui lui est propre, et qui ignore largement et dépasse les logiques de reproduction de chaque formation sociale. Cela constitue un facteur essentiel du système national/mondial hiérarchisé, de ses inégalités, de ses distorsions et de ses crises. 

6.  Ainsi, ce qu'on appelle économie mondiale est l'ensemble des activités économiques de la planète, en large partie coordonné et structuré aux niveaux local et national et plus ou moins unifié et structuré par la dynamique du capitalisme aux échelles nationale et mondiale ; l'économie mondiale n'est donc pas une « totalité », en ce sens qu'elle n'a pas une cohérence d'autoreproduction propre ; elle se situe à la confluence de deux logiques de reproduction : celle de l'humanité en ses multiples groupes humains et celle du capitalisme (elle-même, une et multiple). 

7.  Dans ce mouvement, l'ensemble des activités économiques interfèrent d'une manière de plus en plus déséquilibrante avec la reproduction globale du vivant terrestre ; les activités économiques modernes menacent globalement les équilibres vitaux de la planète. 

8.  Ainsi, le vivant terrestre, une formation sociale et le capitalisme ont chacun « sa » logique de reproduction — chacune interférant avec les autres ; inversement les « économies nationales », l'« économie mondiale » sont à la confluence de plusieurs logiques de reproduction : il faut les étudier en les situant par rapport à ces logiques ; la grille d'analyse du système national/mondial hiérarchisé — SNMH — peut aider à le faire d'une manière rigoureuse. 

9.  Ce système est national et mondial ; en effet, si la logique capitaliste est au cœur du processus de constitution/renforcement/transformation d'un système économique mondial, elle n'a pas, dans l'histoire, joué directement au niveau mondial : elle a d'abord joué aux niveaux local, régional et national ; ce niveau national a même constitué, depuis le XIVe siècle, avec l'État-nation, un niveau privilégié de reproduction sociale. 

10. Développement capitaliste et renforcement de l'État-nation ont concouru à la formation d'économies nationales capitalistes ; celles-ci, du fait de la logique de reproduction élargie du capitalisme, ont très tôt, et de plus en plus, « débordé » de leurs territoires nationaux ; et c'est à la fois à travers les « relations économiques, monétaires et financières internationales » et la constitution d'espaces multinationaux de firmes et de banques que chaque économie capitaliste dominante constitue « son » espace économique mondial, espace économique que nous qualifierons de national/mondial. 

11. L'espace national/mondial de la puissance hégémonique (quand une seule prédomine, ce qui est exceptionnel), ou l'articulation (sur la base d'alliances et de conflits) entre les espaces nationaux/mondiaux des puissances dominantes constituent en chaque période la structure d'un système national/international/multinational/mondial, porteur d'unité et de diversité, de cohérence et de discordances. Ce système est hiérarchisé : en effet, en son sein, les conditions de reproduction des différentes formations sociales nationales sont disparates et inégales : 

les économies nationales dominantes se déploient hors du territoire national d'origine et impulsent une dynamique structurante dans l'espace mondial où elles prédominent ;
 
les économies nationales dominées subissent ces dynamiques et ne concourent que partiellement à la reproduction de « leurs » formations sociales ;
 
les économies nationales intermédiaires participent des deux catégories et correspondent à une gamme très variée de situations.

 

12. La dynamique du SNMH n'est pas monolithique ; elle est multiple, diversifiée et souvent éclatée et contradictoire. 

En effet, le fait que la logique capitaliste prédomine à la fois dans de nombreuses formations sociales et à l'échelle mondiale ne signifie pas, loin de là, que les autres logiques économiques aient disparu ; inversement, le fait que d'autres logiques économiques et sociales fonctionnent de par le monde ne signifie pas qu'elles fonctionnent d'une manière autonome : elles sont sous l'influence du capitalisme. 

D'autre part, l'existence d'un système économique mondial n'implique pas, tant s'en faut, que toute situation locale ou nationale est strictement déterminée par lui. Ainsi, les États-nations — dont le nombre s'est fortement accru avec le récent processus de décolonisation — peuvent aussi bien constituer des lieux privilégiés de recherche d'indépendance ou d'autonomie nationale, que contribuer à l'intégration dans le système mondial. 

13. Ainsi, l'économie mondiale est locale/régionale/nationale/inter-nationale/multinationale ; elle est capitaliste, mais aussi étatiste/marchande/tributaire/communautaire et domestique. 

C'est dire que les nœuds de contradictions sont multiples et que, même dans les situations de plus extrême dépendance, des marges de manœuvre existent. C'est dire aussi que chaque fait, chaque situation (aux niveaux local, régional, national, international, multinational), doit, pour être compris, être analysé dans son contexte mondial. C'est dire enfin que, face à cette dynamique multiforme, que l'on veuille en atténuer l’emprise, s'en affranchir ou en combattre le cours, il n'y a pas de démarche simple : il convient de concevoir des stratégies diversifiées et de les mettre en œuvre en combinant les différents niveaux d'action. 

Ainsi, l'analyse de l'« économie mondiale » passe par : 

— la prise en compte de la dimension économique de la reproduction des formations sociales : dimension dominée par la dynamique capitaliste ; — la prise en compte du rôle dominant qu'a pris la logique capitaliste dans les derniers siècles, avec l'implication forte de reproduction élargie qu'elle porte en elle-même ;
 
— enfin, puisque c'est sur la base des États-nations modernes que s'est affirmé le capitalisme, la prise en compte des économies nationales capitalistes prédominantes. 

C'est donc très largement l'étude des économies capitalistes nationales dominantes et de leurs dynamiques qui permet de comprendre la formation et le fonctionnement d'un système capitaliste mondial, système que nous avons qualifié de « national/mondial » et de « hiérarchisé » et qui, selon nous, structure ce que l'on nomme « économie mondiale ». 

Dans ce livre, on cherchera à dégager les structures de l'économie mondiale dans les années 1980 ; un autre livre serait, sur les bases ainsi dégagées, à consacrer aux transformations de l'économie mondiale dans la grande mutation du dernier tiers de ce siècle. 

La première partie analysera les polarisations structurantes de l'économie mondiale telles qu'elles se sont constituées à travers les échanges commerciaux (chap. 1), les firmes multinationales (chap. 2), les spécialisations nationales (chap. 3) et les relations monétaires et financières (chap. 4). 

La seconde partie resituera dans l'économie mondiale ces composantes à la fois essentielles et irréductibles que sont les économies nationales : capitalistes dominantes (chap. 5), étatistes (chap. 6), intermédiaires et dominées (chap. 7), pour dégager les caractères principaux des relations qui s'établissent entre elles et de l'ensemble hiérarchisé, contradictoire, conflictuel qu'elles constituent : l'économie mondiale (chap. 8). 

Lectures suggérées pour prolonger ou compléter cette introduction. 

BEAUD Michel, Histoire du capitalisme (de 1500 à nos jours Seuil, Paris,       1981, nouvelle éd. 1987.

BEAUD Michel, Le système national/mondial hiérarchisé (une nouvelle lecture du capitalisme mondial), La Découverte, Paris, 1987.

L'état du monde, La Découverte, Paris, annuel depuis 1981 ; dernière livraison : 1988-1989.


*   Les références entre crochets renvoient à la bibliographie générale, en fin d'ouvrage.

[1]   INED, Population et sociétés, septembre 1987, p. 2.

[2]   Plus précisément : – selon une évaluation « Banque mondiale » : 14 487 milliards de dollars ; – selon une évaluation « CEPII » : 14 680 milliards de dollars (INED, op. cit., p. 5).

[3]   La population mondiale était de 4,8 milliards en 1985 [Banque mondiale, 1987, p. 232-233].

[4]   Les chiffres présentés sont tirés de L'état du monde 1988-1989, La Découverte, 1988, p. 589 et s.

[5]   TEP : tonnes d'équivalent-pétrole.

[6]   Voir page suivante.

[7]   Exactement 1 922 milliards de dollars, selon les chiffres du GATT [GATT, 1986, p. 156].

[8]   Voir infra, chapitre 4.

[9]   Frédéric F. CLAIRMONTE et John CAVANAGH, « Le club des deux cents, ou les vertus de la concentration », Le Monde diplomatique, décembre 1985.

[10] « Bilan économique et social 1987 » du Monde, janvier 1988, p. 39.

[11] [MICHALET, 1976, nouv. éd. 1985], p. 283, 286 et 287.

[12] Ibid., p. 287.

[13] LÉNINE, L'impérialisme, stade suprême du capitalisme, 1917. Trad. fr., Éd. du Progrès, Moscou, 1969, p. 114.

[14] Samir AMIN, L'échange inégal et la loi de la valeur, la fin d'un débat, Anthropos-IDEP, Paris-Dakar, 1973, p. 7.

[15] Samir AMIN, L'accumulation à l'échelle mondiale, IFAN-Anthropos, Dakar-Paris, 1970, p. 30.

[16] André GUNDER FRANK, Le développement du sous-développement, l’Amérique latine, Maspero, Paris, 1970, p. 8.

[17] Immanuel WALLERSTEIN. « Les États dans le vortex institutionnel de l'économie-monde capitaliste », Revue internationale de sciences sociales, vol. XXXII (1980), n° 4, p. 799.

[18] Vivien LÉVY-GARDOUA, Gérard MAAREK, La dette, le boom, la crise, Atlas/Economica, 1985, p. 257.

[19] World Commission on Environment and Development, Our Common Future, Oxford University Press, Oxford, 1987, p. 2 et s. Voir aussi les travaux du Groupe de Vézelay sur les « risques technologiques majeurs », 1987.

[20] Lester R. BROWN, State of the World, Norton, Londres et New York, 1987.

[21] Cité in Lester R. BROWN, op. cit., p. 17.

[22] Des Discours sur le libre-échange et du Manifeste communiste de 1848 aux Grundrisse de 1857-1858, et des Matériaux pour l'économie de 1861-1865 aux matériaux pour les livres II et III du Capital de 1869-1879. Cf. notamment les Œuvres de Karl MARX, éditées par Maximilien Rubel, Économie, 2 vol., « La Pléiade », Gallimard, 1963 et 1968.

[23] Celle-ci doit beaucoup à la fois aux analyses historiques du capitalisme, notamment de Fernand BRAUDEL (Écrits sur l'histoire, Flammarion, Paris, 1969 ; et surtout Civilisation matérielle, économie et capitalisme, 3 vol., A. Colin, Paris, 1979) ; aux réflexions contemporaines sur la prise en compte de la complexité et de la reproduction pour l'étude de l'économique et du social, notamment Edgar MORIN, La méthode, Seuil, Paris, trois volumes parus : t. I, La nature de la nature, 1977, nouvelle éd. 1981 ; t. II, La vie de la vie, 1980, nouvelle éd. 1985 ; t. III, La connaissance de la connaissance, livre I, Anthropologie de la connaissance, 1986, ainsi que Science avec conscience, Fayard, Paris, 1982 ; mais aussi Yves BAREL, La reproduction sociale (Systèmes vivants, invariance et changement), Anthropos, Paris 1973, et Le paradoxe et le système (Essai sur le fantastique social), PUG, Grenoble, 1979 ; et bien sûr à la pensée fondatrice de Marx, pionnier méconnu (malgré son écrasante notoriété) de la « lecture du capitalisme » dans la réalité économique et sociale du XIXe siècle.


Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 27 décembre 2007 16:22
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur de sociologie au Cégep de Chicoutimi.
 



Saguenay - Lac-Saint-Jean, Québec
La vie des Classiques des sciences sociales
dans Facebook.
Membre Crossref