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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Syndicalisme et pouvoir à l'université. (1974)
Introduction


Une édition électronique réalisée à partir du livre du Syndicat des professeur de l'UQÀM, Syndicalisme et pouvoir à l'université. Montréal: La Librairie progressiste, 1974, 128 pp. Une édition numérique réalisée par Réjeanne Toussaint, bénévole, Chomedey, Ville Laval, Québec.

[7]

Syndicalisme et pouvoir à l’université

Introduction

par Jean LAPOINTE


Quand finalement, le 18 décembre 1968, la loi de l'Université du Québec (Loi 88) est sanctionnée par le Gouverneur Général, c'est avec énormément d'enthousiasme qu'à Montréal, les personnes pressenties pour constituer le premier noyau de professeurs de cette nouvelle université, se mettent à la tâche dans leurs établissements respectifs (Collège Sainte-Marie, Ecole Normale Ville-Marie, Ecole Normale Jacques-Cartier, Ecole des Beaux-Arts et Ecole Normale d'Enseignement Technique) pour préparer l'entrée des premiers étudiants prévue pour septembre 1969. C'est que beaucoup d'entre eux attendaient déjà depuis longtemps un tel événement dont la nécessité et l'importance se faisaient de plus en plus sentir.

De leur côté, les Jésuites (des Collèges Sainte-Marie et Loyola) songeaient déjà depuis un certain nombre d'années à fonder une nouvelle université. D'autre part, l'Association des Professeurs Laïcs des Ecoles Normales réclamait aussi depuis quelque temps la mise sur pied d'une seconde université de langue française à Montréal en vue plus particulièrement de favoriser et d'accélérer la formation des maîtres à laquelle il était difficile d'associer l'Université de Montréal. [1] D'ailleurs, dès 1963, la Corporation des Instituteurs Catholiques (CIC), devenue depuis la Centrale de l'Enseignement du Québec (CEQ), avait dénoncé l'existence de telles difficultés et c'était pour y remédier qu'elle avait recommandé la création d'une université d'état. La Commission Parent elle-même avait déjà constaté que les universités existantes ne pourraient plus, à plus ou moins brève échéance, recevoir tous les étudiants admissibles à des études supérieures et que par contre les diverses institutions delà société québécoise, en pleine ébullition, avaient un urgent besoin de diplômés dans différents domaines d'activités, y compris l'enseignement. C'est pourquoi elle recommanda la création de centres universitaires.

[8]

Mais tandis que les premiers, les Jésuites, voulaient une université catholique privée, les autres, pour la plupart, réclamaient une université d'état laïque. Au même moment le Mouvement Laïc de Langue Française revendiquait un secteur d'enseignement laïc et neutre à tous les niveaux d'enseignement et l'historien Brunet dénonçait publiquement la discrimination exercée à l'endroit des universités francophones de la province au niveau du financement, tant public que privé. (Ce sont principalement ces révélations qui furent à l'origine de l'Opération McGill Français dont l'apogée consista en une manifestation de plus de 15,000 personnes dans les rues de Montréal.)

Les conditions étaient donc favorables à la création d'une nouvelle université, mais le Gouvernement d'Union Nationale tardait à y donner suite.

Finalement, les mouvements d'occupation des Collèges d'Enseignement Général et Professionnel (C.E.G.E.P.), de création récente, et des Ecoles Normales par les étudiants en octobre 1968 (événements que certains considèrent comme étant en partie l'écho au Québec des événements de mai 1968 en France) pressèrent le Gouvernement Bertrand à prendre une décision concernant l'enseignement supérieur. Les étudiants en effet, regroupés au sein de l'Union Générale des Etudiants du Québec (UGEQ), avaient réclamé la gratuité de l'enseignement à tous les niveaux, un accroissement de l'aide financière requise pour poursuivre des études et la création d'une seconde université de langue française à Montréal.

Un travail de préparation de la nouvelle université ayant déjà été amorcé depuis 1965 par le Comité Rocher et poursuivi par le Comité Recherche et Développement, le Gouvernement put ainsi déposer son projet de loi créant l'Université du Québec peu après la fin des manifestations étudiantes.

L'enthousiasme des débuts de l'Université du Québec était d'autant plus grand que les structures qui lui étaient données par le Document [2] apparaissaient aux yeux de plusieurs comme très prometteuses à l'enseignement universitaire et à la recherche. Le regroupement des professeurs en départements jouissant d'une très grande marge d'autonomie, la possibilité pour des professeurs de différents départements, les étudiants et des gens œuvrant dans le milieu de définir conjointement les programmes d'études dans les modules semblaient en effet garantir une liberté d'action dans le domaine de la recherche et l'élaboration de programmes d'étude qui répondent aux besoins des milieux concernés et des étudiants.

Très vite cependant et c'est Georges Lapassade, l'invité du Recteur  [9] Dorais qui dit l'avoir observé au cours de la session d'hiver 1970, l'Université s'est mise à fonctionner comme une firme, comme une usine du savoir.

"Ce système implique :

  • d'un côté, la PRODUCTION (les départements, réglés par la Gestion départementale, produisent les cours) ;

  • de l'autre, le service des VENTES, incluant le rapport avec le client-étudiant ;

  • et, reliant les deux, le MARKETING." [3]

De plus, les événements qui suivirent, tout autant à l'extérieur qu'à l'intérieur de l'Université, dont le retour au pouvoir du parti libéral en avril 1970 et les événements d'octobre 1970 ne sont pas les moindres, eurent pour résultat de changer le cours des choses à l'Université du Québec. Le Conseil d'Administration de l'UQAM eut beau affirmer sans ambages en janvier 1971, son intention de faire de cette université "une université permanente et populaire, ouverte au milieu, moderne et prospective, critique et créatrice ainsi qu'assurée d'une vocation entière, inter-disciplinaire, participante et souple dans ses structures" [4], déjà en août 1970 l'Assemblée des Gouverneurs avait approuvé les Documents 2 [5] et en décembre 1970 le Conseil des Etudes de l'Université du Québec avait présenté son projet de règlements généraux.

Ce n'est pas que ces documents modifient en profondeur le cadre général d'organisation de l'enseignement et de la recherche dans les diverses constituantes de l'Université du Québec, mais ils laissent entrevoir des changements sérieux dans les règles du jeu qui avaient prévalu jusqu'alors.

Sans aller dans les détails, il faut quand même dire que les Règlements Généraux (devenus dans la pratique le Règlement 19) trahissent l'intention de la part de Québec de s'assurer un plus grand contrôle de la situation. L'un des nouveaux ministres libéraux du Québec avait d'ailleurs déclaré que les universités devaient être gérées comme des entreprises [6]. Et alors, les Gouverneurs, forts de l'appui de nouveau Gouvernement ou plutôt, suivant ses directives, ont pu se permettre d'écrire :

"Il est devenu urgent que, localement, les Commissions des Etudes et les Conseils d'Administration sachent quelle est l'étendue réelle de leurs mandats et puissent en outre exercer validement les responsabilités qui leur ont attribuées par les [10] Règlements Généraux de l'Université du Québec.

... il faut souligner que les Commissions des Etudes locales ne peuvent statuer et réglementer sur quelque matière que ce soit couverte par l'article 19 de la loi, à moins qu'elles n'y soient expressément autorisées par les Règlements Généraux de l'Assemblée des Gouverneurs." [7]

Qu'on se le tienne pour dit !

La déception est grande chez la plupart des professeurs de l'UQAM. Un grand nombre d'entre eux s'accommodèrent de la situation en se disant qu'après tout ce n'était pas pire ailleurs. D'autres toutefois "décrochèrent" tout en continuant à faire convenablement leur travail, et il y en a encore qui en sont toujours là. Mais heureusement qu'un certain nombre d'entre eux, ayant senti ce vent tourner, ont réussi à convaincre leurs collègues de se regrouper en un véritable syndicat et de s'associer à une centrale syndicale, soit la CSN. Louis Gill, dans le chapitre consacré aux premières années du Syndicat des Professeurs de l'Université du Québec à Montréal raconte en détail la naissance du SPUQ ainsi que les premières luttes qu'il a dû mener dès le début pour défendre la démocratie à l'UQAM.

Par contre, malgré les quelques gains réalisés par les professeurs à l'occasion des deux périodes de négociations qui suivirent la naissance du SPUQ, nos administrateurs ne se sentirent pas battus pour autant et le plus grand coup qu'ils portèrent fut sans contredit l'adoption en 1975 des politiques générales et opérationnelles du nouveau Président de l'Université du Québec : Robert Després, anciennement du Ministère des Affaires Sociales.

Jean-Pierre Cheneval raconte plus loin pourquoi et après quels événements les professeurs Gagnon (Rimouski), Senay (Trois-Rivières) et Fortin (Chicoutimi) ainsi que l'étudiant Chabot (Trois-Rivières) en vinrent à démissionner de l'Assemblée des Gouverneurs. Qu'il nous suffise de rappeler pour le moment que le Président Després et ses acolytes, dont le Recteur actuel de l'UQAM, Maurice Brossard, ont par la suite apporté quelques changements d'ordre mineur aux textes qu'ils avaient approuvés mais qu'ils n'ont pas retiré l'ensemble du projet.

Au contraire, au moins par trois fois depuis, nos administrateurs ont tenté de faire passer par la bande des éléments de la Réforme Després. Voici, par ordre chronologique, les documents sur lesquels un avis a été demandé directement aux professeurs dans l'espoir, probablement, qu'un certain nombre d'entre eux en acceptent le contenu sans se rendre compte des répercussions possibles de leurs gestes :

1- Objectifs et Politiques de la Recherche à l'UQAM, Bureau du [11] Doyen des Etudes avancées et de la Recherche, UQAM, le 22 septembre 1975.

2. Régime des Études du premier cycle, Vice-présidence à l'Enseignement, UdQ, Québec, octobre 1975.

3. Guide de préparation des plans de développement des universités constituantes, écoles supérieures, instituts de recherche et autres unités constituantes de l'UdQ. Approuvé par la Commission de planification le 3 juillet 1975 et l'Assemblée des Gouverneurs le 27 août 1975.

Inutile d'ajouter qu'il nous faut être vigilants.

Ce qu'il faut en effet réaliser dans cette affaire (Dorval Brunelle nous l'explique dans l'étude qu'il a consacrée aux griefs et aux relations de travail à l'UQAM) c'est l'intention bien ferme de la part de nos administrateurs de faire des professeurs d'universités de simples "travailleurs manuels". Si nous n'y prenons pas garde, nous risquons en effet d'être réduits à exécuter de façon répétitive les tâches qui nous auront été attribuées par les détenteurs du pouvoir qui eux se seront approprié le véritable travail intellectuel de conception et d'élaboration des fins à poursuivre et des moyens pour les atteindre.

Dans l'esprit de nos gouvernants et de nos administrateurs, l'Université du Québec a toujours une vocation particulière mais le sens de cette vocation a changé par rapport à ce qu'il était en 1968. Aujourd'hui, l'Université du Québec est destinée à devenir le modèle par excellence de l'Université fonctionnelle. Et c'est à ce modèle que les autres universités du Québec devront, à plus ou moins brève échéance, se conformer si elles veulent survivre.

Les professeurs, les étudiants et les employés des diverses constituantes de l'Université du Québec se doivent de s'opposer à un tel projet, aune telle entreprise qui concrètement passera dans les faits avec la réforme budgétaire, plus précisément la rationalisation des choix budgétaires mise peu à peu en place par le ministère de l'Education. Jacques Bourgault nous en démontre le mécanisme dans son article sur la R.C.B.

Cet objectif, tel qu'il est actuellement poursuivi, trahit une conception du savoir considéré comme un "input" de production plutôt que comme un droit accessible à tous et, s'il est atteint, entraînera nécessairement la "taylorisation" c'est-à-dire l'émiettement ou la parcellarisation du travail dans les universités, impliquera que seuls les savoirs fonctionnels c'est-à-dire utiles seront considérés comme importants et donc seront retenus, intensifiera la sélection sociale, et par conséquent les inégalités face à l'école, par un contingentement inévitable des admissions, évincera les payeurs de taxes qui financent les universités du contrôle de ces universités, suscitera le renforcement de l'université de type corporatiste et accroîtra la séparation entre l'enseignement et la recherche, ce qui ne pourra que diminuer la qualité de l'enseignement. Bien plus, une [12] telle réforme budgétaire consiste fondamentalement en l'utilisation de techniques modernes de gestion pour justifier des mesures politiques préétablies.

Comme le dit Théodore Roszak :

"La technocratie a la propriété de se rendre idéologiquement invisible. Ses valeurs et ses théories sur la réalité deviennent aussi insidieusement envahissantes que l'air que nous respirons. Alors qu'un débat politique quotidien se poursuit entre et à l'intérieur des sociétés capitalistes et collectivistes du monde entier, la technocratie accroît et consolide son pouvoir dans les unes et les autres en tant que phénomène para ou super-politique, suivant les diktats de l'efficacité, de la rationalité et de la nécessité industrielles." [8]

Il apparaît donc clairement que l'enjeu que le présent dossier expose ne concerne pas uniquement la Réforme Després. Pour qui suit un tant soit peu l'actualité, ces textes ne révéleront pas grand'chose de neuf. Il aura sûrement constaté que les recommandations de la Commission Nadeau sur la réorganisation des CEGEP [9] trahissent aussi également une intention consciente et délibérée de la part de nos "élites" au Québec, et en particulier de la part du Ministère de l'Education, de donner à l'école une orientation exclusivement fonctionnelle fondée principalement sinon uniquement sur la rentabilité économique. Il ne faut pas se fier aux textes et aux discours officiels : ils ne font que jeter de la poudre aux yeux. [10]

L'enjeu véritable est donc de nature éminemment politique. La question qui se pose est la suivante : Allons-nous continuer à "technocratiser" à ce point une société déjà soumise au capital ?

Déjà plusieurs individus et plusieurs organismes ont commencé à agir pour que la société réponde davantage et mieux à des besoins humains, sociaux et culturels que la seule recherche du profit et la croissance économique à tout prix ignorent d'une façon souvent même scandaleuse. Mais pour ce qui est de la lutte contre la technocratie, on ne peut pas dire qu'elle soit vraiment engagée.

"Par technocratie" écrit Théodore Roszak

"j'entends le système social où une société industrielle atteint le sommet de son intégration "organisationnelle", ou encore l'idéal auquel songent d'ordinaire les hommes lorsqu'ils parlent de modernisation, de rationalisation, de planification.

[13]

Se réclamant d'impératifs aussi indiscutés que la nécessité d'efficacité, de sécurité sociale, de coordination des hommes et des ressources, d'une prospérité toujours accrue, la technocratie s'emploie à pallier les faiblesses et les erreurs de la société industrielle.

La systématisation méticuleuse qu'Adam Smith célébrait jadis dans sa fabrique d'épingles bien connue, s'étend à présent à tous les domaines de la vie, nous proposant une organisation humaine correspondant à notre organisation mécanique.

Nous en arrivons ainsi à l'ère de la technocratie sociale, où il s'agit d'orchestrer tout le contexte humain qui entoure le complexe industriel. La politique, l'enseignement, les loisirs, les divertissements, la culture dans son ensemble, les pulsions inconscientes et, la contestation même de la technocratie, tout cela devient objet d'une étude et d'une manipulation purement techniques.

... Comme le disait Jacques Ellul dans La Société Technocratique, la technique doit réduire l'homme à l'état d'animal technique, faire de lui le roi des esclaves de la technique, détruire son autonomie humaine.
... Qu'il nous suffise de définir la technocratie comme une société où ceux qui gouvernent se justifient en en appelant à des experts techniques qui, à leur tour, se justifient en en appelant à la connaissance scientifique. Au-delà de l'autorité de la science, il n'y a plus d'appel possible." [11]

Si nous nous voulons vraiment démocrates, c'est-à-dire si nous sommes vraiment convaincus de la valeur que représente un accroissement de l'autonomie de l'individu et de la nécessité de lutter pour l'augmenter étant donné qu'elle ne peut s'acquérir que par la participation responsable à l'autorité et par l'acquisition du savoir que celle-ci requiert, [12] ne devons-nous pas sans cesse nous battre pour la défendre contre la contrainte, la violence, la soumission inconditionnelle aux autorités et aux pouvoirs de toutes sortes ?

Il est bien sûr que ni nous, ni les générations qui nous suivent, ne connaîtront une démocratie définitive, idéale, mais est-ce que nous ne pouvons et ne devons pas lutter pour y parvenir ?

Enfin, au cas où certains seraient portés à douter du bien-fondé de cette lutte que nous menons face à nos administrateurs, nous avons pensé reproduire en partie un rapport d'un comité de la Conférence des Recteurs et principaux des Universités du Québec (CREPUQ). (Voir [14] annexe) [13]

À la lecture de ce rapport, qui devait rester confidentiel, on constate que lorsque les valets de nos patrons se croient couverts par le huis-clos, ils parlent à coeur ouvert. Leur objectif est clairement établi : c'est la recherche du pouvoir ; ils veulent manifestement le pouvoir de mener leur entreprise comme des patrons ordinaires.

Enseignement, recherche, ne sont que des mots vides de sens, des concepts abstraits qu'ils n'utilisent que lorsqu'ils peuvent les quantifier en nombre d'heures de présence effective dans les salles de cours, les bibliothèques ou les laboratoires. Et la participation doit être exclue puisqu'elle appelle un partage à l'autorité :

"Les universités devront donc rester conformes au modèle industriel classique et éviter dans ces circonstances d'incorporer à la convention collective des mécanismes de partage d'autorité qu'appelle la participation."

Les textes qui suivent présentent notre lecture de la situation actuelle. Notre intention n'était pas pour le moment de présenter un projet d'université. Cependant, notre position est claire et nous ne nous en cachons pas : nous voulons garder le pouvoir de décision sur toutes les questions qui sont de notre domaine de compétence, c'est-à-dire l'enseignement, la recherche et les conditions dans lesquelles nous exerçons cette compétence. Il ne peut exister de "droits de gérance" dans ces domaines-là.

"Garantir aux intéressés leurs droits dans la gestion même de l'entreprise à laquelle ils sont associés et leur participation à la définition des politiques d'éducation (est nécessaire) pour assurer le plein exercice des droits démocratiques, en matière d'éducation." [14]

Or comme on veut nous priver de ces droits, nous croyons de notre devoir et de notre responsabilité de les conserver et de les défendre, notamment lors de nos prochaines négociations collectives. Et comme, en cette matière, les étudiants ont aussi des droits que nous ne leur contestons pas, nous comptons bien continuer à nous associer à eux dans les modules pour définir des programmes d'études qui répondent à leurs besoins et aux besoins du milieu.

[15]

LES CONFIDENCES
DE LA CREPUQ


AIDE-MÉMOIRE de la quatrième réunion du groupe de travail des responsables des services du personnel enseignant, tenue à Bishop's University, les 29, 30 et 31 juillet 1974.

Étaient présents :

BARCELO, Juliette, (Université de Montréal) ; CHAMPAGNE, Jean-Paul, (Université de Sherbrooke) ; GERVAIS, Robert, (Université de Montréal) ; GREGOIRE, Jean-Luc, (Bishop's University) ; LAFLEUR, Serge, (Université du Québec) ; MAGNAN, Claude, (Université du Québec) ; MATTEAU, André, (Université du Québec) ; McDOUGAL, David, (Sir George Williams University) ; PLANTE, Gilles, (Université Laval) ; THIBAULT, Claude, (Bishop's University) ; HURTUBISE. René, (Conférence des recteurs) ; PROVOST, Yves. (Conférence des recteurs).

N.B. : Ce document est confidentiel et ne doit pas circuler.

ORDRE DU JOUR SUIVI

1. Mise au point sur la confidentialité des documents de notre groupe de travail.

2. Discussion des trois sujets suivants :

—La charge de travail
—L'évaluation
—L'embauche

3. Étude du document : "Recommandation relative à la création d'une nouvelle catégorie de personnel enseignant : les "chargés de formation".

4. Étude article par article du document : "Projet de la convention collective entre le Syndicat des professeurs de l'Université de Sherbrooke et l'Université de Sherbrooke".

5. Discussion relative au modèle à suivre dans la rédaction d'une contre-proposition au projet ci-dessus étudié.

6. Discussion sur la méthode de travail à suivre au sujet de la rédaction d'un rapport au Comité des vice-recteurs aux affaires académiques.

1. Il est décidé afin de protéger la confidentialité des discussions de notre groupe de travail que tous les documents remis aux membres du groupe de travail devront porter la mention "Confidentiel". De plus, on devra éviter d'en faire tirer des copies.

2. Les sujets suivants font l'objet d'étude, de discussion et d'échange de points de vue : la définition de la charge de travail, les questions relatives à l'embauche et à l'évaluation.

A. La définition de la charge de travail

(Après avoir discuté de la charge de travail dans différentes universités québécoises, les responsables des services du personnel enseignant aborde la question [16] à l'Université Laval.) À l'Université Laval, la charge de travail est subordonnée à la politique de l'effectif. Les postes des professeurs et leur charge sont distribués selon la méthode de la liste normée. Voir le document "Liste des tâches du personnel enseignant. Université Laval".

La base du système est le nombre d'inscriptions, à partir duquel la charge départementale est quantifiée en ternie d'heures de cours à donner. La charge individuelle sera négociée entre les professeurs de façon à tenir compte des projets personnels et de la charge départementale globale telle que déterminée. Ce système suppose des négociations quasi-permanentes entre les enseignants. En cas de mésentente, le vice-recteur à l'enseignement imposera une charge individuelle à chaque professeur. La charge totale individuelle est déterminée en heures sur une base de trente-cinq (35) heures de disponibilité par semaine. (Ce chiffre n'est pas définitif.) Le système devra tenir compte évidemment des axes de développement de l'Université et des projets de recherches départementaux.

Conclusion : Le projet complexe de l'Université Laval qui comporte les avantages de quantifier le temps consacré à la recherche et de permettre une répartition effective du travail au niveau du département mérite certainement d'être soumis au Comité des vice-recteurs, bien que certaines réserves soient exprimées sur quelques-uns de ses aspects. Il faudra tout de même envisager une position de repli. Monsieur Plante remettra ultérieurement un document descriptif du système préconisé par l'Université Laval.

B. L'embauche

On souligne que la question de l'embauche comporte quatre dimensions : la politique de création des postes, le mécanisme de recrutement du personnel enseignant, le choix des caractéristiques du contrat individuel (sa durée, par exemple), les perspectives de carrière, à savoir la détermination à un profil-type de carrière par des méthodes d'évaluation. Cette dernière dimension doit évidemment tenir compte des effets de la permanence.

En pratique, il importe de définir le rôle de l'Assemblée départementale lors de la sélection des candidats. II y a consensus sur la nécessité de limiter sa responsabilité dans cette opération, de faire en sorte que les professeurs ne possèdent aucun pouvoir décisionnel dans le processus d'embauche, le pouvoir est, en effet, incontestablement l'exercice d'un droit de gérance. Deux solutions sont donc envisagées, que le comité de sélection soit composé majoritairement de représentants de l'administration, qu'il soit paritaire. Dans un cas comme dans l'autre, les pouvoirs de ce comité ne sont que de recommandation. Voir l'article 11 de la Convention Collective de l'I.N.R.S.

C. L'Évaluation

L'évaluation comporte un double objectif : elle vise à l'auto-perfectionnement du professeur, elle est un outil de l'administration, un instrument de gestion permettant de prendre des décisions éclairées concernant le profil de carrière de chacun des enseignants. (Voir là-dessus le texte 74-RPE-3-10.)

La position du groupe de travail au sujet de la composition du comité d'évaluation est de préférer une assemblée paritaire. A l'Université Laval on opterait préférablement pour un corps majoritairement constitué de représentants de l'administration.

[17]

Ce comité ne doit posséder que des pouvoirs de recommandation et ne pourra prendre des décisions exécutoires.

Les critères d'évaluation qui seront les outils de travail de ce comité devront avoir été approuvés par le Conseil d'administration de l'Université concernée.

La recommandation du comité ne doit pas être susceptible d'être arbitrée, au moins dans le cas de non-renouvellement de contrat qui lui serait consécutive. Dans les autres cas, certains croient qu'un arbitrage devrait être permis. Sur cette question, aucun véritable consensus n'a pu être dégagé.

L'évaluation d'un enseignant pourrait éventuellement faire l'objet d'un rapport annuel et quinquennal. Ce dernier rapport serait utilisé à des fins de détermination de profil de carrière.

3. Le document issu du Comité de Statut du Corps professoral de l'Université de Montréal intitulé : "Recommandation relative à la création d'une nouvelle catégorie du personnel enseignant : les chargés de formation" et portant la cote A-27 / d 34 / r70 est soumis au groupe de travail pour étude.

Il ne résulte des discussions aucun accord sur l'opportunité d'une telle recommandation.

4. Le document "Projet de la Convention Collective entre le Syndicat des Professeurs de l'Université de Sherbrooke et l'Université de Sherbrooke" est étudié article par article, à l'exception des articles 22 à 24 lesquels feront l'objet de discussions ultérieures. Les projets de recommandation pour chacun des articles étudiés font l'objet d'une annexe au présent document.

5. Le choix d'un modèle à suivre dans la rédaction d'une contre-proposition au projet syndical fait l'objet d'un échange de vues. On pense en général qu'il est utopique de croire pouvoir sortir d'une relation conflictuelle employeur-employé dans un contexte syndical, même en milieu universitaire. Les universités devront donc rester conformes au modèle industriel classique et éviter dans ces circonstances d'incorporer à la convention collective des mécanismes de partage d'autorité qu'appelle la participation.

Un sous-groupe composé de Messieurs Champagne, Magnan, Plante et Provost se réunira afin de préparer un projet de rapport au Comité des affaires académiques. Ce sous-groupe se rencontrera les 19et 20 août à Québec.

6. Il est décidé que la prochaine rencontre sera consacrée à l'étude d'un projet de rapport au Comité des Vice-recteurs. À cette réunion seront également étudiés les articles ayant des incidences financières, plus particulièrement les clauses 22 à 24 du document "Projet de la convention collective entre le Syndicat des Professeurs de l'Université de Sherbrooke et l'Université de Sherbrooke".


[1] Non à l'Université des Jésuites (livre publié par l'Association des professeurs laïcs).

[2] Documents 1. Cadre général de l'organisation de l'enseignement pour 1969-70. Guide de travail à l'intention des étudiants, professeurs et administrateurs. Université du Québec, 1969.

[3] Lapassade, Georges : L'Arpenteur, Paris, Editions de l'EPI, 1971, p. 41.

[4] UQAM, Détermination des objectifs académiques. Phase 1, 20 janvier 1971.

[5] Documents 2, Cadre général pour l'organisation des études des deuxième et troisième cycles en 1970-71. Guide de travail. Université du Québec, Août 1970.

[6] Lapassade, G., opus cité.

[7] Projets de Règlements Généraux ordonnés à l'article 19 de la loi de l'Université du Québec, Université du Québec, 9 décembre 1970.

[8] Roszak, Théodore : Vers une Contre-culture, Paris, Stock, 1970., p. 21.

[9] Le Collège, Rapport sur l'état et les besoins de l'enseignement collégial. Conseil Supérieur de l'Education, Québec, juillet 1975.

[10] Les Orientations de l'Éducation au Québec. Ministère de l'Éducation 24 octobre 1974.

[11] Roszak. Théodore : Vers une Contre-culture, pp. 20 et 21.

[12] Voir à ce sujet : Le Partage du Savoir, Science, Culture, Vulgarisation de Philippe Roqueplo, Paris. Ed. du Seuil, 1974.

[13] Déjà publié dans SPUQ-Information, 4e année, n° 4 1975, p. 3.

[14] Faute. Herrera. Kaddoura, Lopes, Petrovski, Rahnema, Champion Ward, Apprendre à être. Rapport de la Commission Internationale sur le Développement de l'Education, Paris, UNESCO-FAYARD, 1972. p. 90.



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le jeudi 15 août 2019 10:28
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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