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Collection « Les sciences sociales contemporaines »
Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Jacques ROUILLARD, “Duplessis: le Québec vire à droite”. Un article publié dans l'ouvrage sous la direction d'Alain-G. Gagnon et Michel Sarra-Bournet, Duplessis. Entre la grande noirceur et la société libérale, pp. 183-206. Montréal: Les Éditions Québec/Amérique, 1997, 397 pp. Collection: Débats. Programme d'études sur le Québec de l'Université McGill. [Autorisation accordée par l'auteur le 4 décembre 2006 de diffuser cet article dans Les Classiques des sciences sociales.] Introduction Mon propos consiste à dégager une interprétation d'ensemble de ce qu'on appelle le régime Duplessis en le situant dans l'histoire du Québec depuis le début du XXe siècle. Bien que je ne sois pas un spécialiste de Duplessis, mes lectures et mes recherches m'amènent à vous faire part de ma compréhension de cette période. Celle-ci dépasse bien sûr l'image réductrice de « Grande noirceur » qui reste encore bien ancrée dans la mémoire collective et s'appuie sur l'historiographie récente du Québec, particulièrement de la période qui précède la prise du pouvoir par l'Union nationale [1]. Pour comprendre l'emprise exercée par Duplessis sur la vie politique québécoise, il faut bien saisir les circonstances qui ont provoqué la création de l'Union nationale. Comme on le sait, cette formation politique est issue, en 1935, d'une coalition entre le Parti conservateur provincial que dirigeait alors Duplessis et une aile dissidente du Parti libéral, l'Action libérale nationale, animée par Paul Gouin. Cette nouvelle force politique est née dans le sillage de la crise économique de 1929 qui a provoqué un niveau élevé de mécontentement dans la population et suscité un profond désir de changement politique. En effet, la récession économique ébranle le Parti libéral alors au pouvoir depuis quarante ans et crée un contexte éminemment favorable à l'élection d'une nouvelle formation politique. Plus encore, l'ampleur de la crise provoque, au Québec comme dans plusieurs autres pays occidentaux, des remous sociaux qui portent à une remise en cause plus fondamentale du système économique et politique. C'est l'époque en Occident où les critiques sévères, tant de la gauche que de la droite, fusent envers les institutions libérales, le grand capital et le système parlementaire. Ces critiques trouvent un écho favorable dans la population. Le terrain est alors propice à des changements d'orientation politique plus radicaux, que ce soit vers le socialisme et le communisme ou vers le corporatisme et le fascisme. Le Québec des années 1930 est un terreau fertile pour un renouveau politique à la fois parce que le Parti libéral fait figure de formation politique vermoulue et que le clergé catholique est plus que jamais à l'affût pour élargir son influence sur la sphère politique. Nul besoin d'insister sur l'ascendant croissant que l’Église catholique exerce sur la population francophone depuis le réveil religieux du milieu du XIXe siècle. Un bon indice de son autorité réside dans l'emprise grandissante qu'elle exerce, au détriment de l'État, dans les domaines de l'éducation et des services sociaux. La forte influence de l'Église ne signifie pas cependant qu'elle représente la seule force sociale importante dans la société francophone. À ce propos, les travaux récents sur le Québec d'avant la Deuxième Guerre mondiale jettent un éclairage nouveau sur l'éventail des forces en présence dans la société québécoise. [1] Je pense en particulier aux travaux de : Jean Hamelin et Nicole Gagnon, Histoire du catholicisme québécois, Le XXe siècle, tome 1, 1898-1940, Montréal, Boréal Express, 1984 ; Fernande Roy, Progrès, harmonie, liberté. Le libéralisme des milieux d'affaires francophones à Montréal au tournant du siècle, Montréal, Boréal, 1988 et Histoire des idéologies au Québec aux XIXe et XXe siècles, Montréal, Boréal, 1993 ; Bernard L. Vigod, Quebec before Duplessis : The Political Career of Louis-Alexandre Taschereau, Montréal/Kingston, McGill-Queen's University Press, 1986 ; Patricia Dirks, The Failure of L'Action libérale nationale, Montréal/Kingston, McGill-Queen's University Press, 1991 ; Yvan Lamonde (sous la direction de), Combats libéraux au tournant du XXe siècle, Montréal, Fides, 1995 ; Antonin Dupont, Les relations entre l'Église et l'État sous Louis-Alexandre Taschereau, Montréal, Guérin, 1972 ; Michel Pelletier et Yves Vaillancourt, Les politiques sociales et les travailleurs, cahier II : Les années 30, Montréal, 1975.
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