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Collection « Les sciences sociales contemporaines »
Une édition électronique réalisée à partir de l'article de Marc LE BLANC, Albert Reiss et Guy Tardif, “Techniques modernes de gestion et d'évaluation de la police”. Un article publié dans Police, culture et société. Textes réunis et présentés par Denis Szabo, pp. 159-199. Montréal: Les Presses de l'Université de Montréal, 1974, 235 pp. [Autorisation formelle accordée par l’auteur le 23 mai 2005. Introduction Le but de ce groupe de travail du symposium consistait à étudier les mesures de l'efficacité des forces policières et à analyser les diverses techniques de gestion. Il est évident que le concept de l'efficacité de la police ne peut être défini sur le plan comparatif, voire international. Il est possible cependant de dégager certains objectifs communs des forces policières bien que, là encore, il convienne de faire des réserves en ce qui a trait à la façon selon laquelle s'exercent les activités policières destinées à les atteindre. Parmi ces objectifs, les participants de l'atelier ont retenu celui de la sécurité de la collectivité et celui de l'aide aux citoyens, soit des services spécifiques. a) La sécurité de la collectivité. - La sécurité de la collectivité comprend non seulement la protection de la population contre les dangers de victimisation dus aux agissements des criminels, mais également l'application des règlements relatifs à la circulation. Cela signifie que la collectivité s'attend que la police assume tout aussi bien la responsabilité de l'accroissement du nombre d'accidents sur la voie publique que celle de l'augmentation des vols, du taux de crimes dont les responsables n'ont pas été retrouvés et jugés, ou encore du chiffre noir de la criminalité, soit de tous les délits perpétrés à l'insu des autorités judiciaires et des forces policières. Or, en pratique, la police n'est pas un corps distinct de l'ensemble de la collectivité et elle est soumise, par conséquent, aux diverses contraintes qui s'exercent dans un contexte donné. À cet égard, on peut distinguer entre deux approches : collective et subjective. L'exemple de la sécurité des rues pendant les heures nocturnes est très significatif à cet égard. Dans une grande ville, il. peut paraître préférable à une collectivité de tolérer une sécurité relative dans certains quartiers marginaux, plutôt que d'accroître le nombre de policiers chargés de les patrouiller. Dictée par des mesures d'économie, ou encore par le désir de non-intervention auprès des groupes minoritaires, marginaux, violents et particulièrement criminogènes, cette approche peut être considérée comme parfaitement discriminatoire et antidémocratique par l'individu qui demeure dans une rue considérée comme « malfamée », en raison des impératifs économiques, soit du taux plus faible de loyers. Pour cet individu, il est essentiel que sa sécurité soit assurée là comme ailleurs ; il est légitime qu'il considère cela comme un droit. C'est la police qu'il va blâmer pour l'insécurité de sa situation et non pas l'autorité municipale, par exemple, qui a pu fort bien prendre la décision concernant la réduction du nombre de policiers disponibles. Il s'agit là d'une dimension sociale de la protection de l'individu qui n'est pas liée directement à l'application des lois, mais plutôt à la façon dont les forces policières sont utilisées à l'intérieur des zones où doit s'exercer leur action. Le terme de protection de la collectivité recouvre aussi des réalités qui correspondent à ce que cette collectivité considère comme action, ou politique préventive. C'est ainsi que dans le secteur particulier de déviance des mineurs, certaines sociétés, la société britannique, par exemple, s'attendent à obtenir de la police une forme spécifique de collaboration et d'assistance auprès des familles qui ne parviennent pas à contrôler les agissements des adolescents, tandis que d'autres, dont la société suédoise, estiment que cette mission est réservée aux travailleurs sociaux. Dans le cadre du schéma britannique, on demande au policier d'assumer un rôle préventif et non pas répressif, c'est-à-dire de collaborer avec la famille, ou encore avec les services scolaires et sociaux, sans user pour autant de ses pouvoirs d'arrestation. On constate là une forme de distorsion entre les exigences de la collectivité et l'application pure et simple de la loi. En Suède par contre, le rôle de la police est perçu, à cet égard, comme n'ayant qu'un seul objectif, soit celui de dépistage. Une fois découvert, le mineur déviant, ou le jeune ayant besoin de protection doit être immédiatement référé par la police à un travailleur social qui devra l'aider, ou encore décider si une plainte doit être déposée par la police devant un comité de protection ou, si le mineur est âgé de plus de quinze ans, devant une cour. La distorsion entre les exigences de la collectivité et les modalités d'action policière se solde, dans certains cas, par des exigences parfaitement contradictoires, surtout en ce qui a trait à la prévention des diverses formes de déviance qui ne présentent pas de danger immédiat de victimisation pour la collectivité. Le public accepterait mal, par exemple, la présence des policiers dans les magasins, visant à diminuer le nombre de vols à l'étalage et il ne considère pas que les variables des taux de ce type de délits peuvent être utilisées comme mesure de l'efficacité des forces policières. Il n'en reste pas moins cependant que, quand un petit commerçant est volé et maltraité, la collectivité sera portée à blâmer les forces policières et l'absence de la surveillance préventive. La définition des objectifs de la police, faite à travers les réactions de l'opinion publique, comporte donc plusieurs facteurs qui rendent particulièrement difficile l'évaluation objective du rendement des activités des forces policières, mais on relève quand même là certaines constantes. C'est ainsi qu'on retiendra en premier lieu le facteur temps, soit celui de la période qui s'écoule entre l'appel à l'aide et l'arrivée de la police. Dans les cas de victimisation à la suite d'un délit, comme dans ceux d'accidents sur la voie publique, la collectivité va réagir de façon négative, ou positive, à l'égard de la police, suivant la rapidité de son intervention. On constate que, dans plusieurs pays, l'amélioration de l'action des forces policières a été mesurée, par conséquent, en fonction de l'accroissement du nombre de patrouilles et d'équipement visant à leur assurer une plus grande mobilité. Il n'en reste pas moins que le coût de l'équipement étant moins élevé que l'accroissement des salaires, l'accent est mis presque partout sur la mobilité plutôt que sur le rapport entre l'encadrement policier et la densité de la population. La deuxième constante de la réaction de la collectivité à l'égard de la police est liée à la qualité de son intervention. Toutefois, autant le facteur de rapidité de cette intervention peut être mesuré, autant celui de la « qualité » est beaucoup plus difficile à cerner en raison de l'absence du consensus populaire. b) Les services spécifiques assurés par la police à la collectivité. - Le même problème de « qualité » apparaît en ce qui a trait aux services spécifiques que la police assume auprès de la collectivité et son acuité est d'autant plus grande que diverses solutions peuvent être adoptées dans ce secteur. Parmi ces services, on peut citer, par exemple, celui des ambulances qui existe dans certains pays de l'Amérique du Nord, ou encore les activités des équipes d'information et d'éducation des automobilistes qui sont, par définition, préventives. Le coût de ces services est particulièrement élevé, compte tenu de l'échelle des salaires des policiers, mais on les maintient en raison, entre autres, du souci de rendre la police populaire auprès du public. Les policiers eux-mêmes tiennent à les assumer afin de ne pas être considérés uniquement comme les représentants d'une force répressive. Il n'en reste pas moins que l'absence des définitions précises des diverses catégories des services de ce type occasionne des difficultés dans les relations entre la police et la collectivité. Faute de limites clairement établies, les personnes concernées ne parviennent pas à accepter que, dans une situation qui est la leur et qui peut être aussi bien liée à la perte d'un animal domestique qu'à l'impossibilité d'utiliser un véhicule automobile à cause d'une tempête, ou encore au besoin d'aide à la suite d'un dommage, d'une maladie subite ou d'une blessure, la police refuse d'agir. On ne peut éviter de se demander, dès lors, si les services spécifiques doivent être assurés par la police, ou si le système organisationnel de la police doit être complété par la création de forces auxiliaires, ou plus simplement, relié à certains organismes auxquels il serait tenu de référer les appels reçus. Ce qui apparaît le plus important à ce niveau, c'est le fait de disposer de solutions dont le choix peut être basé sur l'analyse économique de coût/efficacité. En effet, autant on considère, généralement que la détection et la répression de la criminalité doivent relever de la police, autant dans le domaine des services il est possible d'élaborer des solutions nouvelles. Or, selon les recherches américaines et européennes, il a été démontré que, contrairement à ce qu'on croit les fonctions d'assistance, ou de service à la communauté, représentent de 70 à 90% des activités policières alors que 10 à 30% est consacré effectivement aux fonctions de détection et de répression du crime. En se basant sur cette constatation fondamentale, on arrive à la conclusion, que l'introduction des techniques modernes de gestion et d'identification des tâches doit être entreprise dans une première étape à partir des données relatives aux structures existantes et cela sur trois plans à la fois : normatif, gestionnaire et prévisionnel.
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