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VERS UNE HÉGÉMONIE LIBÉRALE.
Aperçu de la politique canadienne
de Laurier à King
AVANT-PROPOS
Avant-propos
Au cours des années 1896-1926, la scène politique canadienne est particulièrement animée. En 1896, les libéraux et leur chef Wilfrid Laurier mettent fin à une longue période de domination conservatrice et inaugurent le début d'une ère libérale qui se poursuit toujours. La formule de ce succès politique certes remarquable aura deux volets. D'une part, les libéraux s'assureront un château-fort québécois où ils gagnent presque par défaut : ils sont, après tout, le seul parti ayant une voix francophone, le seul parti qui se soucie de ménager l'électeur de langue française. D'autre part, le parti réussira généralement à s'attirer l'appui d'une minorité Importante des anglophones du Canada, ceux qui jugent l'autre grand parti, le parti conservateur, comme trop près des milieux d'affaires, trop centré sur l'Ontario, trop protestant, trop impérialiste.
Avec le recul du temps, la défaite de Laurier en 1911 et l'isolement du Québec à la suite des élections de 1917, où l'on a discuté surtout de conscription militaire, paraissent être des exceptions qui confirment la règle. Dans les deux cas, grâce à une conjoncture particulière, les conservateurs remportent une solide majorité au Canada anglais et, en 1911, en raison de l'alliance avec le nationaliste Henri Bourassa, ils réussissent même à enfoncer la forteresse libérale du Québec. Mais la conjoncture se modifie rapidement et le parti de Robert Borden et d'Arthur Meighen, son successeur, s'écroule désastreusement en 1921.
Quoique parfois des adversaires de taille, les conservateurs ne constituent pas la seule menace à laquelle doivent faire face les libéraux. Au début des années 1920, les progressistes, un parti fermier, remportent d'importants succès, largement aux dépens des libéraux, en Ontario et dans l'Ouest canadien. Grâce à une politique habile, cependant, W.L.M. King, élu chef libéral en 1919 après le décès de Laurier, vient à bout de cette nouvelle opposition et les libéraux sont de nouveau [ii] bien en selle en 1926.
Si nous traitons dans ce volume des partis fédéraux, nous le faisons à partir d'une perspective québécoise. Décidément, l'étude de l'histoire politique fédérale ne peut plus être réservée aux seuls anglophones. Ainsi, dans la partie descriptive, où nous voyons comment les contemporains de chaque période ont perçu la politique fédérale, nous avons privilégié les témoins de langue française aussi bien que les thèmes qui touchaient le Québec. Il convient de ne pas oublier qu'à cette époque, bien avant le développement de l'État provincial, la politique fédérale passionnait grandement les Québécois.
Ce volume se divise en deux parties : l'ère de Laurier, et l'époque des grands bouleversements après 1911. Dans chaque partie, le lecteur trouvera une introduction qui lui permettra de survoler la période. Ensuite, il verra les éléments saillants des campagnes électorales dont certaines ont été mouvementées et d'autres, plutôt ternes. En annexe, l'on trouvera une série de tableaux de statistiques électorales et une orientation bibliographique indiquant les meilleures sources secondaires actuellement disponibles.
Nous désirons remercier le Conseil des Arts qui a subventionné une partie de nos recherches ainsi que l'Université Laval qui a bien voulu appuyer la mise sur pied de cette nouvelle collection du Département d'histoire, les "Cahiers d'histoire politique". MM. Bertrand Juneau et Richard Ouellet ont participé aux recherches et MM. Marc LaTerreur, Nive Voisine, John English et particulièrement Réal Bélanger nous ont prodigué leurs conseils presque toujours judicieux. Finalement, nous voulons remercier, tout spécialement, Mme Georgette Huot qui a dactylographié le manuscrit en entier, et Mme Christiane Demers qui a fait le travail fastidieux de relecture.
Richard Jones
St-Cyrille-de-L'Islet
juillet 1980
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