À l'automne 1944, se tenait le premier grand rassemblement à ciel ouvert de la Résistance, le Congrès des comités de la Libération au palais des Papes en Avignon. Cinquante ans après, presque jour pour jour, la première université des réseaux nationaux de l'insertion par l'activité économique se réunissait dans ce même lieu chargé d'histoire. Il m'était donné d'être l'un des organisateurs et des principaux acteurs de ces deux manifestations.
Entre ces deux dates le monde s'est profondément transformé et j'ai moi-même évolué de façon surprenante, dans mes idées, dans mon comportement, dans mon statut. Résistant, communiste, haut fonctionnaire, banquier, militant à nouveau, mes visages successifs, comme beaucoup d'autres, ont changé avec le temps.
Mais dans l'un et l'autre rassemblement, à deux générations de distance, des citoyens responsables, résolus réagissaient, faisaient entendre leurs voix devant des institutions qui s'étaient discréditées dans la collaboration et qui, un demi-siècle plus tard, se révélaient défaillantes dans la lutte contre le chômage et l'exclusion.
Peut-on rapprocher les hommes et leurs projets d'alors et ceux d'aujourd'hui ? Existe-t-il des jalons, des repères donnant, à défaut d'un tracé continu, un sens à l'itinéraire heurté de ma propre génération ?
Ce témoignage cherche à répondre à cette question à travers des souvenirs, fruits d'une mémoire sélective et sans l'aide de notes écrites, qui ne prétendent pas en l'objectivité historique, mais constituent plutôt un regard subjectif sur les événements auxquels j'ai participé et les personnalités qu'il m'a été donné de rencontrer.