[243]
Introduction
Dans sa réflexion sur la situation haïtienne après le tragique tremblement de terre survenu le 12 janvier 2010, le sociologue haïtien Laënnec Hurbon remarque qu’on devrait parler de « catastrophe permanente [2] ». C’est comme si la catastrophe et ses conséquences néfastes faisaient depuis longtemps partie intégrante de la vie quotidienne en Haïti. En ce sens, le séisme de 2010 serait la dernière étape, du point de vue chronologique, d’une série de désastres naturels, historiques et humanitaires qui se sont succédé du jour où le peuple haïtien a proclamé son indépendance en 1804, après sa révolte contre la France coloniale et esclavagiste [3]. À ce sujet, Deborah Jenson constate que, dans les écrits rédigés par les colonisateurs pendant la Révolution haïtienne, les notions de « désastre » et « catastrophe » ont été souvent employées pour définir la naissance de la première [244] république noire [4]. Cette vision catastrophique de l’histoire haïtienne a renforcé le stéréotype selon lequel Haïti serait une « nation maudite [5]. » Le critique de la littérature haïtienne J. Michael Dash replace la catastrophe de 2010 dans un contexte de longue durée. Il constate notamment que cette dernière a peu à voir avec une prétendue destinée tragique du peuple haïtien, car ses répercussions doivent être examinées compte tenu de l’histoire du pays et du contexte sociohistorique [6].
L’approche transculturelle adoptée par Maximilien Laroche dans son œuvre critique a mis en évidence les rapports qu’Haïti entretient avec d’autres pays et leurs cultures et littératures. Notre étude s’inscrit dans la même démarche et veut explorer la vision transculturelle qui sous-tend plusieurs écrits parus entre 2010 et 2011, immédiatement après le séisme. Nous prendrons en considération quelques textes publiés dans les ouvrages collectifs, mais aussi les ouvrages de Paul Farmer (Haiti After the Earthquake, 2011) et de Robert Chaudenson (« Goudou Goudou ». Haïti : une année de terreurs, d’erreurs et de rumeurs, 2010) ainsi que Create Dangerously. The Immigrant Artist at Work (2010) d’Edwidge Danticat. Malgré le caractère hétérogène du [245] corpus, ces publications montrent la même volonté de remettre en cause les discours stéréotypés et de tisser des liens transculturels entre Haïti et d’autres pays de la Caraïbe et du monde entier.
Le tremblement de terre survenu en 2010 a mis Haïti au premier plan de la scène mondiale. Les écrivains haïtiens, poussés, de près ou de loin, par un impératif éthique, ont été naturellement les premiers à élever leur voix face à la catastrophe. Comme le souligne Mame Fatou-Niang, « […] le séisme et ses répliques médiatiques installent le pays au cœur de la planète, et y braquent les regards du monde. Pour les écrivains et artistes haïtiens, l’enjeu est de profiter de cette plateforme mondiale afin de véhiculer leurs visions, leurs mots et dire leur île au monde [7] ». Pour ces auteurs, dont certains ont vécu le cauchemar du séisme, témoigner consiste à écrire à contre-pied de l’objectivité présumée par les médias et les communiqués officiels du gouvernement [8].
Les premières réactions
Presque aussitôt après le séisme, le recours au témoignage a été privilégié en réponse au « récit officiel » sur la catastrophe donné par les médias internationaux. Nés de l’urgence, dictés par le besoin de rendre compte de la catastrophe, ces textes mettent en évidence la nature hybride du témoignage, genre qui laisse lire deux prises de position superposées en contrepoint : autobiographique/individuelle et publique/collective. Concrètement, on peut y observer une réflexion sur des aspects collectifs, associée à une « écriture de l’urgence » (dénoncer l’inactivité du gouvernement et rendre hommage aux victimes), et une réflexion personnelle et subjective, associée davantage à un « devoir de mémoire », au travail du deuil et à la valeur [246] cathartique/thérapeutique de l’écriture pour le survivant. Dès lors, en réponse au « silence » du gouvernement haïtien et au tapage médiatique, la littérature comme espace de médiation sera le seul moyen d’offrir une lecture différente du désastre et d’assumer la gestion littéraire de l’événement traumatique à partir d’une situation d’urgence.
Dans son texte « Tremblement de terre », publié sur le site Potomitan en janvier 2010, Louis-Philippe Dalembert s’interroge sur la manière d’exprimer ce qu’il a vécu : « Comment raconter l’inénarrable ? Comment dire ces cadavres d’enfants et d’adultes, de jeunes et de vieux, d’hommes et de femmes qui jonchent les rues ? Ces blessés transportés à dos d’homme, dans une brouette, sur des brancards improvisés ? [9] » Dans « Rester en vie et perpétuer la vie », texte daté du 22 janvier 2010, Kettly Mars insiste sur le fait que le séisme a pu effacer, pour un temps seulement, les inégalités sociales préexistantes : « Il y a des quartiers qui sont plus touchés que d’autres, mais tous sont touchés. Bidonvilles, bas de la capitale, quartiers populeux, quartiers résidentiels. Pour une fois en Haïti les clivages de société n’ont fait aucune différence, le séisme ne connaît ni classe sociale ni couleur de peau [10]. » Pour sa part, dans un texte du 19 janvier, Évelyne Trouillot réfléchit ainsi sur le rôle de la littérature face au désastre : « Les yeux fixés sur les étoiles de ce ciel qui demeure pour moi le plus beau au monde, il me vient inconsciemment des images, des phrases, des bribes de réflexion sur les êtres et les choses, sur la place de la littérature dans un monde où une telle catastrophe peut en moins d’une minute détruire des dizaines de milliers de vies et laisser [247] un pays béant [11]. »
D’autres écrivains iront dans le même sens, en réfléchissant sur le rapport entre la pratique littéraire et le séisme. À côté de nombreux articles et entretiens parus dans la presse imprimée ou en ligne, une grande quantité de témoignages et de chroniques ont été publiés dans des ouvrages collectifs.
Les ouvrages collectifs
L’écrivaine haïtienne Emmelie Prophète, ancienne directrice générale de la Bibliothèque Nationale d’Haïti et directrice du Bureau haïtien du droit d’auteur, parle dans la revue Conjonction, parue en 2011, des défis principaux des œuvres publiées peu après la catastrophe : « Ce séisme, cette chose, a laissé le besoin, provoqué une envie de témoigner, de consoler, d’accuser et de partager l’espoir. Dire la souffrance, les épreuves. Rendre hommage aux disparus et à ceux, véritables héros anonymes qui, avec leurs mains et leurs âmes, ont soulevé ces gros blocs de béton pour dégager des survivants [12]. » Les publications parues entre 2010 et 2011 témoignent de ces défis et montrent la résonance universelle de la catastrophe haïtienne. La liste des ouvrages qui s’insèrent dans cette perspective est longue : Haïti le désastre et les rêves ; Le Serpent à plumes pour Haïti ; Haïti parmi les vivants ; Pour Haïti ; Haiti Rising. Haitian History, Culture and the Earthquake of 2010 ; How to Write an Earthquake Comment écrire et quoi écrire Mo pou 12 janvie ; Ainsi parla la terre Tè a pale So Spoke the Earth, sans citer les ouvrages publiés par les journalistes et les universitaires ainsi que la littérature pour la jeunesse où le séisme est montré ou figuré. Malgré leur caractère hétéroclite, on peut regrouper ce corpus selon certains aspects communs :
- L’étendue transnationale qui se manifeste par plusieurs indices : les lieux de publication (France métropolitaine, Martinique, [248] Angleterre, États-Unis) et les langues d’écriture (le français, le créole haïtien, l’anglais, l’espagnol, le portugais) ;
- la pluralité des appartenances nationales et professionnelles des auteurs ;
- la variété des genres pratiqués : entretiens, réflexions personnelles, témoignages, lettres, poèmes, nouvelles, articles de presse, essais sociohistoriques et extraits de pièces de théâtre ;
- l’orientation des écrits qui poursuit une double visée : solliciter la solidarité (rendre hommage aux victimes et aux rescapés, lever des fonds en vue de la reconstruction d’Haïti) et témoigner fidèlement de la situation du pays à partir d’une démarche critique tournée contre les clichés culturels sur Haïti et ses habitants.
Dans ses « Prolégomènes » à un ouvrage collectif, Pour Haïti [13], l’écrivaine guadeloupéenne Suzanne Dracius insiste sur le « devoir de mémoire » de la littérature mondiale envers Haïti :
- De même que le monde entier assure un devoir de solidarité aujourd’hui dans l’action humanitaire sur le terrain, le monde littéraire ne peut échapper à plus longue échéance au devoir de mémoire et se doit de participer, avec les partenaires d’Europe, des Amériques, des Caraïbes et du monde entier à la reconstruction institutionnelle, éducative et morale de ce petit pays créole à l’incommensurable grandeur [14].
En constatant que le trauma engendré par la catastrophe du 12 janvier est « planétaire [15] », Dracius donne le ton au reste de l’ouvrage où l’on trouve des réflexions similaires, comme celle faite par Alain Mabanckou, selon qui le séisme « […] a frappé l’Afrique en plein cœur [16] ». Jean Métellus, écrivain haïtien installé en France depuis [249] 1959, qualifie de « superstitieux » le vocabulaire utilisé par les médias qui ne font qu’alimenter l’idée d’une malédiction qui serait à l’origine de la catastrophe : « Les médias profitent de cette catastrophe pour parler constamment d’Haïti comme du pays le plus pauvre des Amériques avec une délectation bien sordide [17]. » Des auteurs antillais de renommée internationale ont aussi participé au collectif dirigé par Dracius, comme Ernest Pépin, Daniel Maximin et Maryse Condé. Cette dernière, écrivaine guadeloupéenne qui a remporté en 2018 le prix Nobel alternatif de littérature, rappelle l’épithète accolée le plus souvent à Haïti : « Les journaux l’appellent à l’envi la nation la plus pauvre de l’hémisphère occidental [18]. »
Le Serpent à plumes pour Haïti, édition hors-série de la maison Le Serpent à plumes livrée en février 2010, réunit des nouvelles, des photos et des extraits de romans déjà parus de nombreux auteurs haïtiens comme Dany Laferrière, Louis-Philippe Dalembert, Gary Victor, Frankétienne, Yanick Lahens et Évelyne Trouillot. À ces écrits épars s’ajoutent deux témoignages signés par James Noël et Rodney Saint-Éloi. Dans sa contribution, « La tendresse et l’élégance nous sauveront du séisme », Saint-Éloi parle des secousses sismiques auxquelles il a survécu, tout en abordant le thème du rôle de l’art, en particulier de la poésie (il y évoque Christophe Charles, Frankétienne et Amos Oz), afin de pouvoir échapper aux images qu’il continue d’avoir sous les yeux. Après le séisme, le poète James Noël s’est essayé à pratiquer d’autres genres littéraires, comme la nouvelle pour enfants et le roman, en quête de formes d’expression susceptibles de narrer le choc sur un mode non poétique. Dans « Quelques mots lâchés en catastrophe », il souligne que « […] nous ne sommes pas à notre première fin du monde en Haïti [19] », en évoquant l’année 2004, date du bicentenaire de l’indépendance qui a été marquée par le coup d’État contre le président Aristide et le passage dévastateur de la tempête Jeanne. Noël rappelle aussi l’année 2008, où quatre tempêtes ont frappé Haïti, et se demande si son pays sera encore oublié par le monde, [250] comme dans le passé, après chaque catastrophe.
En quatrième de couverture du collectif How to Write an Earthquake Comment écrire et quoi écrire Mo pou 12 janvie [20], Anny Dominique Curtius présente cet ouvrage comme une anthologie qui pourra offrir un nouveau regard sur le trauma [21]. Dans la préface à cet ouvrage, Beaudelaine Pierre insiste sur la dynamique entre l’écriture et la mémoire : « En contribuant à la littérature déjà désormais établie du 12 janvier 2010, les contributeurs de cette collection affirment et recréent encore une fois le rôle sacré de la littérature dans la construction de la mémoire identitaire [22]. » Cette idée est exprimée aussi par Joëlle Vitiello dans son introduction au même collectif, où elle constate que l’écriture est capable de donner refuge à la mémoire individuelle et collective [23]. Edwidge Danticat, une Port-au-princienne installée aux États-Unis depuis l’enfance (d’abord à New York et ensuite à Miami), exprime sa déception vis-à-vis de l’attention portée à son pays natal uniquement quand celui-ci est en proie à la détresse : « We who know and love Haiti have long been pained, and sometimes frustrated, that it’s a place that can only be noticed [251] when it is on its knees [24]. » Beaudelaine Pierre est aussi très critique quant à la gestion du séisme par la communauté internationale, qu’elle désigne avec ironie comme « fête de l’humanitaire » et « fête de l’urgence [25] ». Dans cette anthologie, un texte de Yanick Lahens daté du 28 janvier 2010 apporte des réflexions qui seront élaborées peu après dans son œuvre Failles (publiée en France en octobre 2010). Lahens évoque en particulier le « travail de mémoire » et insiste sur le « devoir de parole » de l’écrivain, malgré toutes les contraintes qu’elle puisse éprouver à cet égard : « Cet événement si éprouvant soit-il n’est donc pas parvenu à éteindre l’écrivain en moi qui se pose aujourd’hui plus que jamais les questions suivantes : quoi écrire et comment écrire après une telle catastrophe ? [26] »
Dans la préface au collectif Haïti parmi les vivants [27], la journaliste française Valérie Marin La Meslée parle des liens nécessaires entre « […] journalisme événementiel et littérature de l’urgence [28] ». Plusieurs textes rassemblés dans ce collectif abondent dans le même sens. Notons, entre autres, « Dire, au milieu des ruines, des hommes debout » de Michel Le Bris, « Une forêt de gens remarquables [29] » de Dany Laferrière et « Chroniques de l’après : petite histoire des réactions à l’horreur du séisme », rédigé par Lyonel Trouillot pour le site LePoint.fr. Trouillot, qui n’a pas écrit de roman sur le séisme, s’est [252] pourtant exprimé très sincèrement après la catastrophe en parlant sans ambages de la situation sociopolitique et historique du pays et du rôle de l’écrivain haïtien en situation d’urgence : « Que peut la littérature devant les grands malheurs ? Rien. Mais surtout pas se taire. Avec nos morts, avec nos mots, nous qui sommes revenus du déluge de pierre, écrivons pour trouver “une place dans le monde des vivants” [30]. »
D’autres attitudes dans Haïti parmi les vivants méritent d’être mentionnées, surtout à cause de la manière subjective, viscérale même, dont la catastrophe est abordée. C’est, à titre d’exemple, l’aveu du poète et animateur culturel haïtien Syto Cavé qui explicite le rôle de l’écriture pour justifier sa propre survie : « Quelqu’un m’a appelé hier pour me demander si je suis mort. Absolument, ai-je dû répondre. Une amie m’a suggéré d’écrire, comme pour reprendre ma place parmi les vivants [31]. » Emmelie Prophète aussi fait une référence à la création, mettant l’accent sur le besoin d’invention créative afin de perlaborer le trauma : « On peut dégager de belles histoires des catastrophes aussi, ne serait-ce que pour les rendre humaines. Nous sommes tous plus ou moins morts le 12 janvier à 17 heures et nous n’avons eu droit à aucune sépulture [32]. »
Répétons-le : dans les ouvrages collectifs, nombre d’auteurs d’origines géographiques diverses dénoncent avec insistance la version des faits rapportée par les médias afin de mieux faire ressortir la solidarité et le savoir-faire local, susceptibles de soutenir les rescapés dans l’effort de reconstruction de leur habitat. Significativement, dans un texte paru dans Haïti, le désastre et les rêves [33], Lyonel Trouillot se dresse contre le racisme inconscient et naïf caché derrière la formule [253] « plus ça va mal, plus ils créent [34] ». Dans le même recueil, le poète haïtien Gary Klang dénonce le rôle de la communauté internationale face à la tragédie haïtienne, en parlant des « […] marionnettes de l’ONU et de l’OEA [35] ». Antoine Tshitungu Kongolo, écrivain congolais, parle en termes de « cataclysme mondialisé [36] » et s’érige violemment contre la « mise en spectacle » de la tragédie haïtienne et contre les prêtres pentecôtistes, débarqués dans le pays « […] avec du coca, des tentes et des bibles [37] ».
Arrêtons-nous sur l’ouvrage critique Haiti Rising. Haitian History, Culture and the Earthquake of 2010 [38] dirigé par Martin Munro. La première partie, intitulée « Survivor Testimonies », donne la parole aux écrivains (Yanick Lahens, Évelyne Trouillot, Marlène Rigaud Apollon, Michel Le Bris), à un cinéaste (Raoul Peck) et à des chercheurs d’origines diverses (Laura Wagner, Jason Herbeck, Nadève Menard, Thomas C. Spear). Thomas C. Spear précise le caractère dégradant de l’épithète « pauvre », associée à répétition à Haïti dans les communiqués médiatiques [39]. Dans « Salvaging », Laura Wagner condamne elle aussi la perception occidentale selon laquelle Haïti serait un pays en souffrance perpétuelle dont on parle aux États-Unis uniquement quand il s’y passe une tragédie collective [40]. Dans « Finding the Words », le Français Michel Le Bris souligne l’importance de témoigner pour épargner Haïti de l’image de « film [254] catastrophe hollywoodien [41] » médiatisée en permanence, pour mettre davantage l’accent sur la créativité culturelle qui devrait naître des décombres. Interrogé lors d’une émission télévisée sur la signification du séisme, en particulier sur le rôle que la littérature pourrait jouer, Le Bris estime que cette dernière est censée apporter des sens ignorés par les journalistes, révéler toute la potentialité créative et, par là même, contribuer à la reconstruction d’Haïti [42]. Dans le témoignage d’Évelyne Trouillot, écrit quatre mois après la catastrophe, au constat de l’inanité du gouvernement et du caractère sensationnel des reportages journalistiques s’ajoute une réflexion sur le tremblement de terre, vécu sur un mode imaginaire en tant qu’expérience individuelle et collective :
- Each time I speak of those seconds, it awakens the same feeling of unspeakable pain because it isn’t just my pain ; it belongs to a whole people. Every word is laden with fissures and stumblings that recall all those destroyed lives. And when I look upon a ravaged neighborhood, upon streets that now exist only in photographs and in our memories, I imagine them filled with those individuals who departed in less than a minute, quite simply, sometimes with no sound other than those of disintegrated walls and twisted métal [43].
D’autres collectifs ont paru plus tard, comme … des maux et des rues, publié à Port-au-Prince en 2014, et Ravine l’espérance, cette semaine-là à Port-au-Prince, publié à Paris en 2017. Parmi ces [255] collectifs, Haïti noir, recueil de nouvelles inédites écrites par des auteurs haïtiens qui mettent en scène différents lieux d’Haïti, possède un statut singulier. Edwidge Danticat, directrice du recueil, avait presque fait le choix des nouvelles à publier lorsque le tremblement de terre est survenu. Elle explique dans la préface de l’ouvrage que la catastrophe l’a mise en doute quant à la possibilité de diffuser une œuvre du genre « noir » après ce qui était arrivé. Trois nouvelles parmi les dix-huit qui composent le recueil évoquent le séisme. Il importe de souligner que les textes « présismiques » que Danticat avait déjà sélectionnés à des fins éditoriales ont pris une valeur nouvelle après le séisme, mettant en scène des lieux qui ont par la suite été détruits ou déformés par l’événement. De façon significative, ces textes campent des images d’avant la catastrophe et, du même coup, parviennent à préserver la mémoire de ces lieux [44].
D’autres regards sur la catastrophe haïtienne
La déconstruction des stéréotypes sur Haïti après le séisme ne s’arrête pas aux textes publiés dans les ouvrages collectifs ou sous forme d’articles parus dans la presse écrite ou sur Internet. Le médecin étasunien Paul Farmer a publié en 2011 aux États-Unis Haiti After the Earthquake, ouvrage où sont recueillis des témoignages de professionnels de la santé actifs en Haïti, mais aussi ceux de personnalités ayant un lien avec le pays, comme Edwidge Danticat et la journaliste Michèle Montas-Dominique. Parmi les thèmes abordés dans cet ouvrage, plusieurs textes dénoncent la pauvreté et les injustices sociales enracinées en Haïti et exacerbées par le tremblement de terre [45].
[256]
Écrit par le linguiste français Robert Chaudenson, « Goudou Goudou ». Haïti : une année de terreurs, d’erreurs et de rumeurs est un autre exemple d’ouvrage qui met à nu les stéréotypes. L’auteur y reprend ses réflexions publiées sur Internet entre janvier et juillet 2010 afin de traquer « […] les multiples sottises, voire les énormités, qu’on entendait quotidiennement en France, en particulier dans les médias audio-visuels [46] ». Chaudenson consacre chaque section à un aspect sociohistorique, économique et culturel du pays , dans le but de dévoiler « […] les non-dits des médias sur Haïti [47] ». Il nous paraît important de souligner que cette contribution remplit une fonction proche de la démarche entreprise par des chercheurs et écrivains haïtiens (Cary Hector, Laënnec Hurbon et Lyonel Trouillot entre autres) qui ont essayé de donner une image authentique d’Haïti. L’œuvre s’adresse au public français pour mettre en évidence des informations erronées dans les médias, comme celle d’une « prétendue solidarité “caribéenne” [48] » entre les Haïtiens, les Martiniquais et les Guadeloupéens, alors qu’une véritable xénophobie anti-haïtienne se répand dans les départements français d’Outre-mer [49]. Il signale aussi certains aspects obscurs de la gestion de l’après-séisme : le débat sur les amputations des blessés, pratiquées hâtivement et massivement par les équipes médicales étasuniennes ; la nécessité de réformer le système des adoptions, en vue d’assurer un avenir aux enfants restés orphelins ; la controverse autour des équipes internationales de secours qui ont été dirigées d’abord vers les riches et les ressortissants étasuniens, canadiens et français. Chaudenson évoque aussi l’épidémie de choléra et les élections présidentielles de novembre 2010. Même s’il tient compte d’un intervalle de temps limité, l’ouvrage du linguiste français montre que les informations biaisées sur la catastrophe [257] haïtienne transmises par les médias internationaux reposent le plus souvent sur des préjudices à l’égard d’Haïti qui perdurent depuis son indépendance.
Selon Martin Munro, la plupart des écrivains bénéficiant déjà d’une reconnaissance internationale avant l’événement, ont préféré témoigner au lieu de choisir le roman [50]. Quatre œuvres parues en 2010 s’inscrivent dans cette orientation : Create Dangerously. The Immigrant Artist at Work d’Edwidge Danticat, Failles de Yanick Lahens, Tout bouge autour de moi de Dany Laferrière et Haïti kenbe la ! 35 secondes et mon pays à reconstruire de Rodney Saint-Éloi. Beaucoup plus que de simples témoignages, ces œuvres confirment le côté personnel de l’engagement, articulé souvent sur un mode intime et réflexif. Poussés par un impératif éthique, les écrivains haïtiens de la diaspora (Edwidge Danticat, Rodney Saint-Éloi et Dany Laferrière) ainsi que Yanick Lahens, qui vit en Haïti, ont publié des textes hybrides, à mi-chemin entre le témoignage et l’essai, la chronique et la méditation. Leurs œuvres, publiées en France, au Québec et aux États-Unis, s’adressent en partie à un lectorat étranger. Ce qui distingue les textes de Lahens, Saint-Éloi et Laferrière de celui de Danticat tient au fait que cette dernière n’est pas une rescapée de la catastrophe, étant donné que le 12 janvier 2010 elle se trouvait aux États-Unis.
Entre commémoration et combat intellectuel
Edwidge Danticat a publié en 2010 un recueil d’articles, Create Dangerously. The Immigrant Artist at Work, traduit en français en 2012 sous le titre Créer dangereusement. L’artiste immigrant à l’œuvre. Il s’agit d’un ensemble de textes autonomes, certains déjà publiés auparavant, qui prennent la forme de chapitres et couvrent la période entre 1999 et 2010. Leur fil conducteur est la condition d’immigrée de l’écrivaine elle-même et son rapport à Haïti. Les articles sont accompagnés de réflexions sur la relation entre plusieurs intellectuels ou artistes émigrés ou exilés et leur pays natal. Parallèlement, Danticat mentionne quelques catastrophes, naturelles et humaines, qui ont [258] marqué Haïti et d’autres pays ; elle évoque, par exemple, la dévastation provoquée en Louisiane par l’ouragan Katrina en 2005 ou l’attentat terroriste au World Trade Center en 2001. Le parcours tracé dans Create Dangerously à travers les chapitres va de l’exécution des dissidents politiques haïtiens Marcel Numa et Louis Drouin pendant le régime de François Duvalier en 1964 jusqu’au séisme de janvier 2010, en passant par la narration de quelques épisodes du passé récent haïtien comme l’assassinat du journaliste Jean Dominique en 2000 ou la célébration du bicentenaire de l’indépendance de la France en 2004. L’œuvre est parcourue aussi par l’évocation de quelques écrivains haïtiens immigrés, migrants ou exilés comme Jacques-Stephen Alexis, Marie Chauvet et Jan J. Dominique ou du peintre Jean-Michel Basquiat qui ne s’est jamais rendu en Haïti, pays de son père.
La biographie de l’auteure elle-même se donne à lire dans certains chapitres, par exemple celui où elle raconte sa visite chez une tante dans les collines de Léogâne en 1999, mais aussi dans le dernier, « Notre Guernica », consacré au tremblement de terre de 2010. Le séisme est présent déjà dans la dédicace aux victimes qui ouvre le livre : « Deux cent mille et plus ». Danticat, en tant que porte-parole des Haïtiens aux États-Unis [51], raconte avoir été sollicitée par les médias pour partager son expérience tout de suite après la catastrophe, ce qui a eu pour elle un « effet thérapeutique [52] ». Elle avoue que trouver des mots adéquats s’est avéré difficile, même si son rôle comme « immigrante et comme écrivaine [53] » demandait de communiquer aux autres les nouvelles bouleversantes qui lui parvenaient d’Haïti, en particulier aux non-Haïtiens, mais aussi à la communauté haïtienne aux États-Unis. Pourtant, à cause de l’impossibilité de témoigner directement du tremblement de terre, Danticat se tourne vers la lecture : « Il est trop tôt pour essayer d’écrire, me disais-je. Tu n’étais pas là. Tu ne l’as pas vécu. Tu n’as même pas le droit de parler pour toi, pour eux, pour n’importe qui. Alors j’ai fait ce que je fais toujours quand mes propres mots m’abandonnent. J’ai lu [54]. » La lecture joue un rôle important dans [259] Create Dangerously. L’œuvre est en effet parsemée de références à plusieurs écrivains du monde entier ; ces évocations littéraires permettent à l’auteure de nouer des liens transculturels et transnationaux entre la réalité haïtienne, en particulier l’expérience de la migration, et d’autres contextes. Les allusions aux œuvres du Français Albert Camus [55], du Cubain Alejo Carpentier, du Colombien Gabriel García Márquez et de l’Afro-Américaine Zora Neale Hurston, entre autres, contribuent à donner une dimension universelle aux réflexions sur Haïti. Après le séisme, Danticat raconte avoir lu en particulier les témoignages de ses amis, Évelyne et Lyonel Trouillot, et L’Énigme du retour de Dany Laferrière, roman de 2009 qu’elle interprète comme une « chanson d’amour pour une Haïti qui n’existe plus [56] ».
Trois semaines après le tremblement de terre, Danticat se rend à Port-au-Prince, où elle découvre son ancien quartier, Bel-Air, complètement détruit. En marchant dans les rues de la capitale, elle pense à un film qu’elle avait vu sur Hiroshima rasé après la catastrophe nucléaire. Elle entreprend ce voyage pour rencontrer sa famille et ses amis, saluer ceux qui sont vivants et rendre hommage aux morts. Create Dangerously se termine en effet par l’évocation des plus de deux cent mille victimes du séisme, parmi lesquelles se trouvaient quelques membres de sa famille. Malgré le désastre ambiant et la dévastation intérieure qu’elle éprouve, Danticat croit fort que les écrivains haïtiens continueront leur travail d’écriture pour assumer de nouveaux défis : « […] peut-être écrirons-nous avec la même ferveur, la même intensité (si ce n’est davantage) qu’avant. Peut-être écrirons-nous avec la même intrépidité, la même espérance. Peut-être continuerons-nous à créer aussi dangereusement que possible, mais notre muse aura été irrémédiablement transformée [57]. » Dans Create Dangerously s’entremêlent le récit d’épisodes biographiques de l’auteure, des réflexions sur le caractère universel de l’expérience de la migration et le témoignage de son retour en Haïti après le séisme. Grâce à ses méditations qui ont toujours Haïti comme point de départ, [260] Danticat, véritable porte-parole de la communauté haïtienne aux États-Unis, est parvenue à donner une dimension globale à ses interrogations sur le présent et l’avenir du pays qu’elle a quitté à l’âge de douze ans.
Conclusion
Dans le prologue de son recueil d’essais Sémiologie des apparences (1994), Maximilien Laroche met l’accent sur l’importance d’apprendre à « voir double » afin d’aller au-delà des apparences. Selon Laroche, « voir double » signifie avoir des yeux « […] qui apprennent à voir non pas droit devant soi, mais tout autour de soi ; qui font vraiment découvrir le monde et puisque celui-ci est rond, permettent d’avoir un regard circulaire sur lui [58] ». L’adoption d’un tel regard analytique dans son œuvre critique a permis à Laroche de nouer des liens entre la culture et la littérature haïtiennes et des espaces variés. Par la même approche, plusieurs témoins directs et indirects du tremblement de terre de janvier 2010, le plus souvent des écrivains, ont pu transcender le contexte haïtien du drame et lui donner une dimension transnationale et transculturelle. Nous avons pu remarquer que les textes recueillis dans les ouvrages collectifs ainsi que les deux ouvrages de Paul Farmer et de Robert Chaudenson remettent en cause le discours stéréotypé sur Haïti. Dans l’œuvre post-sismique d’Edwidge Danticat, qui se situe entre le témoignage et l’essai, la chronique des faits s’accompagne de réflexions plus générales sur la situation haïtienne et la condition de tout émigré.
Plusieurs préoccupations sociales et des questions politiques explicitement articulées dans les textes de genre varié parus immédiatement après le séisme vont réapparaître dans les romans haïtiens de la même période. Le caractère supranational et translinguistique de ces publications confirme l’intention des auteurs de solliciter la solidarité et de témoigner de la situation haïtienne de façon objective. Notre parcours à travers les différentes formes de récit-témoignage nées du tremblement de terre en Haïti et ailleurs nous a permis de montrer la résonance universelle de la catastrophe haïtienne et les réactions qu’elle a suscitées aux quatre coins de la planète.
[1] Le présent article a été réalisé grâce à la subvention du projet Literackie obrazowanie katastrof naturalnych w prozie haitańskiej i antylskiej (n° 2017/27/N/HS2/00671) accordée par Narodowe Centrum Nauki, Polska (Centre National de Recherche Scientifique, Pologne).
[2] Hurbon Laënnec. « Catastrophe permanente et reconstruction », Observatoire de la reconstruction, n°6, 2012, p. 8-10.
[3] Cf. Hector, Cary, « Haïti : Quelques dilemmes, impasses et perspectives de la “Reconstruction-Refondation” post-séisme : 2010-2013 », Haïti Perspectives, vol. 2, n°4, 2014, p. 92.
[4] Cf. Jenson, Deborah, « The Writing of Disaster in Haiti : Signifying Cataclysm from Slave Revolution to Earthquake », dans Martin Munro (ed.), Haiti Rising : Haitian History, Culture and the Earthquake of 2010, Liverpool, Liverpool University Press, 2010, p. 102.
[5] Comme l’a constaté Martin Munro, l’une des premières réactions après le séisme de 2010 a été de répondre au malheur des Haïtiens par la pitié, en alimentant l’idée selon laquelle Haïti serait vouée au désastre, comme si une malédiction pesait sur son histoire. Munro souligne que cette attitude fataliste met l’accent sur le rôle de forces surnaturelles et indépendantes de la volonté des hommes, alors que le malheur des Haïtiens a des racines beaucoup plus concrètes et la responsabilité de la catastrophe est à rechercher dans des causes sociales, politiques et historiques. Cf. Martin Munro, « Introduction : Fall and Rise » dans Martin Munro (ed.), Haiti Rising : Haitian History, Culture and the Earthquake of 2010, op. cit., p. 1-6. Après le séisme, une partie considérable de la littérature haïtienne va se distancier de cette idée reçue, accolée aux Haïtiens.
[6] « Haiti’s tragedy is not natural, but manmade, not destiny but history ». J. Michael Dash, « Rising from the Ruins : Haiti in Two Hundred Years », dans Martin Munro (ed.), Haiti Rising : Haitian History, Culture and the Earthquake of 2010, op. cit., p. 63.
[7] Niang, Mame-Fatou. « Kenbe la ! Haïti ou l’écriture de l’urgence », dans El Nossery, Névine, Amy L. Hubbel (eds.), The Unspeakable : Representations of Trauma in Francophone Literature and Art, Newcastle upon Tyne, Cambridge Scholars Publishing, 2013, p. 173-192 (p. 189).
[8] Cf. Button, Gregory V., et Mark Schuller, « Introduction », dans Gregory V. Button et Mark Schuller (eds.), Contextualizing Disaster, New York / Oxford, Berghahn Books, 2010, p. 3. On peut parler à cet égard d’un contre-discours ou de counter-narratives.
[9] Dalembert, Louis-Philippe. « Tremblement de terre », Potomitan, janvier 2010, en ligne : [URL], consulté le 17 novembre 2020. Dalembert a écrit un autre texte, « Port-au-Prince, ou l’odeur de la mort », BibliObs, 20 janvier 2010, en ligne : [URL], consulté le 17 novembre 2020.
[10] Mars, Kettly. « Rester en vie et perpétuer la vie », Montray Kreyol, 22 janvier 2010, en ligne : [URL], consulté le 17 novembre 2020. Voir aussi un entretien avec l’écrivaine : « Il faut que l’aide atteigne les victimes », BibliObs, 16 janvier 2010, en ligne : [URL], consulté le 17 novembre 2020.
[11] Trouillot, Évelyne. « Évelyne Trouillot nous écrit d’Haïti », BibliObs, 19 janvier 2010, en ligne : [URL], consulté le 17 novembre 2020.
[12] Prophète, Emmelie. « Les écrivains parlent du séisme », Conjonction, no°223, 2011, p. 113.
[13] Ouvrage publié en Martinique qui rassemble les contributions de cent trente auteurs en cinq langues (français, créole haïtien, anglais, espagnol et portugais).
[14] Dracius, Suzanne. « Prolégomènes », dans Suzanne Dracius (dir.), Pour Haïti, Fort-de-France, Desnel, 2010, p. 19.
[16] Mabanckou, Alain. « Haïti, un pays toujours debout », dans Suzanne Dracius (dir.), Pour Haïti, op. cit., p. 49.
[17] Métellus, Jean. « Haïti, toujours », dans Suzanne Dracius (dir.), Pour Haïti, op. cit., p. 52.
[18] Condé, Maryse. « Haïti et l’Afrique », dans Suzanne Dracius (dir.), Pour Haïti, op. cit., p. 59.
[19] Noël, James. « Quelques mots lâchés en catastrophe », dans Le Serpent à plumes pour Haïti (s.n.), Paris, Le Serpent à plumes, 2010, p. 125.
[20] Ouvrage publié aux États-Unis auquel ont participé seize auteurs haïtiens qui habitent en Haïti ou à l’extérieur du pays. Ce collectif, comme l’indique son titre, rassemble des textes écrits en trois langues : français, créole haïtien et anglais. Un ouvrage similaire est Ainsi parla la terre Tè a pale So Spoke the Earth, publié en Floride en 2012 par l’organisation littéraire « Women Writers of Haitian Descent » qui soutient les auteures étasuniennes d’origine haïtienne. Ce recueil de témoignages, poèmes et textes de fiction en trois langues anglais, français, créole haïtien était en préparation avant le séisme, mais il a changé son orientation après l’événement, incluant aussi des textes écrits par des hommes et par des écrivains provenant du monde entier.
[21] « […] a new layer of Haitian trauma literature ». Anny Dominique Curtius dans Beaudelaine Pierre, Nataša Ďurovičová (eds.), How to Write an Earthquake Comment écrire et quoi écrire Mo pou 12 janvie, Iowa City, Autumn Hill Books, 2012 [quatrième de couverture].
[22] Pierre, Beaudelaine. « Préface », dans Beaudelaine Pierre, Nataša Ďurovičová (eds.), How to Write an Earthquake Comment écrire et quoi écrire Mo pou 12 janvie, op. cit., p. 1.
[23] Cf. Vitiello, Joëlle, « Introduction », dans Beaudelaine Pierre, Nataša Ďurovičová (eds.), How to Write an Earthquake Comment écrire et quoi écrire Mo pou 12 janvie, op. cit., p. 3.
[24] « Nous qui connaissons et aimons Haïti, nous avons beaucoup souffert et parfois nous avons éprouvé du chagrin, car c’est un pays que l’on remarque seulement quand il est à genoux ». Edwidge Danticat, « Haiti : Bloodied, Shaken and Beloved » dans Beaudelaine Pierre, Nataša Ďurovičová (eds.), How to Write an Earthquake Comment écrire et quoi écrire Mo pou 12 janvie, op. cit., p. 15 [nous traduisons].
[25] Cf. Pierre, Beaudelaine, « Port-au-Prince se lèvera », dans Beaudelaine Pierre, Nataša Ďurovičová (eds.), How to Write an Earthquake Comment écrire et quoi écrire Mo pou 12 janvie, op. cit., p. 56.
[26] Lahens, Yanick. « Comment écrire et quoi écrire ? » dans Beaudelaine Pierre, Nataša Ďurovičová (eds.), How to Write an Earthquake Comment écrire et quoi écrire Mo pou 12 janvie, op. cit., p. 25.
[27] Ouvrage coédité par Actes Sud et Le Point, publié en France, qui rassemble les contributions inédites de vingt-cinq auteurs haïtiens et français (de France, Martinique et Guadeloupe).
[28] Marin La Meslée, Valérie. « Avant-propos. Le “moment Haïti” et l’après », Haïti parmi les vivants (s.n.), Arles, Actes sud / Paris, Le Point, 2010, p. 9.
[29] Texte qui sera repris par Laferrière dans son témoignage Tout bouge autour de moi, publié en 2010.
[30] Trouillot, Lyonel. « Avant-propos », dans Haïti parmi les vivants (s.n.), op. cit., p. 53.
[31] Cavé, Syto. « Ma place parmi les vivants », dans Haïti parmi les vivants (s.n.), op. cit., p. 77.
[32] Prophète, Emmelie. « Je Te cherche », dans Haïti parmi les vivants (s.n.), op. cit., p. 141.
[33] Numéro de la revue Riveneuve Continents consacré à Haïti, publié en France métropolitaine en 2011, qui rassemble les contributions de vingt-quatre auteurs au sujet du séisme (plus une section « libre cours »), en français et anglais, entrecoupées d’extraits de chansons en créole haïtien, traduits en français.
[34] Trouillot, Lyonel. « Écrire pour Haïti : L’invention du prochain », Haïti le désastre et les rêves (s.n.), Riveneuve Continents, no 13, 2011, p. 13.
[35] Klang, Gary. « Haïti, ou Œdipe sous les Tropiques », Haïti le désastre et les rêves (s.n.), op. cit., p. 43. « OEA » est un sigle qui désigne l’« Organisation des États Américains ».
[36] Tshitungu Kongolo, Antoine. « La proue des Caraïbes », Haïti le désastre et les rêves (s.n.), op. cit., p. 110.
[38] Ce collectif publié en Angleterre comprend les contributions de vingt auteurs haïtiens, français et étasuniens.
[39] Cf. Spear, Thomas C., « Point of View », dans Martin Munro (ed.), Haiti Rising: Haitian History, Culture and the Earthquake of 2010, op. cit., p. 39.
[40] Cf. Wagner, Laura, « Salvaging » dans Martin Munro (ed.), Haiti Rising : Haitian History, Culture and the Earthquake of 2010, op. cit., p. 22.
[41] « […] the Hollywood disaster movie presented by the TV channels ». Le Bris, Michel, « Finding the Words », dans Martin Munro (ed.), Haiti Rising : Haitian History, Culture and the Earthquake of 2010, op. cit., p. 30.
[42] Cf. Le Bris, Michel, « Finding the Words », dans Martin Munro (ed.), Haiti Rising: Haitian History, Culture and the Earthquake of 2010, op. cit., p. 32.
[43] « Chaque fois que je parle de ces seconds-là, cela réveille en moi le même sentiment d’une douleur indicible, car ce n’est pas seulement ma douleur ; elle appartient à un peuple entier. Chaque mot est accablé de fissures et trébuchements qui évoquent toutes ces vies détruites. Quand je pose mon regard sur un quartier dévasté, sur des rues qui maintenant existent seulement dans nos souvenirs, je les imagine remplies de ces personnes qui sont parties en moins d’une minute, tout simplement, parfois avec le seul bruit des murs brisés et du métal tordu ». Évelyne Trouillot, « Eternity Lasted Less than Sixty Seconds... » dans Martin Munro (ed.), Haiti Rising: Haitian History, Culture and the Earthquake of 2010, op. cit., p. 59 [nous traduisons].
[44] Cf. Danticat, Edwidge, « Noir, assurément », dans Edwidge Danticat (dir.), Haïti noir, Paris, Asphalte Éditions, [2010] 2012 (traduit de l’anglais par Patricia Barbe-Girault), p. 13.
[45] Voir Montas-Dominique, Michèle, « Sim pa rele (If I don’t shout) », dans Paul Farmer, Haiti After the Earthquake, op. cit., p. 271-284. Les mêmes thèmes sont abordés par la chercheure haïtiano-américaine Gina Athena Ulysse dans Why Haiti Needs New Narratives. A Post-Quake Chronicle où elle s’interroge sur le discours dominant sur Haïti et met en question les idées véhiculées par les experts, les médias et les dirigeants des ONG pour affirmer qu’« Haïti a besoin de nouveaux discours », comme le dit le titre de l’ouvrage. Voir Ulysse, Gina Athena, Why Haiti Needs New Narratives. A Post-Quake Chronicle, Middletown, Wesleyan University Press, 2015.
[46] Chaudenson, Robert. « Goudou Goudou ». Haïti : une année de terreurs, d’erreurs et de rumeurs, Paris, L’Harmattan, 2010, p. 7-8.
[49] Voir Bougerol, Christiane, « Une rumeur à la Guadeloupe. De certaines pratiques supposées des Haïtiens », Terrain, n° 54, 2010, p. 130-139 ; Delva, Maguet, « Guadeloupe : La chasse aux Haïtiens s’organise », AlterPresse, 1er août 2006, en ligne : [URL], consulté le 29 novembre 2020, et Reno, Fred, « L’immigrant haïtien entre persécutions et xénophobie », Hommes et Migrations, no 1274, 2008, p. 132 - 142.
[50] Les auteurs cités par Munro sont Edwidge Danticat, Rodney Saint-Éloi, Yanick Lahens, Gary Victor et Dany Laferrière. Cf. Martin Munro, Writing on the Fault Line. Haitian Literature and the Earthquake of 2010, op. cit., p. 22.
[51] « Unofficial spokeperson for her country of birth ». Martin Munro, Writing on the Fault Line. Haitian Literature and the Earthquake of 2010, op. cit., p. 25.
[52] Danticat, Edwidge. Créer dangereusement. L’artiste immigrant à l’œuvre, Paris, Éditions Grasset & Fasquelle, [2010] 2012 (traduit de l’anglais par Simone Arous), p. 187.
[55] Le titre même de l’ouvrage, Create Dangerously, est tiré d’une conférence prononcée par Camus en 1957.
[56] Danticat, Edwidge. Créer dangereusement. L’artiste immigrant à l’œuvre, op. cit., p. 191.
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