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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Une édition électronique réalisée à partir du texte de Rodrigue Landry et Réal Allard, “L’éducation dans la francophonie minoritaire.” In ouvrage sous la direction de Joseph-Yvon THÉRIAULT, Francophonies minoritaires au Canada. L’état des lieux. Chapitre 19, pp. 403-434. Moncton, N.-B.: Les Éditions d’Acadie, 1999, 578 pp. [Joseph-Yvon Thériault nous a accordé le 29 juillet 2017 l’autorisation de diffuser en libre accès à tous ce livre dans Les Classiques des sciences sociales. Le 19 mars 2022, Rodrigue Landry nous confirmait son autorisation pour la diffusion en tiré à part du chapitre 19 de ce livre.]

[403]

Francophonies minoritaires au Canada.
L’état des lieux.
Cinquième partie : l’éducation
Chapitre 19

L’éducation dans
la francophonie minoritaire
.”

par

RODRIGUE LANDRY et RÉAL ALLARD,
Université de Moncton

Introduction [403]

La minorité linguistique et l’éducation [404]

La minorité linguistique [404]
L’éducation en milieu minoritaire [406]

L’éducation en français et la vitalité de la francophonie minoritaire [409]

Pourquoi l’éducation en français : quelques prémisses [410]

La pédagogie en milieu minoritaire : un projet communautaire [420]

Conclusion [423]

Bibliographie [424]

Introduction

Les communautés francophones du Canada ont mené de nombreuses luttes qui ont graduellement incité la plupart des provinces à opter pour une variété de modèles et de lois permettant une gestion de l'éducation en français par les francophones (Martel, 1991 ; Bastarache, 1995 ; Ducharme, 1996 ; Foucher, 1985 ; Tardif, 1991). Nous n'en tracerons pas ici l'histoire ni l'évolution ; nous proposons plutôt une vue d'ensemble de l'éducation en français en milieu minoritaire au Canada. Après l'acquisition « au compte- gouttes » de droits scolaires et l’adoption de la Charte canadienne des droits et libertés (particulièrement l'article 23 qui a ouvert la voie à une gestion autonome du système scolaire), les préoccupations des communautés francophones passent graduellement vers un « développement global de l'éducation » (Cardinal, Lapointe et Thériault, 1994 ; Lapierre, 1988). Les soucis transcendent ceux reliés aux droits scolaires et au contrôle de la gestion scolaire. On se préoccupe d’éducation préscolaire (Baulu-MacWillie, 1994), d'alphabétisation (Wagner, 1990a, 1990b, 1992), d'éducation postsecondaire (Bernard, 1992 ; Tardif et McMahon, 1989), de formation des maîtres (Bordeleau, 1993 ; McMahon, 1996 ; Gérin- Lajoie, 1993 ; Masny, 1996 ; Tardif, 1993), d'éducation à distance et du besoin d'une inforoute francophone (Le Scouarnec, 1995). Ces préoccupations « annoncent une démarche d'autonomie plus globale » posée à la fois en termes collectifs et individuels (Cardinal, Lapointe et Thériault, 1994, p. 41). Notre analyse portera donc sur l'importance de l'éducation en français pour les communautés francophones minoritaires, et son rôle essentiel dans la survie et l'émancipation de la langue et de la culture françaises dans les provinces où les francophones sont minoritaires au Canada.

On ne peut pas comprendre l'impact potentiel d’un système d'éducation en milieu minoritaire sans le situer dans le contexte plus global d'une société. De nos jours, il est même restrictif de parler de société, puisque la mondialisation des rapports sociaux et des échanges économiques a pour effet d'augmenter les forces hégémoniques des grandes puissances culturelles et économiques et de favoriser l'interpénétration des cultures. Notre analyse de l'éducation des minorités francophones se fera donc à partir d'un cadre théorique global ayant pour fondement le concept de vitalité ethnolinguistique (Giles, Bourhis et Taylor, 1977 ; Harwood, Giles et Bourhis, 1994 ; Landry et Allard, 1994a, 1996). La vitalité ethnolinguistique se définit comme étant les facteurs structuraux et sociologiques qui influencent la survie et le développement d'une minorité linguistique. Une forte vitalité ethnolinguistique assure que la communauté ethnolinguistique et culturelle demeurera une entité distincte et active, alors qu'une vitalité ethnolinguistique faible est associée à l'assimilation linguistique et culturelle.

[405]

Le système d'éducation est un élément essentiel de la vitalité ethnolinguistique des minorités francophones au Canada. C’est parfois la seule institution où l'utilisation du français prédomine. Est-ce suffisant pour garantir à long terme la survie de la langue française dans ces communautés ? Le Nouveau-Brunswick excepté, le taux d'assimilation des francophones est déjà très élevé dans les provinces canadiennes à l'extérieur du Québec (Bernard 1990a), et le pouvoir d'attraction de la langue anglaise se fait de plus en plus menaçant. Certains considèrent que le Québec, la seule province où les francophones sont majoritaires (82%) mais ne représentent à peine que 2% de la population de l'Amérique du Nord, est « la dernière enclave territoriale dans laquelle une société francophone distincte a des chances de survivre dans le contexte nord-américain » (Lepicq et Bourhis, 1995, p. 109-110). Devant une telle hypothèse, est-ce une utopie de tenter d'assurer la survie des minorités francophones hors Québec ? Est-ce trop demander au système d'éducation d'être le principal agent de socialisation à la culture et à la langue des ancêtres francophones ?

Nous tentons dans ce chapitre de cerner l'étendue de l'influence possible de l'éducation sur le vécu langagier des membres d'une communauté minoritaire. Nous y présentons l'éducation comme source indéniable de vitalité ethnolinguistique, mais qui possède des limites inhérentes, puisque la langue est omniprésente dans toutes les sphères de la vie quotidienne. Le chapitre se divise en trois parties. Dans la première, nous situons la problématique de l'éducation des minorités francophones dans le cadre plus global de l'éducation en milieu minoritaire. Cette partie débute par une définition du concept de minorité linguistique, ce qui nous amène à évaluer si toutes les communautés francophones qui revendiquent le droit à l'éducation en français possèdent les éléments essentiels pour constituer une véritable communauté linguistique. Nous distinguons entre un modèle d’éducation pour les francophones minoritaires et d'autres modèles d'éducation bilingue afin de démontrer à quel point leurs objectifs et leurs modalités de mise en œuvre peuvent être très différents. Dans la deuxième partie, nous traitons plus directement de l'éducation en français et de la vitalité de la francophonie minoritaire au Canada. Nous proposons un certain nombre de positions fondées sur les recherches sur l'éducation en milieu minoritaire. Ces positions constituent des assises et des balises permettant de concevoir les modèles éducatifs et les ressources essentielles à un système d'éducation qui contribue véritablement à la survivance culturelle et linguistique d’une minorité. Dans la troisième et dernière partie du chapitre, nous formulons quelques recommandations ayant trait au rôle de l'éducation et aux modèles éducatifs qui devront être adoptés pour que l'éducation en français devienne un véritable projet communautaire.

La minorité linguistique et l’éducation

Avant de situer les bases de l'éducation des francophones en milieu minoritaire, il importe de définir ce que l'on entend par minorité linguistique et par éducation en milieu minoritaire. De fait, les écrits sur l'éducation bilingue et l'éducation en milieu minoritaire ne font pas toujours justice aux minorités francophones du Canada dont les droits reconnus à l’éducation sont plus considérables que ceux encore revendiqués par la plupart des minorités linguistiques d'autres pays.

La minorité linguistique

Allardt (1984) propose quatre critères généralement acceptés par les chercheurs pour définir une minorité linguistique : une langue différente, une descendance commune, l’existence de traits distincts et une organisation sociale.

Une collectivité de personnes est reconnue comme parlant une langue différente de celle [405] du groupe dominant, ou une langue reconnue comme distincte de celles d'autres groupes habitant un territoire. Il est possible que beaucoup de membres du groupe ne parlent plus la langue minoritaire.

Les membres du groupe minoritaire qui parlent une langue différente reconnaissent avoir des ancêtres communs qui partageaient leur langue et qui avaient une culture commune. Ce critère, même s'il ne s'applique pas à chaque individu qui s'identifie au groupe, est une condition reconnue par le groupe dans son ensemble.

En plus d’une langue, les membres de la minorité linguistique partagent des traits communs. Il peut s'agir de particularités sociales et politiques vécues dans le passé par les ancêtres et qui habitent l'imaginaire collectif du groupe. En raison de cette histoire commune, le groupe peut conserver des traditions, des coutumes, des valeurs sociales et religieuses et des traits culturels distincts reliés à l'habillement, à la nutrition et à la cuisine, aux métiers, à l'art, à la littérature ou à tout autre mode d'expression culturelle.

Par ailleurs, une forme quelconque d'organisation sociale est requise pour conserver la cohésion du groupe et régulariser les interactions avec les autres groupes. C'est l'organisation sociale qui permet au groupe de maintenir les frontières ethniques, linguistiques et culturelles (Barth, 1969) nécessaires à la survie du groupe. Sans une certaine « complétude institutionnelle » (Breton, 1964), le groupe aura tendance à perdre sa cohésion, à s'effriter dans ses rapports sociaux et à s'intégrer aux valeurs culturelles, aux coutumes et à la langue du groupe social dominant.

À la lumière de ces quatre critères, les minorités francophones de l'extérieur du Québec constituent-elles de véritables communautés linguistiques ? Il y a peu de doute dans l'esprit des membres de ces minorités que la langue française est une langue différente, distincte et bien vivante à l’échelle internationale. Cela est d'autant plus accepté par la majorité anglophone et par les membres d’autres minorités linguistiques. Heureusement, la langue française jouit d'un prestige social et historique indéniable même si celui-ci pâlit devant le pouvoir d'attraction et l'hégémonie économique de la langue anglaise en Amérique du Nord et à l’échelle mondiale. Au Canada, le statut de la langue française ne fait aucun doute, puisque c'est une des deux langues officielles du pays, la seule langue officielle du Québec qui regroupe près du quart des habitants du pays, et une des deux langues officielles du Nouveau-Brunswick.

En général, les membres des minorités francophones canadiennes n'ont pas non plus de difficulté à reconnaître une descendance commune. C'est sûrement le cas chez les Acadiens des provinces Maritimes qui sont fiers d'affirmer qu'ils étaient les premiers Européens à établir une colonie en Amérique du Nord. Les francophones minoritaires de l'Ontario et de l’Ouest canadien peuvent généralement retracer leur origine canadienne-française et raconter le périple des premiers colons qui sont venus défricher et habiter leurs terres. À Terre-Neuve, même si les francophones sont d'origines diverses (Magord, 1995 ; Landry et Magord, 1992), les circonstances historiques qui ont amené Français, Acadiens et autres Canadiens français à se côtoyer et à s'établir sur la côte ouest sont assez bien connues de la population. Là où il est plus difficile d'établir une descendance commune chez les francophones, c'est dans les grandes cités de plus en plus pluriethniques comme Toronto (Heller, 1984, 1994) et Vancouver (Savas, 1988 ; Payrastre et Tellier, 1993). Ce sont parfois des francophones, voire des francophiles, d'origines multiples, qui ont à se regrouper pour revendiquer le droit à l’éducation en français.

Moins la descendance est commune, plus il est difficile de cerner le troisième critère, c'est-à-dire de discerner chez les francophones minoritaires des traits culturels et historiques distincts. Même les francophones qui partagent certains ancêtres et qui ont conservé des coutumes et des traits culturels communs ont de plus en plus de difficulté à définir leur spécificité culturelle. L'exogamie qui [406] devient de plus en plus fréquente (Bédard, 1993; Bernard, 1994 ; Commission nationale des parents francophones, 1994 ; Lachapelle, 1994 ; Paillé, 1991, 1995), l'hégémonie culturelle exercée par les médias à dominance anglo-américaine (Mattelart, 1996), et le caractère envahissant du paysage linguistique anglophone constitué par l'affichage public et commercial (Landry et Bourhis, 1997) contribuent non seulement à l'assimilation linguistique, mais à une acculturation homogénéisante. Cette marée culturelle médiatique en provenance des États-Unis est tellement envahissante qu’il nous arrive même d'entendre des anglophones canadiens qui craignent de perdre à tout jamais leur spécificité culturelle canadienne. Ces derniers peuvent envier les Québécois et les francophones hors Québec d'avoir au moins une langue distincte qui les dissocie des Étatsuniens, mais même au Québec, le château fort de la langue française en Amérique du Nord, l'attraction médiatique de la langue anglaise et de la culture anglo-américaine fait des percées importantes (Landry, Allard et Bourhis, 1997 ; Locher, 1993).

Ces constatations reliées aux spécificités linguistiques et culturelles des minorités francophones nous amènent à apprécier l'importance du quatrième critère définissant une minorité linguistique. Celui-ci est d’une importance capitale, puisqu'il vient en quelque sorte fermer la boucle. L'organisation sociale est un critère englobant, car elle devient garante de la vitalité de la minorité ethnolinguistique, et permet aux trois premiers critères reliés à la spécificité de la communauté de se maintenir. En effet, sans les institutions qui légitiment et stabilisent le vécu langagier et culturel des membres d'une minorité (Allardt, 1984 ; Bourdieu, 1982 ; Bernard, 1990b ; Breton, 1964 ; Giles, Bourhis et Taylor, 1977), il devient impossible d'assurer la véritable « vie communautaire » (Fishman, 1989, 1990) essentielle au maintien d'une langue et d'une culture. Privée de cette vie communautaire, une langue n'est plus viable. En d'autres mots, sans le contrôle d'une certaine organisation sociale, toute minorité linguistique - même celle pour laquelle on reconnaît pleinement les trois premiers critères justifiant son existence - peut en bout de ligne cesser d'exister comme entité distincte et active.

Nous analyserons dans la prochaine partie de ce chapitre le rôle de différentes institutions communautaires et éducatives associées à la survie et à l’émancipation des communautés francophones minoritaires, mais auparavant, nous tenterons de définir clairement ce qu'est l'éducation en milieu minoritaire pour les communautés francophones canadiennes. Les écrits sur l’éducation en milieu minoritaire ou sur l'éducation bilingue ne permettent pas toujours de bien définir la nature et la portée sociale propres à l'éducation des minorités francophones dans le contexte sociopolitique canadien. Pour comprendre les différents modèles d'éducation en milieu minoritaire et circonscrire le modèle le plus approprié pour les francophones dans le contexte canadien, il importe de considérer un certain nombre de ces modèles et de les situer dans le contexte sociopolitique de la société où habite la minorité. Les facteurs les plus limitatifs en ce qui concerne l'implantation d'un modèle éducatif approprié aux aspirations d'une minorité sont souvent de nature idéologique et relèvent des pratiques reliées à l'acculturation de ces minorités.

L’éducation en milieu minoritaire

L'éducation des minorités a souvent été présentée et analysée comme une forme quelconque d'éducation bilingue. De fait, sauf pour quelques rares cas où elle est dominante sur le territoire habité, la minorité linguistique, pour des raisons sociopolitiques ou de mobilité sociale, se doit d'apprendre la langue du groupe dominant.

Les modèles d'éducation bilingue peuvent être très variés en raison des nombreuses variables qui interagissent (Mackey, 1970). Néanmoins, le motif déterminant dans le choix d'un modèle particulier est l'objectif d’intégration sociale poursuivi par le groupe [407] dominant dans la société (Baker, 1993 ; Bibeau, 1982 ; Paulston, 1988). Selon Baker (1993), il existe une dizaine de modèles d'éducation bilingue. Il prend en considération l'objectif d'intégration sociale visé et le statut majoritaire ou minoritaire des groupes linguistiques. Si la société fonde ses politiques sociales sur les valeurs et les normes du groupe ethnolinguistique dominant, l'objectif est souvent l'assimilation des minorités linguistiques, et les modèles d'éducation sont choisis en conséquence (Bourhis, Moïse, Perreault et Sénécal, 1997). Par exemple, dans le modèle de submersion, l'enfant parlant une langue minoritaire est submergé dans une classe où l'unique langue d'enseignement est celle du groupe dominant. Cette approche, que les auteurs anglophones ont parfois appelée sink or swim, a permis à certains groupes ethnolinguistiques - ceux-ci étant constitués surtout d’immigrants - de bien s'intégrer dans la société d'accueil. Mais ce type d’enseignement d'une langue seconde produit presque inévitablement un bilinguisme de type soustractif, c'est-à-dire que le contact avec la langue seconde a pour effet de contribuer à la perte de la langue première (Lambert, 1975).

La politique sociale du groupe dominant peut parfois être ségrégationniste plutôt qu'assimilatrice (Skutnabb-Kangas, 1983). L'éducation se fait alors dans la langue de la minorité. Le groupe dominant préfère cette pratique, puisque l'objectif est de limiter au minimum les contacts sociaux entre les groupes et, surtout, de restreindre l'accès de la minorité à la langue du pouvoir et de la mobilité sociale. Il s'agit alors d'une pratique qui favorise l'apartheid (Baker, 1993).

D'autres types d'éducation bilingue viseront à favoriser l'assimilation du groupe minoritaire en faisant appel à des approches qui permettent une « transition » graduelle de la langue première vers la langue seconde (Fishman, 1976). Par exemple, on offrira des cours supplémentaires dans la langue du groupe dominant afin de faciliter l'intégration des élèves qui sont submergés dans des classes où la majorité des élèves sont du groupe dominant. Certains modèles d'éducation bilingue permettent l'enseignement dans la langue du groupe minoritaire au début de la scolarisation, mais ils ont néanmoins comme objectif ultime de faciliter une meilleure intégration au groupe dominant. Ce modèle d’éducation bilingue est largement utilisé aux États-Unis (Hakuta, 1986 ; Cummins, 1986, 1989 ; Bibeau, 1982 ; Baker, 1993) et vise explicitement l'assimilation en douceur des minorités linguistiques. Lyons (1995) note que plus d'un enfant sur cinq aux États-Unis est déjà compétent dans une langue autre que l’anglais dès l’entrée scolaire, et que ce degré de compétence est souvent plus élevé que celui atteint par des adultes inscrits à des programmes de langue seconde très coûteux. Les politiques assimilatrices en vigueur ont pour effet de favoriser la perte de la langue maternelle chez ces enfants, sans pour autant toujours réussir à développer un haut niveau d'alphabétisation en anglais.

Certains modèles d'éducation bilingue chercheront à favoriser le maintien ou l'enrichissement de la langue première des groupes minoritaires (Fishman, 1976). Ces programmes ont en commun un degré élevé d’enseignement dans la langue première (de 80% à 100%), et la langue du groupe dominant est apprise comme langue seconde (Baker, 1993). Plusieurs protagonistes de l'éducation bilingue aux États-Unis proposent cette approche sous une forme ou une autre (Hakuta, 1986 ; Ruiz, 1988), en octroyant parfois certains pouvoirs au groupe minoritaire (Cummins, 1989). On retrouve la plupart de ces programmes d'enseignement au niveau primaire (Baker, 1993). Au niveau secondaire, on semble choisir la langue du groupe dominant dans le but de favoriser l'accès aux études postsecondaires et une meilleure mobilité sociale. Selon Baker (1993), un modèle où la minorité est scolarisée dans sa langue maternelle et où il y a peu d'efforts visant l'apprentissage de la langue du groupe dominant est un modèle qui favorise le séparatisme.

[408]

Finalement, certaines approches à l'éducation bilingue sont conçues en fonction des besoins d'un groupe majoritaire ou dominant qui est en présence d'une langue minoritaire ou d'un groupe minoritaire important. Ces modèles varient grandement : de programmes prévoyant l'addition de quelques heures d'enseignement en langue seconde jusqu'aux programmes d’immersion totale en langue seconde, en passant par les programmes d'immersion bilingue à deux voies (two-way / dual language). Dans ces derniers, les élèves minoritaires et les élèves majoritaires partagent la même classe, et l’enseignement se fait dans la langue minoritaire à environ 50% du temps et dans la langue majoritaire dans une proportion semblable. Dans certains de ces modèles, l'enseignement dans la langue minoritaire peut même atteindre une proportion de 90% (Christian, 1996). La prémisse est que ce type de programme permet au groupe minoritaire de maintenir la langue maternelle et favorise le bilinguisme chez le groupe dominant. Comme l'ont démontré de nombreuses études canadiennes (Lambert et Tucker, 1972 ; Swain et Lapkin, 1982, 1991 ; Genesee, 1987, 1991 ; Cummins et Swain, 1986), les programmes d'immersion favorisent, chez les élèves du groupe majoritaire, le développement d'un bilinguisme de type additif, c'est-à-dire l'addition d'une langue seconde, sans que cela n'occasionne de pertes sur le plan de la langue maternelle. Mais des chercheurs américains mettent en doute les bénéfices à long terme du modèle d'éducation bilingue à deux voies pour le groupe minoritaire (Valdes, 1997).

Lequel des modèles d'éducation bilingue brièvement présentés ci-dessus répond le mieux aux besoins de la francophonie minoritaire canadienne ? À notre avis, aucun de ceux-ci ne correspond pleinement aux droits et aux aspirations des francophones minoritaires dans le contexte sociopolitique canadien. La plupart de ces modèles d'éducation bilingue furent conceptualisés dans la perspective de contextes sociaux qui favorisent la reproduction des valeurs sociales et linguistiques des groupes dominants (Cummins, 1989, 1994 ; Martel et Villeneuve, 1995 ; Skutnabb-Kangas et Cummins, 1988 ; Valdes, 1997). De plus, les modèles d'éducation bilingue font souvent preuve de « naïveté sociale » (Landry et Allard, 1993). Les chercheurs qui œuvrent en éducation bilingue considèrent et analysent les variables d'ordre pédagogique et linguistique. Cependant, leurs choix éducatifs sont peu modelés sur le vécu langagier des élèves à l’extérieur de l'école et les différences dans la vitalité ethnolinguistique des communautés. Pour que l'éducation des minorités soit conceptualisée en fonction des besoins du groupe minoritaire, le paradigme socioculturel de la société doit être modifié de telle sorte que le modèle d'acculturation en vigueur favorise l'intégration plutôt que l'assimilation (Berry, 1984 ; Bourhis, Moïse, Perreault et Sénécal, 1997). L'idéologie assimilatrice assume que tôt ou tard le groupe minoritaire s'appropriera les valeurs de l'État-nation en abandonnant sa culture et sa langue qui le distinguent du groupe dominant. Une idéologie pluraliste est essentielle pour que les valeurs culturelles de groupes distincts puissent cohabiter sur un territoire. Cette idéologie, qui favorise en principe l'intégration - l'adoption de valeurs compatibles avec celles de l'État-nation sans abandonner la culture et la langue qui permettent au groupe de demeurer une entité active et distincte -, ne peut être actualisée que si l'État-nation permet au groupe minoritaire de conserver ou de se donner les institutions et les ressources culturelles nécessaires à l'affirmation et à l'épanouissement de son autonomie culturelle. La plupart des minorités linguistiques n'ont pas accès à la « complétude institutionnelle » (Breton, 1964) nécessaire à une véritable autonomie culturelle. Une très grande partie des langues et des cultures qui ont façonné notre planète sont appelées à disparaître (Leclerc, 1986), parce qu'elles n'ont pas eu accès aux institutions qui leur auraient permis de prendre en charge leur destinée et de transmettre aux générations futures les valeurs et l'héritage culturel des ancêtres. Est-ce [409] le sort réservé aux minorités francophones habitant le territoire canadien ? Dans la prochaine partie, nous développons un certain nombre de prémisses fondées sur la recherche, dans le but de construire une logique et une logistique de l'éducation des minorités francophones au Canada.

L’éducation en français et la vitalité
de la francophonie minoritaire


Avant l’établissement de la Confédération canadienne en 1867, différentes communautés francophones s'étaient pourvues de certains services éducatifs rudimentaires, puisque ceux-ci étaient « dispensés, financés et gérés localement par les membres de la communauté, de concert avec les autorités religieuses » (Martel, 1993, p. 736). Malgré la précarité des moyens, la communauté exerçait donc à cette époque une certaine autonomie en matière d'éducation. Cette autonomie s'est graduellement effritée lorsque, à la suite de la Confédération, les gouvernements provinciaux furent dotés d'un pouvoir exclusif sur les écoles publiques. Les mesures adoptées favorisent alors « principalement l'établissement d'une culture publique commune de langue anglaise et, conséquemment, l'assimilation des minorités, dont la francophone » (Martel, 1993, p. 736).

À l’idéologie assimilatrice de la majorité anglophone, un peu partout au pays, les minorités francophones opposèrent « leur propre idéologie de conservation de leur langue et de leur culture » (Martel, 1993, p. 737). Elles fondèrent des associations canadiennes-françaises pour mieux revendiquer l'accès à l'enseignement en français, et mirent sur pied des institutions d'enseignement privées, fondées et dirigées surtout par des communautés religieuses. Les provinces effectuèrent peu à peu des changements législatifs offrant un accès limité à l'enseignement en français. Un changement idéologique important s'amorça lorsque le gouvernement fédéral reconnut la dualité linguistique du pays, en 1969, en adoptant la Loi sur les langues officielles. C'est alors qu'une vision nationale de l'éducation des minorités officielles (l'anglais au Québec et le français dans les autres provinces) s’installe au pays et donne accès à de nouveaux droits scolaires enchâssés dans l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés (1982).

Les droits scolaires conférés par la Charte sont fondamentaux et viennent appuyer l'argument voulant que l'éducation des minorités francophones du Canada est foncièrement différente de celle des minorités linguistiques dont font état la plupart des recherches et des écrits en éducation bilingue. Les modèles d'éducation des minorités linguistiques brièvement présentés ci-haut attribuent en principe un statut de deuxième ordre aux minorités considérées. Ceux-ci reconnaissent implicitement la légitimité de la supériorité du groupe dominant. Les modèles d'éducation des minorités linguistiques qui reconnaissent explicitement le statut d'égalité de la minorité et du groupe dominant avec lequel elle est en contact sont extrêmement rares.

On ne peut nier que les minorités francophones du Canada ont beaucoup de similarités avec les nombreuses autres minorités ethnolinguistiques qui revendiquent les droits à la scolarisation dans leur langue. Sur le plan du vécu socioculturel en particulier, les réalités du bilinguisme soustractif et de l'assimilation sont partagées par de très nombreuses minorités à l'échelle mondiale (Fishman, 1989). Là où la minorité francophone du Canada se distingue et est jusqu'à un certain point privilégiée, c'est dans sa position avantageuse sur le plan juridique. C'est un contexte qui favorise une idéologie dualiste et qui reconnaît l'égalité de la langue française et de la langue anglaise, toutes deux langues officielles dans les institutions fédérales au Canada. Cette conjoncture entretient, au moins dans le discours, un idéal de parité entre deux peuples fondateurs, et interpose dans le domaine de juridiction provinciale qu’est l'éducation une responsabilité au gouvernement fédéral de protéger, à l'échelle nationale, [410] les droits de la minorité (Martel, 1993). La Charte permet aux francophones des provinces à majorité anglophone de revendiquer au moins les mêmes services éducatifs que ceux déjà offerts par le Québec à sa minorité anglophone. Cette dernière jouit effectivement d'une position très avantageuse, puisqu'elle détient un haut degré de complétude institutionnelle, particulièrement dans le domaine de l'éducation (Caldwell, 1994 ; Ducharme, 1996).

Si les droits conférés permettent de viser à long terme un certain idéal dans la gestion des systèmes d'éducation par les minorités, on ne peut ignorer les réalités sociopolitiques et socioculturelles vécues par les francophones à l'échelle provinciale et dans leurs communautés. L'idéologie assimilatrice de la majorité anglophone persiste et ne se modifie que très lentement, les changements positifs étant plus souvent dictés par les tribunaux que par la bonne volonté des gouvernements.

Ce préambule a brièvement fait état du contexte sociojuridique des aspirations possibles des minorités francophones en matière d’éducation. L'éducation en français est désormais un droit que la communauté se doit de prendre en charge, bien qu'il relève de la compétence provinciale et qu'il comporte des obligations et des responsabilités imposées à l'échelle nationale. Dans la seconde partie de cette section, nous formulons un certain nombre de prémisses pouvant constituer les bases d'une conceptualisation du rôle de l'éducation pour les minorités francophones canadiennes.

Pourquoi l’éducation en français :
quelques prémisses


Ce serait simple si la survivance d'une minorité linguistique et son épanouissement pouvaient faire l'objet d'une loi ou encore être complètement assurés par le système d'éducation. Dans les pages suivantes, nous proposons un certain nombre de prémisses qui, dans l'ensemble, situent les conditions requises pour que l'éducation en milieu francophone minoritaire contribue au développement des identités personnelles et collectives nécessaires au maintien de communautés francophones vivantes et distinctes.

L'identité francophone, comme toute identité sociale, est le produit d'un processus de socialisation. Les chercheurs s'entendent pour reconnaître que toute identité sociale, y compris l'identité ethnolinguistique, est le produit d'un processus de socialisation (Erikson, 1972 ; Gohier et Schleifer, 1993 ; Tajfel, 1974). Le vécu langagier et culturel de l'enfant sera un facteur déterminant de son identité ethnolinguistique. On ne naît pas francophone, on le devient. L'enfant qui aura vécu une ambiance culturelle et linguistique française dans son milieu familial et dans son milieu social affirmera naturellement son identité francophone. L'enfant qui aura vécu des contacts fréquents avec deux groupes linguistiques, surtout si ceux-ci sont vécus dans des contextes d’intimité et de solidarité, pourra afficher une identité mixte. Par exemple, beaucoup de jeunes francophones dans l'Ouest canadien préfèrent afficher une identité bilingue plutôt qu'une identité francophone ou anglophone (Landry, Allard et Théberge, 1991). Les jeunes francophones qui n'ont pas eu l'occasion de vivre dans un milieu social francophone et d'être scolarisés dans leur langue pourront assumer une identité sociale qui ne reflète que très faiblement ou pas du tout les liens ancestraux. C'est le cas chez beaucoup de jeunes du Maine et de la Louisiane, par exemple (Landry et Allard, 1992a ; Landry, Allard et Henry, 1996 ; Magord, Landry et Allard, 1994).

Le processus de socialisation menant au développement d'une identité francophone est tributaire de la vitalité ethnolinguistique du groupe. Giles, Bourhis et Taylor (1977) ont défini la vitalité ethnolinguistique comme étant les « facteurs structuraux qui permettent à une communauté linguistique de demeurer une entité active et distincte ». Ces facteurs peuvent être d'ordre démographique (reliés au nombre, à la proportion et à la distribution des membres de la communauté dans un territoire), [411] d'ordre institutionnel (degré de représentation et de pouvoir du groupe au sein d’institutions sociales) ou encore relever du statut (le prestige social du groupe, de sa langue et de sa culture à l'échelle régionale, nationale et internationale). D'autres chercheurs (Prujiner et al., 1984 ; Landry, 1982 ; Landry et Allard, 1990) définissent la vitalité ethnolinguistique comme étant le capital linguistique qu'une communauté peut cumuler en fonction de facteurs démographiques et de ressources institutionnelles dans les domaines politique, économique et culturel. Déjà au début des années 1960, Raymond Breton (1964) proposait que la survivance d'un groupe linguistique était reliée à son degré de complétude institutionnelle, c'est-à-dire à l'accès aux institutions requises pour créer une vie communautaire. Fishman (1989, 1990) insiste sur l'importance d'une vie communautaire pour assurer la transmission culturelle d'une génération à l'autre. Des recherches en Europe (Allardt, 1984 ; de Vries, 1984) concluent que les groupes linguistiques qui n'ont pas accès à certains pouvoirs institutionnels s’assimilent rapidement. Finalement, rappelons ici le quatrième critère de la définition d'une minorité linguistique décrit dans la première partie de ce chapitre, à savoir celui de l'organisation sociale (Allardt, 1984). Sans un minimum d'organisation sociale, la minorité n'existe pas.

Landry et Allard (1989, 1994a) ont clairement démontré, dans de nombreux contextes canadiens et américains, que le comportement langagier des francophones était très fortement relié à la vitalité ethnolinguistique des communautés. Plus la vitalité ethnolinguistique de la communauté francophone est faible, plus le comportement langagier des francophones ressemble à celui des anglophones. La relation observée est tellement forte que celle-ci fut décrite comme étant le résultat d'un « déterminisme social » (Landry, 1993 ; Landry et Allard, 1994c). Comme le démontre la figure I, plus la vitalité du groupe francophone est faible, plus les francophones utilisent l'anglais dans leurs activités quotidiennes, et plus l’anglais devient la langue d'usage au sein même de l'unité familiale.

La figure I démontre que l'assimilation ou l'anglicisation (l'usage exclusif de l'anglais au foyer familial) est un reflet direct de la vitalité du groupe. On note dans ce profil que chez les groupes à très forte vitalité francophone, le français est très souvent utilisé autant en dehors de la famille que dans la famille. Chez les groupes à très faible vitalité, le français est très peu parlé, que ce soit dans le contexte familial ou en dehors de celui-ci. On constate également que chez les autres groupes francophones, l'utilisation du français est plus fréquente dans la famille que dans les autres milieux de vie, mais cette fréquence diminue en fonction de l'affaiblissement de la vitalité du groupe. Il semble donc que si la famille peut offrir une certaine résistance face à l'assimilation linguistique, cette résistance est plus difficile à maintenir lorsque la vitalité du groupe devient très faible.

L'état d'unilinguisme, de bilinguisme ou d'assimilation est davantage relié, en moyenne, à la vitalité ethnolinguistique de la communauté qu'aux caractéristiques personnelles de l’individu (Landry et Allard, 1992b). Les nombreuses recherches sociolinguistiques de Raymond Mougeon et de ses collègues en Ontario ont également démontré l'importance de facteurs sociologiques et démographiques sur le développement langagier des Franco-Ontariens (Mougeon et Beniak, 1991, 1994 ; Mougeon, Beniak et Valois, 1985 ; Mougeon et Canale, 1980 ; Mougeon, Canale et Bélanger, 1978 ; Mougeon et Heller, 1986 ; Mougeon, Heller, Beniak et Canale, 1984). De même, l'importante recherche pancanadienne de Roger Bernard (1990c) auprès des jeunes francophones démontre clairement que les taux d'assimilation sont étroitement reliés à la vitalité des communautés francophones.

Comme l'affirmait notre première prémisse, c'est dans un contexte social que s'acquiert une langue. Sans un nombre minimum de membres et sans une forme quelconque d'organisation sociale, la communauté n'existe pas et les locuteurs d'une langue n'ont pas [412] accès aux lieux privilégiés qui permettent au processus de socialisation dans la langue de s'actualiser. Trop souvent, le bilinguisme est perçu comme un phénomène purement individuel qui est le résultat d'aptitudes linguistiques et de motivations personnelles. Ces constats proviennent surtout d'études effectuées auprès de jeunes vivant dans un contexte majoritaire et dont l'état de bilinguisme est une question de choix personnel, l'individu n'étant pas socialement immergé dans une langue seconde (Gardner, 1985 ; Gardner et Clément, 1990 ; Gardner et Maclntyre, 1992, 1993). Pour les personnes vivant dans un contexte minoritaire, le bilinguisme est déterminé surtout socialement. Dans ce contexte, le véritable défi du bilinguisme n'est pas l'apprentissage d'une langue seconde, mais la maîtrise de celle-ci, sans précipiter la perte de la langue maternelle. Sans un minimum de vitalité ethnolinguistique, sans certaines institutions qui favorisent la socialisation dans la culture et dans la langue maternelle, le type de bilinguisme développé sera alors fortement soustractif et ne constituera qu'une étape de transition vers l'assimilation linguistique et culturelle.


Figure I
Degré d'utilisation du français et vitalité
des communautés francophones


[413]

La vitalité ethnolinguistique subjective est à la base des stratégies identitaires des membres du groupe. Les deux premières prémisses stipulent que sans des contacts continus entre les membres de la communauté, c'est-à-dire sans une certaine vie communautaire, le groupe ne peut conserver la cohésion sociale nécessaire à sa pérennité. Et lorsque l'organisation sociale de la minorité est fragile, les membres du groupe n'ont pas les réseaux interpersonnels et les contacts linguistiques nécessaires à la construction d'une identité positive. L'identité ethnolinguistique se construit par un processus de comparaison sociale (Tajfel, 1974). En raison des nombreux indices de vitalité ethnolinguistique favorisant le groupe dominant (par exemple, dans les médias, dans l'affichage commercial et public, dans les commerces et dans les services publics) et des indices relativement peu nombreux de vitalité favorisant le groupe minoritaire, les membres de la minorité attribuent une forte vitalité au groupe dominant et peu de vitalité à leur propre groupe (Bourhis, Giles et Rosenthal, 1981 ; Allard et Landry, 1986, 1992,1994). Les membres d'une minorité qui accordent peu de vitalité à leur communauté auront tendance à dénigrer les avoirs et les traits culturels de leur groupe et à assumer une identité négative. Dans une tentative d'affirmation positive de leur identité, nombreux sont les membres d'une communauté à faible vitalité qui cherchent à s’assimiler au groupe dominant (Giles, Bourhis et Taylor, 1977). Ces membres ont tendance à accorder peu de légitimité et peu de chances de survie à leur communauté. Ainsi, ils cherchent davantage à s'intégrer dans la communauté dominante et peuvent assumer une identité mixte pour graduellement s'identifier exclusivement à cette communauté (Allard et Landry, 1994). Pour que la vitalité subjective des membres puisse donner naissance à des stratégies identitaires plus positives, ceux-ci doivent pouvoir vivre des expériences culturelles et langagières qui démontrent l'illégitimité de leur statut (une croyance normative qui reflète le caractère injuste de leur situation) et l'instabilité de leur condition (une croyance qui permet d'espérer des améliorations possibles). Le fait de percevoir la nature illégitime et instable du statut d'un groupe permet à ses membres d'adopter des stratégies identitaires plus affirmatives et créatives, allant de la créativité sociale à la compétition sociale (Tajfel, 1982 ; Tajfel et Turner, 1979).

Si le processus identitaire et le comportement langagier sont le produit d'un certain déterminisme social, faut-il croire à un certain fatalisme (Bernard, 1997) ? Pour répondre à cette question, il faut reconnaître que les effets du déterminisme social peuvent être positifs comme ils peuvent être négatifs. Par exemple, si on peut associer le phénomène de l'assimilation linguistique au déterminisme social, force est d'admettre que c'est également celui-ci qui est à la base de la fierté et de l'identité francophone. Le déterminisme social signifie simplement que l'identité ethnolinguistique et le comportement langagier sont largement déterminés socialement. Une vitalité forte et la présence d'institutions communautaires permettent une socialisation dans la langue et dans la culture qui contribue positivement au développement psycholangagier dans la langue du groupe. Une vitalité faible et l'absence d'institutions produisent tout simplement l'effet contraire. Il faut considérer la quantité et la qualité des contacts vécus dans chacune des langues. Il n'y a pas de fatalisme, puisque le comportement langagier, les compétences langagières et l'identité ethnolinguistique des membres d'une communauté peuvent être modifiés. Ce que le concept de déterminisme social implique, c’est que les changements significatifs souhaités ne pourront être obtenus sans la présence de certaines niches institutionnelles (écoles, institutions sociales et culturelles) qui pourront modifier le vécu social des membres.

Le déterminisme social est-il conciliable avec la liberté humaine et la détermination personnelle ? Le comportement langagier des membres des communautés francophones minoritaires est-il entièrement déterminé ? Ces derniers sont-ils incapables de choisir et [414] de guider eux-mêmes leur avenir culturel ? Pour résoudre ce paradoxe apparent, il faut éviter la pensée dichotomique et adopter plutôt une pensée dialectique qui unit les contraires. En d'autres mots, même si nous estimons que l'environnement social est largement déterminant du comportement langagier, nous croyons que la personne est à la fois déterminée et libre. Le comportement langagier, comme de nombreux autres comportements humains, est à la fois le produit d'un conditionnement et d'une liberté d'agir. La liberté d’action, toutefois, n'est possible que par l'entremise de la conscience. C'est en devenant consciente des forces de l'environnement qui la conditionnent que la personne devient libre de ses propres actions et qu'elle devient un être d'intention. Notre troisième prémisse est donc que des stratégies identitaires positives et créatives sont possibles dans un contexte de faible vitalité ethnolinguistique, pour autant que les membres de la communauté aient accès à des lieux privilégiés de socialisation et qu'ils soient conscientisés aux forces sociales qui conditionnent leur comportement langagier et culturel. La vitalité subjective ainsi développée conscientise à la légitimité d’une identité collective positive et permet d'estimer le potentiel d'action et d'affirmation du groupe. Une telle conscientisation sociale peut opposer au déterminisme social unidirectionnel un « déterminisme réciproque » (Bandura, 1976, 1978) et la détermination de survivre et de vivre linguistiquement et culturellement (Landry, 1993, 1995).

La naïveté sociale peut être la source de stratégies identitaires suicidaires. Ce qui découle des trois prémisses discutées ci-haut, c'est que chez les minorités francophones à faible vitalité dont les membres auront été peu conscientisés à la légitimité sociale de leur langue et de leur culture, la tendance naturelle, voire la norme, sera l’assimilation. De fait, la résistance à l'assimilation dans un contexte minoritaire dépend du degré de complétude institutionnelle ou de vie communautaire dont se dotera le groupe et du degré de conscience sociale de ses membres, c'est-à-dire sa capacité d’exercer certains pouvoirs (Cummins, 1989 ; Corson, 1993 ; Corson et Lemay, 1996). Malheureusement, dans un contexte minoritaire, une certaine naïveté sociale est souvent présente chez les membres de la communauté (Landry, 1994 ; Landry et Allard, 1994d). La naïveté sociale, telle que nous la définissons, comprend au moins trois éléments. Premièrement, le bilinguisme est souvent perçu comme un phénomène surtout psychologique et individuel ; le bilinguisme serait alors une qualité personnelle acquise en fonction de ses expériences et de ses dispositions psychologiques (aptitudes, attitudes, motivations, etc.). Cette perception, qui n'est pas sans fondement, est erronée surtout par son caractère limitatif : elle fait abstraction de la nature sociale du bilinguisme. Le deuxième élément de la définition de la naïveté sociale est donc cette inconscience du rôle du déterminisme social dans l'acquisition d'une langue seconde. Nous pouvons illustrer cette inconscience sociale par quelques résultats de recherche. Ainsi, au Nouveau-Brunswick, 50% des adultes francophones interviewés déclaraient qu'il serait préférable que leurs enfants soient scolarisés la moitié du temps en français et l'autre moitié en anglais (Landry et Allard, 1994c, 1994d ; Landry, 1994). La croyance veut que ce modèle de scolarisation soit celui qui produirait le plus haut degré de bilinguisme. Pourtant, les recherches en milieu minoritaire démontrent clairement que les francophones atteignent les plus hauts degrés de bilinguisme additif lorsqu'ils sont scolarisés entièrement dans leur langue (sauf pour les cours d'anglais langue seconde) (Hébert et al., 1976 ; Landry et Allard, 1991, 1993). Dans nos contacts avec des parents francophones de nombreux milieux minoritaires canadiens, nous avons souvent entendu cet argument. Celui-ci semble fondé sur la croyance que le bilinguisme est essentiellement développé par l'école. De plus, il semble que l’école soit vue comme étant située dans un vacuum social. C'est un peu comme si l'école n'était pas imbriquée dans un contexte social ou qu'il n'y avait pas de société. [415] Comme nous le soulignons plus loin, l'argument du 50/50 ne serait valide que lorsque les deux communautés sont comparables sur le plan de la vitalité ethnolinguistique, ou si le milieu social à l'extérieur de l'école n'avait pas d'effet sur le développement langagier des élèves.

L'inconscience du rôle du déterminisme social sur le développement langagier en milieu minoritaire a pour corollaire l'inconscience chez les membres de la communauté des conséquences collectives de leurs actions individuelles. Il s'agit là du troisième élément de notre définition de la naïveté sociale. Le phénomène de bilinguisme étant surtout perçu comme un phénomène personnel et individuel, les membres n'ont pas souvent tendance à affirmer leur identité et leur présence sur le plan social. Par exemple, une partie importante de la communauté minoritaire tolère facilement le manque d’accès à des postes de radio ou de télévision en français, l'absence de la langue française dans l’affichage public et commercial, de même que le fait d'être servi en anglais dans les magasins et par les organismes gouvernementaux et paragouvernementaux, parce que les individus se disent bilingues et capables de se débrouiller. Pour plusieurs, il s'agit là d'une composante positive de leur identité de minoritaire, dont quelques-uns retirent même une certaine fierté. Peu d'entre eux réalisent l'effet de l'affirmation d'un bilinguisme individuel par l’ensemble des membres du groupe : leur langue maternelle finit par être de trop, voire inutile, dans la société. Ces membres de la communauté semblent tout à fait inconscients du besoin d'une certaine complétude institutionnelle pour que leur communauté puisse demeurer active et distincte. Ils semblent donc insensibles aux conséquences du manque d'affirmation de leur identité francophone sur la collectivité, c'est-à-dire sur les probabilités de survie de leur communauté. En somme, tout ceci fait partie de ce que nous pourrions appeler le syndrome du minoritaire qui se manifeste par une identité de minoritaire (Cazabon, 1989, 1997). Cette identité reflète une profonde insécurité par rapport à la culture du groupe minoritaire et une légitimation exclusive de la communauté culturelle et linguistique dominante. Cette insécurité culturelle entraîne même la création de factions à l'intérieur de la communauté : les membres militants et actifs de la communauté sont perçus comme des fanatiques de la cause et considèrent à leur tour que les membres passifs sont des assimilés ou des vendus. En bout de ligne, la naïveté sociale devient souvent la source de stratégies identitaires suicidaires. De nombreux membres sont satisfaits, par exemple, que leurs enfants soient scolarisés en français dans des programmes d'immersion en français langue seconde ou dans des programmes de scolarisation 50/50. D'autres encore refuseront de revendiquer leur droit à l'autonomie dans le domaine de la gestion scolaire, et ce, au nom de la bonne entente avec la communauté dominante.

L'éducation est l'outil principal de conscientisation qui permet de transformer le déterminisme social en un déterminisme réciproque. Pour qu'une minorité linguistique puisse devenir une « minorité active » (Moscovici, 1979), c'est-à-dire une communauté qui se responsabilise et qui prend en charge sa propre destinée, elle doit premièrement être conscientisée à sa situation de minoritaire, non pas pour se sentir davantage minoritaire, mais pour graduellement être dotée d'un certain pouvoir qui mobilise le potentiel d'émancipation de la communauté. Comme la pédagogie des opprimés de Paulo Freire (1980) qui conscientise les individus à leur état d'opprimé et qui les responsabilise dans leur libération, une pédagogie du minoritaire peut être développée pour conscientiser les élèves à leur état de minoritaire et les investir d'un pouvoir d'affirmation ethnoculturelle (voir aussi McMahon, 1996 ; Masny, 1996). Cette conscientisation doit permettre aux membres de la communauté de transcender la naïveté sociale et d'objectiver le déterminisme social à l'œuvre. L'éducation peut amener les membres de la communauté à prendre conscience [416] des forces sociales qui conditionnent leur comportement langagier et l'expression de leur culture. Cela leur permettra d'objectiver et donc de regarder de l'extérieur leur état de minoritaire. Comme nous l’avons vu, ce qui nous permet de devenir un être d'intention, c'est la prise de conscience des facteurs qui nous conditionnent. La prise de conscience du déterminisme social qui façonne le comportement langagier et culturel permet aux membres de la communauté de transformer ce déterminisme en déterminisme réciproque (Bandura, 1976, 1978). Les membres qui ont ainsi objectivé leur situation peuvent devenir des agents de changement de leur condition sociale. En d'autres mots, il y a déterminisme réciproque lorsque les membres d’une communauté, conscientisés aux forces sociales qui conditionnent leurs comportements linguistiques et culturels, convaincus de la légitimité de leur langue et de leur culture et éveillés à l'instabilité de leur condition (la possibilité que leur situation soit autre), prennent des décisions menant à des actions pouvant contribuer à l'affirmation culturelle du groupe.

Des recherches sociologiques (Coleman, 1987) démontrent que les parents sont de moins en moins les principaux agents de transmission du capital social et culturel aux enfants. De même, l'Église est de moins en moins un agent dominant de socialisation culturelle et linguistique (Bernard, 1990b). Sans minimiser l'importance de la socialisation par la famille et la religion, force est de reconnaître que c'est l'école et les médias qui sont devenus les principaux agents socialisants des enfants. Puisque les médias aux États-Unis et au Canada, exception faite du Québec, sont presque entièrement monopolisés par la langue anglaise, les institutions éducatives sont les principaux et, dans certains cas, les seuls lieux où la communauté francophone minoritaire peut instaurer un processus collectif de transmission et de reproduction culturelle. Si l'affirmation culturelle de la communauté francophone minoritaire dépend du degré de conscience sociale des membres et du pouvoir de la communauté, les institutions éducatives gérées par celle-ci sont les principaux agents de cette conscientisation, ce qui leur confère un rôle essentiel dans le maintien et le développement de la communauté.

L'éducation peut être le principal agent de communautarisation. Lorsque la minorité linguistique gère de façon autonome une partie importante de ses institutions éducatives, celles-ci peuvent se concerter autour d'un projet communautaire. Les buts de l'éducation peuvent dépasser ceux communément associés aux programmes scolaires ou académiques. L'éducation vise alors à développer les savoirs, les savoir-faire, les savoir-être et les savoir-devenir nécessaires à la préparation des gens qui bâtiront la communauté, c'est-à-dire des agents de communautarisation. Ainsi, les diplômés de ces institutions pourront être « des individus autonomes, compétents dans leur langue, fiers de leur culture et sûrs de leur identité qui sauront à leur tour contribuer à la reproduction de leur communauté dans tous les secteurs qui sauront garantir sa vitalité » (Landry, 1985, p. 21).

Le véritable défi des communautés minoritaires transcende celui de promouvoir l'utilisation de la langue et l’affirmation culturelle des membres de la communauté. La marque de réussite de la lutte contre l'assimilation est la transmission de la langue et de la culture à l’ensemble des membres des générations futures. C'est pourquoi le maintien d'une organisation sociale et d'une certaine complétude institutionnelle est crucial pour la vitalité de la communauté. Les personnes naissent et meurent, mais les institutions, une fois mises sur pied, sont susceptibles d'être pérennes. La communauté qui gère ses propres institutions établit un système social de réseaux et de relations qui permet à la communauté de prendre forme, de vivre, de grandir et de se reproduire. Or, de nombreuses minorités francophones canadiennes n'ont pas accès à un réseau complet d’institutions. Par ailleurs, toute société constitue normalement un métasystème social composé d'au [417] moins cinq systèmes interreliés, soit politique, économique, écologique, biosocial et culturel (voir Lapierre, 1977, pour une définition des rôles et des fonctions de ceux-ci). Pour ce qui est des minorités francophones hors Québec, aucun de ces systèmes n'est entièrement sous leur contrôle. Au mieux, elles peuvent aspirer à être autonomes dans certains sous-systèmes (par exemple, le système scolaire qui est un sous-système du système culturel, ce dernier regroupant toutes les institutions reliées à la transmission des connaissances, des valeurs, des mœurs et des coutumes) ou à exercer une influence sur la gestion de certains systèmes, cette influence étant souvent étroitement associée au capital démographique de la minorité.

Le capital démographique des communautés francophones (nombre de membres, proportion de la population, concentration sur un territoire, taux d'exogamie, émigration et immigration, taux de natalité) est souvent tel que les réseaux sociaux n'ont ni la fréquence ni la qualité requises pour la création d'une véritable vie communautaire. Et comme nous l'avons déjà mentionné, sans vie communautaire, la minorité s'effrite, se désintègre et s'assimile à la communauté dominante (Fishman, 1989, 1990). La vie des francophones minoritaires est souvent fragmentée ; pour beaucoup d'entre eux, seules des parcelles de vie quotidienne sont vécues en français. Avec la prolifération des médias et le taux grandissant d'exogamie, la vie en français au sein même de la famille est perturbée. À moins d'un réaménagement social imposé dictatorialement, il s'avère quasi impossible dans certaines localités de créer les conditions socioculturelles nécessaires à la vie communautaire. L'espoir de ces minorités francophones repose donc en grande partie sur le potentiel de communautarisation des institutions éducatives et sur le contexte juridique canadien qui y donne au moins partiellement accès.

Nous pouvons considérer le rôle communautaire de l'éducation sous au moins trois angles. Premièrement, l'école est une extension de la famille. La famille et l'école sont deux institutions de base qui peuvent favoriser la socialisation en langue première (L1). Conjointement, chez les communautés de faible vitalité, elles sont des balanciers compensateurs (voir figure IIA) qui permettent un certain refuge par rapport au milieu socio-institutionnel qui est largement dominé par la langue seconde (L2). Pour appuyer l'école et la famille, la communauté minoritaire à faible vitalité doit chercher à créer le maximum de contacts en utilisant la langue première (L1) dans le milieu socio-institutionnel (voir flèche montante vers la gauche, figure IIA). Le bilinguisme additif (haut degré de compétence en langue première, accompagné d'une disposition affective favorable à l'intégration dans sa communauté linguistique, tout en ayant un haut degré de compétence en langue seconde) dans un contexte de faible vitalité de la communauté est favorisé par l'utilisation de la langue première en famille et par une scolarisation entièrement dans cette langue, sauf pour les cours de langue seconde (Baril, 1987 ; Cummins 1981, 1984, 1986, 1989 ; Hamers et Blanc, 1983, 1989 ; Hébert et al., 1976 ; Landry, 1995 ; Landry et Allard, 1991, 1993 ; Landry, Allard et Théberge, 1991 ; Skutnabb-Kangas, 1983, 1984 ; Willig, 1985). Ce bilinguisme additif est possible en raison d'un haut degré de transfert des aspects cognitifs académiques de la langue première à la langue seconde, des fortes pressions sociales et des nombreuses occasions de maîtriser la langue seconde dans le milieu socio-institutionnel. Le principe de base du modèle des balanciers compensateurs est que le bilinguisme additif est toujours davantage favorisé par une accentuation positive de la langue de la communauté ayant la plus faible vitalité (Skutnabb-Kangas, 1988). C'est pourquoi, pour les communautés à forte vitalité comme les anglophones en Amérique du Nord (voir figure IIB), le bilinguisme additif est favorisé par une forte scolarisation en langue seconde (par exemple, les programmes d'immersion). Pour ces derniers, la langue première est apprise et maintenue en [418] raison de l'appui du milieu familial et du milieu socio-institutionnel. De plus, le bilinguisme a tendance à être peu maintenu chez ces groupes majoritaires si la scolarisation en langue seconde n'est pas accompagnée d'autres contacts dans cette langue dans le milieu socioinstitutionnel (voir flèche montante vers la droite, figure IIB).

Source : Adapté de Landry et Allard, 1990.

Le modèle des balanciers compensateurs prédit également que chez les familles exogames (par exemple, mariages mixtes francophones-anglophones), le bilinguisme additif des enfants sera davantage garanti lorsque la famille favorisera l'usage de la langue minoritaire au foyer, et que la scolarisation sera entièrement dans cette dernière, sauf pour des cours de langue seconde dans la langue majoritaire. En d'autres mots, la famille exogame doit, elle aussi, favoriser le développement de la langue la plus faible sur le plan communautaire. Une recherche récente (Landry et Allard, 1997) donne un appui empirique très fort à cette hypothèse. De fait, lorsque les analyses statistiques tiennent compte des degrés d'ambiance française de la famille et de scolarisation en français, on [419] observe très peu de différences entre le développement psycholangagier des enfants de familles exogames et celui des enfants de familles endogames francophones. Ce n'est pas l'exogamie qui influence le développement psycholangagier des enfants, mais plutôt la dynamique de socialisation langagière et culturelle vécue par les enfants au sein de la famille, de même que la scolarisation.

Le deuxième angle du rôle communautaire de l'école et des autres institutions éducatives est associé à la formation des leaders de la communauté, son défi étant de développer des agents de communautarisation. À notre avis, la formation de leaders compétents et engagés dans la communauté minoritaire nécessite une prise en charge complète du système éducatif par celle-ci. Dans le contexte canadien, il est difficile pour les communautés francophones d'aspirer à l'autonomie politique et économique, mais ces communautés devraient viser le plus haut degré possible d'autonomie culturelle, car, dans un cadre démopolitique limitatif, l'autonomie culturelle est une des seules voies institutionnelles qui puisse favoriser le développement d’une vie communautaire. Ainsi les communautés francophones doivent non seulement acquérir la gestion scolaire permise en vertu de l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés (voir Martel, 1991 ; Ducharme, 1996), mais aussi faire en sorte que le plus grand nombre possible d'étudiants aient accès à l'éducation postsecondaire en français (Bernard, 1992 ; Churchill, Frenette et Quazi, 1985 ; Frenette et Quazi, 1996 ; Tardif et McMahon, 1989), car c'est de plus en plus dans ce milieu que les leaders de la communauté sont formés (voir par exemple l'étude de Higgins et Beaudin (1988) sur le rôle de l'Université de Moncton dans l'émancipation de la communauté acadienne francophone du Nouveau-Brunswick). L'éducation en milieu minoritaire doit développer le sens entrepreneurial non seulement dans le secteur économique, mais dans tous les secteurs reliés à la vitalité ethnolinguistique de la communauté. Ainsi, l'école, les collèges et les universités doivent viser à développer dans leurs programmes d'étude et dans leurs approches pédagogiques le sens de l'initiative, les habiletés de leadership, la confiance en soi et l'engagement communautaire (Landry, Allard, MacMillan et Essiembre, 1994).

Troisièmement, l'école peut devenir pour la minorité un centre de vie communautaire. Rappelons que les paramètres sociaux et démographiques empêchent souvent une vie communautaire chez les membres de la minorité francophone. Le contexte social ne favorise alors pas la création des réseaux de contacts linguistiques (Landry et Allard, 1990) nécessaires au développement psycholangagier et identitaire des membres de la minorité. C'est ainsi que l’on verra se développer différents modèles de centres scolaires communautaires (Hébert, 1993 ; Délorme et Hébert, 1998) au Canada, et ce, à la suite de l'initiative du Nouveau-Brunswick. L'école peut être plus qu'un lieu d'enseignement ; elle devient un lieu de socialisation communautaire où aînés et enfants se côtoient, où adultes et jeunes collaborent à des activités culturelles et sociales, où la communauté peut bâtir un sens d'appartenance et œuvrer à des initiatives d’autonomisation culturelle. Les milieux éducatifs deviennent ainsi des lieux de culture et de socialisation pour toute la communauté.

Le Centre scolaire communautaire Sainte-Anne de Fredericton,
le premier du genre au Nouveau-Brunswick, a ouvert ses portes en 1978
.

[420]

La pédagogie en milieu minoritaire :
un projet communautaire


Dans cette dernière partie du chapitre, nous proposons les grandes lignes d'une pédagogie en milieu minoritaire conçue pour favoriser la formation des agents de communautarisation dont il a été question dans la présentation de notre sixième prémisse. À notre avis, une telle pédagogie n'est possible que si la communauté minoritaire a atteint un certain degré d'autonomie culturelle, le critère minimum étant celui d'une gestion scolaire autonome. Les bases conceptuelles de cette pédagogie ont été élaborées dans un article récent (Landry, 1993). Nous n'exposons ici que les principaux jalons d'une pédagogie qui doit viser à bâtir la détermination de survivre et de vivre culturellement dans un monde où le déterminisme social favorisant l'assimilation linguistique et culturelle se fait de plus en plus menaçant. Si nous ajoutons à ce chapitre sur l’éducation en milieu minoritaire francophone une section qui traite de pédagogie, c'est que nous sommes convaincus que celle-ci doit être le prochain cheval de bataille de la francophonie minoritaire canadienne. L'accès à la gestion scolaire n'est pas une fin en soi. Le véritable défi de la gestion scolaire en milieu minoritaire est celui de transformer l'école pour qu'elle contribue au maximum à la formation de leaders et de membres de la communauté francophone qui prendront en charge la destinée et l'épanouissement de celle-ci. Car si la pédagogie ne doit pas être interventionniste, elle se doit d'être intervenante (Cazabon, 1996).

Nous avons présenté l'école comme une institution fondamentale de reproduction culturelle. Mais la mondialisation des rapports sociaux, autant économiques que politiques et culturels, et l'éclatement des frontières culturelles obligent les minorités francophones à cultiver des rapports interculturels, tout en luttant contre les forces homogénéisantes causées par l'omniprésence de la culture anglo-américaine. La naïveté sociale (ou le manque de conscientisation sociale des membres de la communauté) est reliée au degré de scolarisation de ceux-ci (Landry et Allard, 1994d). Plus leur degré de scolarisation est élevé, plus bas est leur degré de naïveté sociale. Les réformes scolaires doivent cependant accentuer autant la qualité que la quantité des interventions éducatives, dans le but de former des êtres d'intention capables de s'affirmer culturellement et de s'engager communautairement.

Les membres des communautés minoritaires francophones étant inférieurs en nombre, ils devront compenser en mettant l'accent sur la qualité et l'excellence. L'état minoritaire des communautés francophones favorise l'assimilation, mais, sous d'autres aspects, être un petit nombre constitue un atout. Le sens sociologique de l'expression small is beautiful (Schumacher, 1973) est qu'un système plus petit peut plus facilement rallier ses forces et concerter ses actions. Par des partenariats bien choisis, les communautés francophones minoritaires peuvent créer une synergie éducative capable de contribuer à la formation d'agents de communautarisation. Par des partenariats stratégiques, les éducateurs en milieu minoritaire francophone peuvent se doter d'une mission éducative commune fondée sur l'affirmation culturelle et l'engagement communautaire. La mise en œuvre de cette mission éducative pourrait être axée sur ce que nous appelons une pédagogie actualisante. Celle-ci est définie comme étant un « processus interactif de socialisation- autonomisation qui s'adapte aux caractéristiques individuelles de chaque apprenant et apprenante et qui vise à actualiser le plein potentiel de chaque élève dans ses dimensions intrapersonnelle, interpersonnelle et sociale » (Faculté des sciences de l’éducation, Université de Moncton, 1997, p. 12). C'est une pédagogie qui invite la participation active des élèves au processus d'enseignement-apprentissage dans un climat d'accueil et d'appartenance. Elle responsabilise l'élève face à son développement personnel, à l'actualisation [421] de son potentiel d'apprentissage et à son rôle comme membre de communauté scolaire, culturelle, ou autres, sur la scène régionale, nationale ou mondiale. En d'autres mots, elle invite l'élève à se donner un projet de vie. Cette pédagogie engage une action dialectique qui unit dans le processus d'apprentissage des démarches de transmission culturelle (c'est l'aspect socialisation) et des démarches qui visent à développer chez l'élève le sens critique, la responsabilité et l'autonomie (c'est l'aspect autonomisation).

Malgré la nature potentiellement universelle d'une telle pédagogie, trois des volets sont particulièrement pertinents à l'éducation en milieu minoritaire. Pour apprécier la pertinence de ces trois volets, il faut toutefois considérer l’esprit d'ensemble de la pédagogie actualisante. Traditionnellement, nos systèmes éducatifs ont mis l'accent sur la transmission des connaissances et sur le rôle passif de récepteur chez l’apprenant. On ne développe pas les futures générations de leaders et d'entrepreneurs en étouffant toute initiative individuelle, et on ne développe pas l'affirmation culturelle en ne permettant qu'à l'enseignant de s'exprimer librement. La pédagogie actualisante nous invite à redécouvrir que l'éducation est avant tout la formation d'un être humain. Elle met l'accent sur l'unicité de l'élève et sur sa responsabilité personnelle face à la prise en charge de sa destinée. Mais découvrant ce qu'il a d'unique, l'élève est aussi confronté à ce qu'il a de commun avec les autres ; il réalise qu'il est le produit d'un héritage, tant sur le plan biologique que sur le plan culturel. Confronté à son unicité, l'élève prend donc aussi conscience de son altérité ; il est à la fois un et autre.

Ceci nous amène à définir un premier volet de la pédagogie actualisante qui est au centre de l'éducation en milieu minoritaire. C'est une pédagogie de la conscientisation. Tel que nous l'avons relevé dans l’analyse de notre cinquième prémisse, l'école peut être le principal outil de conscientisation collective dont dispose une minorité. Le programme d'étude développé par les membres de la minorité doit avoir comme objectif explicite la formation d'agents de communautarisation qui auront la détermination de survivre et de vivre culturellement. En apprenant que toute personne est le produit d'une culture et d'une histoire, l'élève découvre que chaque culture est l'expression d'une créativité sociale exercée par un groupe au cours des siècles, dans le but de s'adapter à l'environnement physique et social, et d'affirmer sa spécificité. On ne doit pas, dans une telle pédagogie, sous-estimer l'importance d'un matériel scolaire contextualisé et culturellement pertinent (Duquette, 1997 ; Duquette et Cléroux, 1993). L'élève peut donc apprendre simultanément à apprécier sa propre culture et à respecter celle des autres, ce qui l'amène à comprendre ses responsabilités comme citoyen du monde (voir à ce sujet Ferrer, LeBlanc-Rainville et Gamble, 1990 ; Ferrer, 1997).

En étant exposé au concept de culture, l'élève verra non seulement que les cultures changent et évoluent, mais aussi que d'autres s'estompent et disparaissent. Il apprendra à poser un regard objectif sur les langues et les cultures, un peu de la même façon qu'en biologie on apprend que des espèces vivantes peuvent évoluer ou disparaître. Ainsi, les élèves seront sensibilisés à l'écologie des langues et des cultures. Ils pourront analyser les menaces réelles de la culture dominante et comprendre le processus d'assimilation qui s'opère chez beaucoup de groupes minoritaires. Chaque élève sera en mesure, par une analyse réflexive, de situer son propre cheminement identitaire et de prendre personnellement position dans une démarche d'affirmation culturelle. Une pédagogie de la conscientisation libère la personne en la rendant consciente des facteurs qui la conditionnent et l'invite à choisir librement ses stratégies d'intégration sociale. L'apprentissage de la prise en charge de sa propre destinée par l’individu est un processus difficile à gérer pédagogiquement (Glasser, 1985), puisque l'éducateur doit compter sur le fait que chaque personne a les ressources nécessaires pour arriver elle-même aux actions visées. La pédagogie traditionnelle [422] a plutôt tendance à dicter de l'extérieur les comportements désirés. À long terme, toutefois, l'apprentissage de la responsabilité et de l'autonomie est nettement plus productif, puisque l'individu devient un être d'intention capable de déterminer lui-même ses actions futures (Freire, 1980 ; Jacquart, 1984). Conscientisé au déterminisme social, celui-ci découvre et apprécie les conséquences collectives de ses actions individuelles.

Il est évident qu’une pédagogie de la conscientisation ne peut être mise en œuvre par les approches inscrites dans le cadre du « paradigme de la transmission » (Cummins, 1986,1989). L'enseignement doit plutôt adopter des modèles interactifs et pratiques qui laissent beaucoup plus de place au dialogue, à la discussion en groupe et à la gestion participative. La pédagogie de la conscientisation pourrait être jumelée à une pédagogie de la coopération ; celle-ci constitue d'ailleurs le deuxième volet d'une pédagogie actualisante en milieu minoritaire. Cette pédagogie veut que la prise en charge personnelle visée par la pédagogie de la conscientisation sera mieux ancrée si elle résulte d'une démarche collective. De nombreuses approches pédagogiques peuvent être utilisées dans le cadre d'une pédagogie de la coopération, par exemple, des approches à l'apprentissage coopératif (Slavin, 1983, 1990 ; Johnson et Johnson, 1989), des réunions de classe (Glasser, 1969), et d'autres modèles variés de discussions de groupe (Joyce et Weil, 1986). Une pédagogie de la coopération n’exclut pas l'utilisation d'approches individuelles ou magistrales, mais choisit stratégiquement une approche de groupe favorisant la confrontation des idées et l'interaction sociale pour l'atteinte de certains objectifs. Cette pédagogie encourage l'utilisation de la langue de la minorité dans un contexte qui en facilite la maîtrise. Une langue est normalement apprise dans des contextes naturels de « négociations de sens » entre des interlocuteurs (Wells, 1981). Mais une approche favorisant la résolution de problèmes en groupe (par exemple, Glasser, 1969) permet aussi de susciter des engagements personnels établis sur des consensus. Le groupe peut lui-même œuvrer à la recherche de façons créatives pour la communauté de s'affirmer culturellement. Différentes approches à l'apprentissage coopératif peuvent non seulement améliorer le rendement scolaire des élèves, mais aussi développer chez eux les habiletés sociales nécessaires au travail d'équipe et à la résolution de problèmes en groupe.

Un autre volet de la pédagogie actualisante doit être marié aux deux aspects discutés. Toute communauté qui ne réussit pas à développer pleinement le potentiel humain de ses membres contribue à un cumul d'« intelligence gaspillée » (Schiff, 1982). Pour une communauté linguistique minoritaire, dont les effectifs sont réduits en nombre, l'actualisation maximale du potentiel humain de ses membres prend une importance capitale. La pédagogie traditionnelle est axée sur la courbe normale et la loi de la moyenne. Les objectifs des programmes scolaires et l’enseignement focalisent sur l'élève moyen, cet élève prototype qui est représentatif du plus grand nombre d'élèves. On a démontré maintes fois que cette pédagogie est moins efficace qu'une pédagogie de la maîtrise ou de la réussite qui fixe des standards élevés, mais qui offre aux élèves l'occasion de faire des activités de récupération ou d'enrichissement à la suite des premiers essais d’apprentissage (Block, Efthim et Burns, 1989 ; Guskey, 1985). La clef du succès de cette approche est largement associée aux pratiques d'évaluation de l'apprentissage scolaire en classe. L'enseignement traditionnel met l'accent sur une évaluation normative et sommative, c'est-à-dire que l'élève est comparé à une norme (par exemple, le rendement moyen de la classe) dans son rendement scolaire, et les évaluations ont pour objectif de classer ou de catégoriser ce rendement à des fins administratives. L'élève est rarement autorisé à continuer son apprentissage des objectifs non maîtrisés et à être réévalué par rapport aux progrès réalisés. Une pédagogie de la maîtrise et du dépassement de soi met plutôt l'évaluation au service de [423] l’apprentissage, en mettant l'accent sur une évaluation critériée et formative. Elle responsabilise chaque apprenant et le met au défi de réaliser pleinement son potentiel d’apprentissage. L'évaluation a pour objectif d'analyser le processus et le degré d’apprentissage dans un but formatif, c'est-à-dire de promouvoir l'apprentissage. Les résultats des évaluations guident l'enseignant dans le choix d'autres activités pédagogiques permettant d'atteindre un plus haut degré de maîtrise des apprentissages visés. Les recherches en éducation ont clairement démontré l'efficacité de cette approche (Block, Efthim et Burns, 1989 ; Guskey et Gates, 1986), mais celle-ci est encore peu généralisée, surtout pour des raisons de gestion et d'administration. On reproche parfois à la pédagogie de la maîtrise son caractère trop traditionnel et même behavioriste, mais celle-ci peut être facilement adaptée à une pédagogie interactive et ouverte. L'important, c'est de viser l'actualisation maximale du potentiel d’apprentissage des élèves. Une minorité linguistique qui doit développer au maximum ses ressources humaines réduites en nombre peut-elle se permettre de ne pas instaurer une approche pédagogique qui se veut actualisante au plus haut degré ?

Conclusion

Les communautés francophones minoritaires, après avoir acquis le droit à la gestion scolaire autonome, se dirigent vers un développement global de l'éducation (Cardinal, Lapointe et Thériault, 1994). Toutefois, un certain nombre de prémisses fondées sur la recherche en milieu minoritaire démontrent que sans une certaine complétude institutionnelle, les minorités francophones peuvent difficilement avoir accès à une vie communautaire. Or, la vie communautaire est essentielle à la création de réseaux de contacts culturels et linguistiques qui nourrissent le développement psycholangagier et la formation de l'identité ethnolinguistique. Dans un cadre limitatif d’incomplétude institutionnelle, l'école et les autres institutions éducatives sont par conséquent les niches institutionnelles de la communauté qui peuvent le mieux appuyer la famille dans des démarches de conscientisation et de communautarisation.

Il existe toutefois, il faut le reconnaître, un certain asynchronisme dans le développement des communautés minoritaires francophones. Si quelques-unes se sont dotées de structures garantissant une certaine autonomie culturelle, d'autres luttent encore pour la gestion scolaire autonome ou une école française. De plus, la vitalité de la francophonie minoritaire canadienne dépend non seulement du degré d'autonomie culturelle des minorités, mais de l'ensemble du capital linguistique cumulé sur les plans démographique, politique, économique et culturel. On ne sait pas encore à quel point les communautés à faible vitalité ethnolinguistique pourront continuer à être ou à devenir des entités actives et distinctes sur un territoire qui devient à la fois de plus en plus homogène anglophone et de plus en plus pluriethnique. L'invasion progressive des paysages linguistiques francophones par l'anglais (Landry et Bourhis, 1997) et l'envahissement de l'imaginaire des membres de la communauté par les médias anglo-américains rendent de plus en plus difficile l'affirmation culturelle d’une minorité francophone sur le territoire habité. L'école et les autres institutions éducatives sont certes des lieux de socialisation importants qui peuvent influencer le vécu des jeunes francophones minoritaires pour de nombreuses années. Mais les efforts de conscientisation et de communautarisation de ces institutions éducatives peuvent-ils contrer le pouvoir d'attraction de la langue et de la culture dominantes, surtout là où elles sont les seules niches institutionnelles sous le contrôle des francophones ? Certaines analyses sociologiques (Bernard, 1997) présentent une vision assez pessimiste du potentiel de l'école comme balancier compensateur face aux forces assimilatrices de la communauté dominante.

Il demeure que, pour beaucoup de minorités francophones, les institutions éducatives sont les seules garantes d'espoir. Les effets de [424] la scolarisation dans la lutte contre le déterminisme social et la naïveté sociale dépendront dorénavant non seulement de la gestion autonome de l'éducation, mais aussi de la qualité des interventions éducatives, c'est-à-dire du degré auquel la pédagogie permet l’actualisation du potentiel humain. La mise en œuvre d'une telle pédagogie nécessite des partenariats stratégiques et une forte mobilisation des ressources humaines et matérielles des communautés francophones. La Commission nationale des parents francophones et plusieurs partenaires entament présentement la création d'un projet éducatif national ayant comme but non plus l'égalité des chances et des ressources, mais l'égalité des résultats. Par ailleurs, ce projet vise la mise en œuvre d’une pédagogie actualisante comprenant les volets suivants : l'unicité de l'enfant, la réussite, la participation et la coopération, l'esprit entrepreneurial, la francisation, l'expression artistique et culturelle, l’intégration à la communauté, et la conscientisation à l'état des francophones en milieu minoritaire. C'est ce qui est ressorti du congrès national « Vers les résultats », tenu à Ottawa, en octobre 1997. L'aspect le plus difficile de ce projet national, en plus du défi de rallier tous les partenaires, sera celui d'un changement du paradigme de l'éducation, changement qui exige une transformation des croyances et l'établissement d'un consensus autour d'une mission éducative et communautaire commune (Fullan, 1991). Passer d'une pédagogie de la transmission à une pédagogie actualisante unifiant les volets de la conscientisation, de la coopération et de la réussite nécessitera une importante synergie des actions de nombreux intervenants du monde de l'éducation et de la communauté. Il faudra établir un véritable programme communautaire qui permettra une vision globale et des actions locales. Les partenariats établis faciliteront certes une vision commune à l'ensemble de la francophonie minoritaire, mais, en raison de l'asynchronisme des développements communautaires, chaque communauté sera appelée à démontrer le maximum de créativité sociale sur le plan local dans la prise en charge de son cheminement vers un développement durable de l'identité francophone.

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Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le dimanche 20 mars 2022 6:53
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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