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Collection « Les sciences sociales contemporaines »

Numéro 27 de la revue Culture technique, “Culture marchande”, 1993.
Paul Camous,
“Préface: la société marchande.”


Une édition électronique réalisée à partir du Numéro 27 de la revue Culture technique, “Culture marchande”, 1993, 266 pp. [Autorisation accordée par le directeur général, Jocelyn De Noblet, de diffuser cette revue en libre accès à tous dans Les Classiques des sciences sociales. M. à Thierry Gaudin pour toutes ses démarches auprès du directeur général de la revue afin que nous puissions reprendre la diffusion de tous les numéros de cette revue.]

[4]

Préface
La société marchande

Morale - culture – techniques


par Paul Camous


In revue Culture technique, no 27, No intitulé: “Culture marchande”, juillet 1993, pp. 4-5. Neuilly-sur-Seine : Centre de recherche sur la culture technique.

Une grande revue scientifique française, qui se veut pédagogique et d'influence, Culture technique, consacre un numéro hors série à la culture marchande. Ailleurs qu'en France, cela aurait été un fait banal et déjà réalisé depuis longtemps !

Un changement dans les concepts qui intègrent enfin technique et culture marchandes

Chez nous, cet événement — à contre-pente des stéréotypes de pensée et d'attitudes qui récusent, encore, les réalités de la fonction commerciale - est, en effet, une manifestation concrète d'un changement dans les concepts.

L'économie de marché reconnue partout comme un acquis social majeur

L'élite de notre pays — enfin — a intégré dans les têtes et accepté d'inscrire dans un livre de mémoire collective ce qui existe, depuis des années, sur le terrain, dans les comportements individuels et collectifs. C'est ce que les peuples — spectaculairement à l'est de l'Europe et d'autres manières sur toute la surface du Globe — ont fait reconnaître politiquement par leurs dirigeants : la supériorité de l'économie de marché et des codes sociaux et moraux qui la fondent et la transcendent, pour lui donner réussite et plein effet.

La place nouvelle de l'immatériel et du marchand

La publication de « Culture marchande » — œuvre de type nouveau d'une très belle collection privilégiant la culture et les techniques industrielles — s'inscrit tout naturellement dans la thématique descriptive d'une civilisation qui donne, chaque jour, plus de place à l'« immatériel » et au « marchand ».

Héritage et patrimoine : savoir et techniques professionnelles - pratiques et règles spécifiques

Ce numéro, un peu spécial, fait, d'abord et globalement, un constat. Celui de l'héritage, peu à peu accumulé et durement payé par l'effort et la peine des générations qui, depuis des milliers d'années, nous ont précédés. Celui, aussi, de l'accélération du tempo de l'Histoire, dans cette deuxième moitié du XXe siècle, qui a fait disparaître les amortisseurs du changement qu'étaient la distance et le temps.

C'est, d'autre part, l'inventaire d'un patrimoine. Vivant, toujours enrichi et renouvelé, il est fait d'un savoir, d'un savoir-faire et de techniques professionnelles comme de pratiques, de règles et de codes spécifiques.

Transmis et modelés au cours des siècles, ces outils et ces moyens de la fonction commerciale constituent un ensemble d'un poids et d'une diffusion sociétales qui sont, aujourd'hui, indiscutablement dominants. Ils le sont :

Un ensemble dominant par son poids et sa diffusion sociale

  • malgré le phénomène bureaucratique,
  • malgré les dérives et les abus dans la nécessaire protection sociale,
  • malgré des réactions corporatives et des désordres dans les pays riches et marchands,
  • malgré la montée de pouvoirs économiques nouveaux là où l'on connaît encore la misère et la faim.

Le marchand est reconnu, à côté du militaire, du politique, de l'ingénieur, du financier, de [5] l'intellectuel, de l'artiste, du médiateur ou des « stars »

Il n'est pas dans notre propos d'analyser les raisons du retard conceptuel qui a fait si longtemps ignorer ou récuser les techniques et la culture marchande. Au bénéfice d'autres pouvoirs en place et d'autres cultures cherchant, chacune également, à s'affirmer et à demeurer dominante : cultures anciennes et pérennes du militaire, du politique, du [5] religieux, du fonctionnaire, de l'ingénieur, du financier, de l'intellectuel et de l'artiste. Comme au premier rang de l'éphémère aujourd'hui, les étoiles et les vedettes de toutes les formes de la société de spectacle et de média de masse.

Pour porter témoignage

Il m'appartient, en revanche, de donner témoignage de l'intérêt que — à contre-courant des idées reçues — les responsables de Culture technique avaient porté, depuis longtemps, aux faits significatifs de la société marchande et à ses ressorts économiques, sociaux et culturels.

La difficulté de présenter la culture marchande, ses techniques et ses règles

Ils avaient, en effet, entrepris depuis plusieurs années de réaliser ce qui est la matière et la manière de cette livraison. Les difficultés d'une tâche - où les matériaux étaient rudimentaires, comme étaient rares les sensibilités à la conceptualisation ou la mémorisation — expliquent cette production tardive. Elle n'est pas l'effet d'une indifférence, ni d'un défaut de perception.

Préface et contre-points à nombre de contributions diversifiées

Il m'appartient, enfin, d'exprimer, en forme de préface, l'apport de l'Institut du commerce et de la consommation.

Deux blocs de cohérence

En contrepoints de la diversité, très contrastée, de plus de trente contributions, dont le rassemblement kaléïdoscopique a voulu, sans doute, refléter, comme en duplication, les mouvements contradictoires et les facettes, brillantes ou délitées de la société marchande, je souhaiterais les rassembler en deux blocs de cohérence :

Une réflexion personnelle et doctrinale

  • une réflexion personnelle qui se voudrait doctrinale, sous le titre ambitieux de « fondements sociaux et culturels de la société marchande » ;

La thématique des études de l'ICC

  • une thématique des études générales qu'a publiées l'ICC depuis sa création.

Ces deux documents sont un hommage.

Hommages aux chefs d'entreprises qui ont fait l'ICC

Il est dû aux chefs d'entreprises du commerce qui ont fondé l'ICC et soutenu, depuis dix ans, un engagement personnel peu commun.

Compréhension intelligente de l'intérêt général qui constitue l'environnement, porteur ou plus souvent hostile, de leurs affaires. Conscience que pour réhabiliter la fonction marchande, il fallait expliquer le marché, ses règles de base (compétition et ajustement permanent) mais aussi son éthique profonde qui doit en corriger la brutalité. Volonté tenace d'entrepreneurs qui savent que rien n'existe sans la durée.

Partage qu'ils ont su faire de leur savoir et de la multiplicité des professionnalismes qui sont indispensables, dans des entreprises complexes et sophistiquées, à cause de leurs contacts directs avec les consommateurs en nombre.

Ce sont quelques-uns des moyens ayant permis de réunir les matériaux d'une connaissance nouvelle de la société marchande. Quelques effets en ont été rapides, et le retour sur investissement immédiat. Mais là n'est pas l'essentiel.

Aujourd'hui, un constat scientifique d'une culture marchande, reconnue enfin comme un savoir technique, de même qu'hier l'effort éditorial de l'ICC, sont pour demain, un point d'appui à d'autres rebondissements, intellectuels et d'informations, plus vastes et plus forts. Ceux-ci porteront, à leur tour, la stratégie des acteurs économiques, l'engagement des politiques et, ce qui est à la base de tout, les décisions des formateurs et enseignants.

C'est à eux, par excellence, que ces « explications » s'adressent. Eux qui en définitive sont les créateurs de l'avenir qui vient.

Paul Camous
Préfet « in partibus infidelium »
Délégué Général de l'ICC
(1982/1992)



Retour au texte de l'auteur: Jean-Marc Fontan, sociologue, UQAM Dernière mise à jour de cette page le vendredi 19 juillet 2024 7:19
Par Jean-Marie Tremblay, sociologue
professeur associé, Université du Québec à Chicoutimi.
 



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